LES BANSHEES D’INISHERIN

Quatorze ans après avoir réuni Colin Farrell et Brendan Gleeson dans le mémorable Bons baisers de Bruges, Martin McDonagh les confronte dans une nouvelle tragicomédie de son cru. Déjà primée à Venise et aux Golden Globes, cette fable absurde et désespérée sur la condition humaine marque le retour du scénariste et réalisateur britannique à ses origines irlandaises. Puissant !

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« You used to be nice ! And now, do you know what your are ? Not nice.
– Ah, well, I suppose niceness doesn’t last then, does it ? »

  

LES BANSHEES D’INISHERIN (The Banshees Of Inisherin)

Martin McDonagh
2022
Dans les salles françaises depuis le 28 décembre 2022

En 1923, sur une petite île à l’ouest de l’Irlande alors en proie à la guerre civile, Colm Doherty (Brendan Gleeson) a subitement décidé de mettre un terme à son amitié de longue date avec Pádraic Súilleabháin (Colin Farrell), qu’il juge désormais « ennuyeux ». Déboussolé, ce dernier tente de le ramener à la raison. Cela va prendre des proportions inattendues…

Ce n’est pas l’Irlande riante de L’homme tranquille, de John Ford. Inisherin, île fictive, est bien plus sauvage. Les paysages impressionnants et accidentés d’Inishmore, la plus grande des îles d’Aran, et les falaises abruptes du comté de Mayo (le réalisateur y a passé son enfance) ont servi de décor à ce drame où la nature inhospitalière est un personnage à part entière. Écrit tout spécialement pour le tandem Colin Farrell – Brendan Gleeson, Les Banshees d’Inisherin rappelle à bien des égards pourtant l’américain Three Billboards, les panneaux de la vengeance, le film précédent de Martin McDonagh. Dramaturge avant d’être cinéaste, avec un penchant pour l’absurde, comme Harold Pinter et Samuel Beckett avant lui, McDonagh soigne ses dialogues. Ceux des Banshees… pourraient être déclamés sur une scène de théâtre. Comme dans Three Billboards, l’action se déroule au sein d’une petite communauté, et les situations dégénèrent de manière hallucinante. Ici, c’est une déclaration péremptoire — « Tu ne m’as rien fait, mais je ne t’apprécie plus. » —qui va déclencher une spirale de violence, sous le regard déconcerté des villageois. Car Pádraic, malheureux, ne peut accepter le revirement de son ami de toujours. Le cinéaste, explorateur de la nature humaine, ne tourne pas autour du pot et a le mérite d’aller jusqu’au bout de son idée. L’entêtement, le désespoir, conduisent à faire des folies. On peut y voir une métaphore du couple, mais aussi de la guerre (des bruits d’explosions et de tirs provenant du conflit irlandais sur l’autre rive retentissent par intermittence). Au début, l’affaire prête à sourire, à rire même. Mais peu à peu l’humour cède la place à la tristesse. La fin de l’amitié avec Colm et c’est le monde de Pádraic qui s’effondre. L’île devient un piège qui se referme sur lui comme sur ses habitants. Car sur Inisherin, la vie se déroule dans une désolante monotonie. Le temps libre est partagé entre l’église et le pub, unique rempart contre la solitude. Pour la forme, Martin McDonagh a confié s’être inspiré des westerns de Sergio Leone et du cinéma de Terrence Malick. Mais pour pimenter l’intrigue, il y a ajouté une touche de mythologie celte. Figure annonciatrice de mort, la banshee du titre a le visage de la vieille Mrs McCormick (Sheila Flitton) qui parcourt l’île avec son sourire narquois. Si Colin Farrell, habité et dont le jeu à la limite du pathos est à fendre le cœur, a mérité son Golden Globe et son Prix d’interprétation à Venise, on notera également la belle présence de ses partenaires, irlandais comme lui : Brendan Gleeson, énigmatique et buté, effrayé par la fuite du temps, Kerry Condon, sœur de Pádraic et seul personnage sensé de l’histoire, et Barry Keoghan, l’idiot du village, attachant et pas si bête. Aux Golden Globes, où il a remporté trois trophées, dont ceux du Meilleur film et scénario, Les Banshees… était classé dans la catégorie comédie. Pour un récit sur le désespoir, ça ne manque pas d’ironie.
1 h 54 Et avec Gary Lydon, John Carty, Jon Kenny, Pat Shortt… La musique est signée Carter Burwell, compositeur fétiche de McDonagh (et des frères Coen).
Prix du scénario et Prix d’interprétation (pour Colin Farrell) au festival de Venise 2022
Golden Globes 2023 du Meilleur film, Meilleur scénario et Meilleur acteur (pour Colin Farrell)

 

BEST OF 2022 (films, séries, performances)

Nam Joo-hyuk et Kim Tae-ri (Twenty Five Twenty One)

 

TOP 10 FILMS

Contrairement à 2021, l’année cinématographique 2022 s’est révélée enthousiasmante. Et même si la baisse de fréquentation des salles a posé problème, la qualité des films programmés n’a rien à y voir. Et n’en déplaise à ses détracteurs, le cinéma français s’est particulièrement distingué.

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1 – ELVIS de Baz Luhrmann (22 juin 2022)

Éblouissant, fabuleux, émouvant : un chef-d’oeuvre ! Ma critique ici

 

2 – LA NUIT DU 12 de Dominik Moll (13 juillet 2022)

La surprise de l’été ! Un polar envoûtant qui frise la perfection. Ma critique ici

 

3 – LICORICE PIZZA de Paul Thomas Anderson (5 janvier 2022)

Un petit bijou nostalgique et un film sur la jeunesse porté par des comédiens épatants. Ma critique ici

 

4 – L’INNOCENT de Louis Garrel (12 octobre 2022)

Une comédie policière et romantique au charme renversant. Bravo Louis Garrel ! Ma critique ici

 

5 – THE BATMAN de Matt Reeves (2 mars 2022)

Chargé d’atmosphères, et emmené par un Robert Pattinson ténébreux en diable, ce Batman néo-punk est incroyablement romantique. Ma critique ici

 

6 – AS BESTAS de Rodrigo Sorogoyen (20 juillet 2022)

Ambiances de western, climat anxiogène, cruauté et violence… ce thriller franco-espagnol aborde une problématique à la fois universelle et intemporelle. Puissant ! Ma critique ici

 

7 – DECISION TO LEAVE de Park Chan-Wook (29 juin 2022)

Un film noir tortueux et hitchcockien, élégant et fascinant, interprété par un tandem d’acteurs séduisants. Ma critique ici

 

8 – PETITE SOLANGE d’Axelle Ropert (2 février 2022)

Une adolescente découvre que ses parents (Léa Drucker et Philippe Katerine) sont sur le point de divorcer, et voit peu à peu la cellule familiale qu’elle chérissait se désintégrer. Ça a l’air banal, mais le quatrième long-métrage d’Axelle Ropert, fidèle collaboratrice de Serge Bozon, est une petite merveille de délicatesse et de sensibilité. La jeune Jade Springer, dans le rôle de Solange, crève l’écran.

 

9 – SPENCER de Pablo Larraín (paru aux USA en 2021, diffusé pour la première fois en France en janvier 2022, sur Prime Video)

Une plongée dans les tourments de Lady Di. Un film hypnotique, poétique, et magnifique à tous points de vue. Ma critique ici

 

10- THE TENDER BAR de George Clooney (production Amazon Studios diffusée pour la première fois en France sur Prime Video le 7 janvier 2022)

Adapté des mémoires du romancier J. R. Moehringer, ce récit initiatique possède un charme fou. Ben Affleck, que l’on croyait perdu pour la cause, y brille particulièrement. Bande-son (Devo, Paul Simon, Chic, Jackson Browne…) à tomber !

 

À RATTRAPER EN 2023 : EO, Nope, Chronique d’une liaison passagère, Leila et ses frères, Stella est amoureuse, tous ces films qui auraient probablement eu leur place ici.

 

 

TOP 10 SÉRIES

 

Ozark

Côté séries confirmées, on applaudit Ozark qui a tiré sa révérence cette année, avec une saison éprouvante pour les nerfs. Idem pour l’emballante The Last Kingdom, après cinq saisons épiques, ainsi que la monumentale Peaky Blinders. Coup de chapeau également aux productions en cours comme  L’amie prodigieuse, dont la troisième saison n’a pas démérité, à Stranger Things et à Devils, qui a trouvé un nouveau souffle.

L’amie prodigieuse

 

Parmi les petites nouvelles de 2022, en voici dix que j’ai particulièrement aimées (l’ordre n’a pas d’importance).

1 – LES PAPILLONS NOIRS (Arte/Netflix)

 Vénéneuse, tordue et pavée de chausse-trappes, la mini-série (6 épisodes) de Bruno Merle et Olivier Abbou en a mis plein les mirettes. Ma critique ici

 

2 – TOKYO VICE (Canal +)

Si Michael Mann n’a réalisé que le pilote, son empreinte est palpable tout du long de cette plongée dans la mafia japonaise adaptée des mémoires du reporter Jake Adelstein. Une première saison passionnante de 8 épisodes, avec Ansel Elgort, Ken Watanabe, Shô Kasamatsu, Rachel Keller et Riko Kikuchi.

 

3 – TWENTY FIVE TWENTY ONE (Netflix)

Le K-drama de l’année ! Produite par le Studio Dragon, cette chronique de la vie de jeunes gens qui tentent de trouver leur voie dans le contexte économique complexe de la fin des années 90 est bourrée de charme. Jamais l’escrime n’aura été filmée avec un tel brio (deux des personnages principaux sont des championnes de haut niveau) et le tandem de stars Nam Joo-hyuk/Kim Tae-ri fait des étincelles.

 

4 – ALL OF US ARE DEAD (Netflix)

La Corée du Sud toujours, de la romance encore, mais ici, l’ambiance est à la sauvagerie et à l’horreur. Dans un lycée où les élèves se transforment en zombies les uns après les autres, des ados tentent de survivre alors que les autorités, dépassées par les événements, les abandonnent à leur sort. Un show tendu, aux images spectaculaires. Avec Chan-Young Yoon et Park Solomon.

 

5 – LE MONDE DE DEMAIN (Arte/Netflix)

Un quatuor de scénaristes émérites dont deux (Hélier Cisterne et Katell Quilléveré) à la réalisation, une brochette de jeunes talents parmi lesquels Anthony Bajon et l’épatant Andranic Manet (dans le rôle de Dee Nasty)… Mieux qu’une évocation des débuts de NTM, voici un formidable portrait de la jeunesse pleine de rêves qui, dans les années 80, a contribué à l’émergence de la culture hip-hop en France. Six épisodes fougueux et éblouissants.

 

6 – PISTOL (Disney+)

Le portrait d’un groupe, les Sex Pistols, passé comme une météorite dans le ciel du rock. Basé sur les mémoires de Steve Jones (guitariste et fondateur du groupe), le script arrange l’histoire à sa sauce et exagère l’importance de Chrissie Hynde, qui n’en demandait pas tant. Qu’importe ! Beaucoup de faits sont exacts, et la mise en scène de Danny Boyle déchire. L’occasion de voir les pérégrinations des jeunes Vivienne Westwood, Jordan et Malcolm McLaren, mais aussi de s’immerger dans cette Angleterre de la seconde moitié des années 70 violentée par la politique de Margaret Thatcher.

 

7 – OUSSEKINE (Disney+)

Une reconstitution intelligente de la tragédie qui a secoué la France de 1986. À Paris, Malik Oussekine, jeune étudiant français d’origine algérienne, rentre tranquillement chez lui après avoir assisté à un concert de jazz lorsqu’il est poursuivi par des Voltigeurs. Ces policiers à moto, déployés dans la capitale depuis les manifestations des étudiants, en colère contre le projet de loi Devaquet, ont l’ordre de disperser les excités. Malik Oussekine n’est pas une menace, mais il est d’origine arabe. Ça lui vaut d’être tabassé à mort dans le hall d’immeuble où il a tenté de se réfugier. Créée par Antoine Chevrollier, la mini-série de quatre épisodes met en exergue le cynisme et la dérive autoritaire du pouvoir (François Mitterrand est alors président) durant toute cette affaire. Un uppercut et des comédiens au top !  Avec Sayyid El Alami, Hiam Habbass, Kad Merad, Laurent Stocker, Mouna Soualem, Tewfik Jallab et Thierry Godard, l’épatant Gilou d’Engrenages, qu’on a jamais tant détesté.

 

8 – INSIDE MAN (Netflix)

Une série de malencontreux hasards peut transformer n’importe quel individu en assassin. C’est le postulat de départ de cette mini-série imaginée par Steven Moffat, le créateur de Sherlock et Doctor Who et réalisée par Paul McGuigan (Slevin). On y assiste à la descente aux enfers d’un adorable pasteur (David Tennant) tandis que de l’autre côté de l’Atlantique, un détenu en attente de son exécution (Stanley Tucci) emploie le temps qui lui reste à résoudre des énigmes insolubles. Forcément, les deux intrigues vont s’entremêler. C’est hilarant, horrible, absurde, bref, très anglais.

 

9 – THE OFFER (Paramount+)

Le tournage du Parrain ne fut pas un chemin de roses. La mafia et un certain Frank Sinatra ont tout fait pour contrecarrer le projet. Adaptée des mémoires du producteur Albert S. Ruddy, cette mini-série drôle et flamboyante de Leslie Greif et Michael Tolkin (scénariste de The Player) propulse dans le Hollywood du début des années 70 et fait revivre les légendes, comme le directeur de production Robert Evans, Marlon Brando, l’auteur Mario Puzo ou Sinatra. La distribution est aux petits oignons : Miles Teller, Matthew Goode, Colin Hanks, Dan Fogler, Giovanni Ribisi, Burn Gorman, Nora Arnezeder, sans oublier la formidable Juno Temple. Un régal pour les cinéphiles !

 

10 – THIS ENGLAND (Canal+)

Ce n’est certes pas la série feel-good de l’année, et c’est même probablement le show dont le visionnage se révèle le plus éprouvant. En revanche, elle revêt un intérêt historique indéniable et une pertinence bienvenue. Ce portrait acide de Boris Johnson, campé par un Kenneth Branagh bluffant, ne fait pas dans la dentelle. Lui et son gouvernement sont constamment tournés en ridicule, et ce serait drôle si le mandat de BoJo ne correspondait pas à l’arrivée de la pandémie de Covid, qu’il a gérée de manière catastrophique. Cette mini-série coécrite par Kieron Quirke et Michael Winterbotton (The Road To Guantanamo)  a des accents de faux-documentaire, taillé pour marquer les consciences. Les nombreuses séquences dans les hôpitaux et les maisons de retraite, où les malades et les soignants sont confrontés à la mort dans des conditions scandaleuses, sont redoutables de réalisme. Elles sont un contrepoint nécessaires à la légèreté avec laquelle l’artisan du Brexit a abordé les problèmes. Glaçant !

 

TOP 10 PERFORMANCES

Voici celles et ceux qui ont particulièrement brillé en 2022 (l’ordre n’a pas d’importance sauf pour Austin Butler qui dame le pion à tout le monde).

1 – Austin Butler dans Elvis

La performance de l’année !

 

2 – Noémie Merlant dans L’innocent

La belle actrice française révèle ici un tempérament comique insoupçonné. Elle est très très drôle.

 

3 – Niels Arestrup dans la mini-série Les papillons noirs

Le talent d’acteur à l’état pur. Ce n’est pas nouveau, mais c’est toujours bluffant. Une leçon.

 

4 – Kim Tae-ri dans le K-drama Twenty Five Twenty One

L’actrice sud-coréenne avait déjà brillé dans Mademoiselle de Park Chan-wook et dans la série Mr Sunshine. Aux dernières nouvelles, elle est donc toujours aussi géniale.

 

5 – Louise Coldefy dans Mon héroïne

Aux côtés de Chloé Jouannet et de la toujours impeccable Pascale Arbillot, Louise Coldefy fait montre d’un tempérament de feu. Elle est tout bonnement irrésistible dans cette sympathique comédie, premier film de Noémie Lefort, qui se distingue aussi par la musique du duo français Pur-Sang, dont la reprise de « I Was Made For Lovin You » immortalisée par Kiss, est magnifique.

 

6 – Jake Gyllenhaal dans Ambulance

Le blockbuster échevelé de Michael Bay permet à l’acteur américain de jouer un rôle de psychopathe inattendu, qui rappelle le fou furieux campé par Nicolas Cage dans Face-Off de John Woo. Un personnage borderline jusqu’à en être comique, et un Gyllenhaal très à l’aise dans ce festival d’explosions et de cadrages hallucinants. Pour la finesse, on repassera, mais pour le spectacle, c’est tout bon.

 

7 – Jade Springer dans Petite Solange

À l’instar d’Eléonore Klarwein dans Diabolo Menthe et de Jean-Pierre Léaud dans Les 400 coups, son petit minois grave hante ce film très délicat, qu’elle porte sur les épaules. Elle a tout d’une grande.

 

8 – Adèle Exarchopoulos dans Rien à foutre

Quasi omniprésente devant la caméra d’Emmanuel Marre et Julie Lecoustre, Adèle Exarchopoulos exprime le désarroi d’une jeunesse paumée, sans idéaux. Elle est aussi juste que touchante.

 

9 – David Tennant et Stanley Tucci dans la mini-série Inside Man

Impossible de les départager. Dans des registres très différents, les deux comédiens donnent chacun une véritable leçon de jeu. L’un pince-sans-rire, l’autre volubile, et tous deux excellents.

 

10 – Clara Rosager dans Devils, saison 2

Qui a suivi la série a forcément remarqué cette jeune actrice danoise. Elle y campe la surdouée polonaise Nadya, que le filou Dominic Morgan (Patrick Dempsey) va prendre sous son aile. Un personnage étrange et attachant qu’elle joue à la perfection. Une révélation.

 

CERISE SUR LE GÂTEAU

Jennifer Connelly dans Top Gun : Maverick

La sublimissime actrice s’est glissée dans la peau d’un personnage aussi fantasmatique qu’improbable, mais est elle pardonnée.

 

BONNE ANNÉE À TOUS MES LECTEURS !

 

 

WISHLIST NOËL 2022

Douze cadeaux à s’offrir entre cinéphiles (l’ordre n’a pas d’importance).

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1 – Le plus hollywoodien

LA COMTESSE AUX PIEDS NUS (The Barefoot Contessa)
Joseph L. Mankiewicz
Coffret Ultra Collector n°24 (Blu-ray+DVD+Livre)
Carlotta Films
Publié le 22 novembre 2022 – 53 €

Après Pandora, c’est à un autre chef-d’œuvre magnifié par Ava Gardner que Carlotta Films a choisi de rendre hommage. Via le destin d’une Cendrillon moderne, Mankiewicz brossait en 1954 un portrait acerbe d’Hollywood et du star-system. Double du cinéaste et ange gardien de l’héroïne, Humphrey Bogart trouvait dans La comtesse aux pieds nus l’un de ses plus beaux rôles. Le film est enrichi d’un documentaire sur le réalisateur troussé par Jean Douchet en 1981 (53 minutes) et d’un entretien inédit avec le journaliste Samuel Blumenfeld (29 minutes). Enfin, cette sublime édition, dont le visuel exclusif est signé Anne Benjamin, illustratrice et designer américaine, propose un livre de 160 pages agrémenté de photos d’archives. Intitulé Mankiewicz contre Cendrillon, cet ouvrage collectif inédit réalisé en association avec la revue Revus & Corrigés explore de nombreux aspects du film, de sa genèse à sa réception.

Le film est également disponible en éditions simples.

 

2 et 3 – Les plus émouvants

SI NOUS AVIONS SU QUE NOUS L’AIMIONS TANT, NOUS L’AURIONS AIMÉ DAVANTAGE
Thierry Frémaux
Éditions Grasset
Publié en octobre 2022 – 19 €

« Si quelqu’un pouvait prétendre au titre de “Grand Cinéphile Mondial”, c’était lui. »

Les amoureux de cinéma et de westerns, dont je suis, n’ont pas fini de pleurer Bertrand Tavernier. Si son talent de cinéaste n’a pas toujours fait l’unanimité (comme le rappelle, pas langue de bois, Thierry Frémaux), celui de passeur est indéniable. « Tout le monde se souviendra de quelqu’un qui avait tout vu, tout entendu, tout lu. De sa curiosité brandie comme l’un des beaux-arts » écrit l’auteur qui se remémore les années passées aux côtés de son mentor, lyonnais comme lui. Dans cet éloge revendiqué, le directeur de l’Institut Lumière et délégué général du festival de Cannes rend hommage à cette figure terriblement attachante, réalisateur, au passage, du merveilleux Un dimanche à la campagne, et parvient joliment, si besoin était, à le faire aimer davantage.

  

BERTRAND TAVERNIER : LE CINÉMA ET RIEN D’AUTRE

Laurent Delmas
Éditions Gallimard
Publié en novembre 2022 – 29,90 €

Complémentaire du livre de Thierry Frémaux, voici une « formidable » (adjectif favori de Tavernier) exploration de la filmographie du metteur en scène de La vie et rien d’autre menée par le journaliste, critique et chroniqueur de cinéma bien connu des auditeurs de France Inter. Pour prolonger la série documentaire Tavernier, le cinéma et rien d’autre, que la station avait consacré au réalisateur au cours de l’été 2022, Laurent Delmas a sollicité quinze « grands témoins » du travail du cinéaste (parmi lesquels Nathalie Baye, Thierry Frémaux, Isabelle Huppert, Raphaël Personnaz et Philippe Sarde). L’ouvrage, illustré, aborde les grands thèmes de l’univers de Tavernier, choix subjectif et totalement assumé par l’auteur. Il propose aussi une filmographie complète, une bibliographie et un index. En un mot : indispensable.

 

4 – Le plus hypnotique

MES FANTÔMES ET MOI
Gabriel Byrne
Sabine Wespieser – Éditeur
Traduit par Diane Meur
Publié le 8 septembre 2022 — 22 €

Si vous rêviez d’une autobiographie de star, avec révélations croustillantes à l’appui, passez votre chemin. L’acteur irlandais de Miller’s Crossing, Usual Suspects, Le cheval qui venait de la mer ou de la série En analyse évoque ici ses souvenirs comme bon lui semble, sautant d’anecdotes en anecdotes et parfois du coq à l’âne. De son enfance dans les faubourgs de Dublin au début des années 50, à la notoriété, il revient sur les faits marquants de son parcours, parle aussi de son addiction à l’alcool et de ses angoisses. Cette plongée dans l’intime se révèle un véritable roman, où l’autodérision le dispute à l’émotion, à l’image de son auteur humble et pudique. Car il n’est rien d’écrire que Gabriel Byrne est peu à l’aise avec la célébrité, celle que Richard Burton, lors d’une nuit d’ivresse à Venise, lui avait définie ainsi « C’est un doux poison qu’on boit d’abord à grandes goulées. Ensuite, on finit par l’avoir en horreur. » Un très bon cru.

 

5 – Le plus monumental

PEAKY BLINDERS Coffret l’intégrale en Blu-ray – Edition spéciale Fnac
Arte Éditions
Paru le 6 décembre — 249,99 €

Peaky Blinders, c’est fini. Un long-métrage serait en préparation, mais en attendant, la série transcendée par Cillian Murphy a tiré sa révérence en 2022, après sa sixième saison, et restera comme l’une des plus marquantes de ces dix dernières années. Pour les aficionados argentés, la Fnac a mis les petits plats dans les grands. Cette édition Collector Limitée à 500 exemplaires et numérotée, présentée dans une caisse en bois sérigraphiée, réunit les six saisons (soit trente-six épisodes) sur douze Blu-ray, le livre officiel de la série, les trois vinyles (rouges) de la bande originale, et le carnet de voyage. Les moins fortunés peuvent néanmoins se tourner vers l’intégrale en Blu-ray ou DVD plus allégée (69,99 € pour le BR, 59,99 € pour la version DVD).

 

6 – Le plus critique

FRANÇOIS TRUFFAUT : LA LEÇON DE CINÉMA
Éditions Denoël
Publié le 3 novembre 2021 — 28 €

Il se passe toujours quelque chose du côté de chez François Truffaut. En 1981, le cinéaste répondait aux questions de Jean Collet, spécialiste de l’œuvre du réalisateur, et Jérôme Prieur, devant la caméra de José Maria Berzosa. Intitulée La leçon de cinéma, l’émission en deux épisodes (de 64 et 57 mn) sera diffusée en mai 1983 sur TF1, en plein festival de Cannes. Mais ce n’était qu’une partie des entretiens. Après un parcours semé d’embûches, Bernard Bastide a réussi à en réunir l’intégralité dans cet ouvrage. Il en résulte un livre passionnant, dans lequel François Truffaut revisite ses films avec franchise et émotion. Tout en donnant quelques secrets de fabrication, il fait son autocritique avec une intelligence qui force l’admiration.

7 – Le plus enchanteur

AU PAYS DES MERVEILLES – Trésors de l’animation japonaise
Nathalie Bittinger
Éditions Hoëbeke
Publié le 13 octobre 2022 – 30 €

Tout le cinéma d’animation japonais dans un même livre, c’est le défi que s’est lancé Nathalie Bittinger, maître de conférences en études cinématographiques à l’université de Strasbourg, auteure de plusieurs ouvrages sur le cinéma asiatique, dont un Dictionnaire du cinéma chinois. Du Tombeau des lucioles à Your Name en passant par Akira, Ghost In The Shell, Dragon Ball, One Piece ou Cow-boy Bebop, les chefs-d’œuvre et monuments du genre sont finement analysés. Un beau livre de 192 pages, richement illustré, à la fois pointu et très pédagogique.

 

8 – Le plus mythique

LES GRANDS ESPACES (The Big Country) Combo Blu-ray/DVD
William Wyler
Éditions Sidonis Calysta
Paru le 17/11/2022  – 19,99 €

J’ai toujours adoré ce film avec Gregory Peck, Charlton Heston, Jean Simmons, Caroll Baker, Burl Ives, Chuck Connors… Une distribution de légende pour un western atypique et spectaculaire. Wyler filme de main de maître la confrontation entre Peck, le gentleman stoïcien, et Heston, le cow-boy viril, tous deux épris de la même femme. Inoubliable aussi pour son thème musical composé par Jerome Moross, Les grands espaces profite ici d’une excellente copie tirée d’un master HD 4K. Côté bonus, Sidonis Calysta nous a gâté : on peut découvrir une présentation par Patrick Brion et Jean-François Giré, ainsi qu’un documentaire sur William Wyler (cinéaste, entre autres, de Ben Hur, Vacances Romaines, L’héritière, Les hauts de Hurlevent.), des interviews de Gregory Peck, Charlton Heston et même de Billy Wilder, qui évoque son lien amusant avec Wyler, un reportage sur le tournage et des documents de promo de l’époque. Byzance ! 

9 – Le plus mégalo

RIDLEY SCOTT : RÉTROSPECTIVE
Ian Nathan
Adaptation française : la « formidable » Isabelle Chelley
Éditions Gründ
Paru le 28 octobre 2021 – 34,95 €

De Duellistes au Dernier Duel, la filmographie de Ridley Scott est analysée par le critique et écrivain britannique Ian Nathan, ex-rédacteur en chef du magazine Empire, qui a plusieurs fois interviewé le cinéaste. Il dépeint les contradictions d’un artiste qui « a compris les règles du jeu », évoque le conflit entre l’art et le commerce, qui le taraude constamment, et revient sur ses quarante-cinq ans de productions éclectiques jalonnées de monuments (Alien, Blade Runner, Legend, Thelma et Louise, Gladiator, La chute du Faucon noir, American Gangster…) sans oublier ses incursions ailleurs, comme dans cette incroyable série Raised By Wolves dont on ne s’est pas encore remis.

 

10 – Le plus ironique

LES AVENTURES D’UN SCÉNARISTE À HOLLYWOOD
William Goldman
Traduction et choix de textes de Jean Rousselot
Éditions Capricci
Paru le 20 octobre 2022 – 23 €

Scénariste de sommets du cinéma américain tels que Butch Cassidy et le Kid, Les hommes du président, L’étoffe des héros, Marathon Man ou Princess Bride (les deux derniers sont adaptés de ses propres romans), William Goldman (1931-2018) avait publié aux États-Unis deux livres consacrés à son métier, parus respectivement en 1983 et 2000. Jean Rousselot a réuni ici les parties les plus intéressantes de ces ouvrages, qui se trouvent pour la première fois traduites en français. Goldman se remémore les films sur lesquels il a travaillé avec un sens de l’ironie réjouissant, livrant moult anecdotes, écornant l’image de certains réalisateurs ou comédiens et rendant hommage à d’autres, comme Laurence Olivier « le plus grand acteur du siècle ». Un régal !

 

11 – 12 – Les plus iconiques

 

ELVIS – Edition Collector Fnac Steelbook Blu-ray 4K Ultra HD
Baz Luhrmann
Warner Bros Entertainment
Paru le 26 octobre 2022 — 29,99 €

Le bijou signé Baz Luhrmann, meilleur film de 2022, est désormais disponible en DVD et Blu-ray. En attendant la version longue, que Baz Luhrmann serait en train de peaufiner, j’ai retenu cette édition insérée dans un coffret métal, qui propose de (redécouvrir) ce « formidable » biopic dans des conditions optimales, enrichi d’une poignée de featurettes. 

(critique du film ici)

COFFRET ELVIS TECHNICOLOR, Edition Collector limitée 45ème anniversaire – Exclusivité Fnac
GM Éditions
Paru le 25 octobre 2022 – 69,90 €

En cette fin d’année, les amoureux du King pourront également se procurer ce beau coffret comprenant un livre de 168 pages écrit par Jean-Marie Pouzenc, avec des fiches techniques de tous les films d’Elvis Presley. Il regroupe également huit de ses aventures cinématographiques en DVD et en version originale sous-titrée (Le rock du bagne, L’amour en 4ème vitesse, Blondes, Brunes et rousses…), un vinyle incluant huit de ses plus grands titres, une affiche du Elvis de Baz Luhrmann, et une lithographie numérotée exclusive réalisée par Mezzo.

 

Et joyeux Noël !