GASPARD À JAMAIS


Gaspard Ulliel dans le spot de Bleu de Chanel, réalisé en 2018 par Steve McQueen

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Gaspard Ulliel, qui vient de disparaître brutalement ce 19 janvier, à trente-sept ans, des suites d’un accident de ski en Savoie, était le beau gosse du cinéma français. Il avait eu beau tenter de faire oublier son physique de mannequin, qui avait fait de lui l’égérie du parfum Bleu de Chanel depuis 2010, il restera à jamais cet ange un peu triste, ce prince charmant au sourire ambigu qui faisait fantasmer les réalisateurs et pas que.

Né en 1984 à Boulogne-Billancourt d’une mère styliste et d’un père designer, Gaspard Ulliel décroche son premier rôle au cinéma en 2001, à dix-sept ans, dans Le pacte des loups, de Christophe Gans. Il obtient une nomination pour le César du Meilleur espoir masculin dès l’année suivante, pour sa prestation dans Embrassez qui vous voudrez, le film choral de Michel Blanc. Mais c’est en 2003 qu’il va crever l’écran, dans Les égarés, d’André Téchiné, qui lui vaut sa deuxième nomination aux César. Dès lors, le jeune premier dont la cicatrice sur la joue (une griffure de chien lorsqu’il était enfant) ne fait qu’accentuer le charme, sera courtisé par les réalisateurs de tous horizons. Toujours pourtant, il privilégiera le cinéma d’auteur (Jean-Pierre Jeunet, Bertrand Bonello, Emmanuel Mouret, Rithy Panh, Brigitte Roüan, Guillaume Nicloux, Benoît Jacquot, Xavier Dolan…). Jeune homme discret, humble, instinctif et toujours élégant, Gaspard Ulliel avait une voix douce, posée, et il émanait de sa personne une bienveillance certaine qui le rendait attachant. Il avait une prédilection pour les personnages intenses, sensibles, pétris de fêlures.

« Je suis un faux tranquille. J’ai cette sorte de sérénité et de calme apparents mais, au fond, il y a beaucoup d’angoisse, de doutes, d’insécurité et de peurs. En même temps, c’est très fertile. Dès qu’on touche à quelque chose d’artistique, on se doit de cultiver ça. » Gaspard Ulliel en 2018, sur RFM, pour la sortie des Confins du monde.

Cette quête d’expériences artistiques et émotionnelles lui vaudra ses plus beaux rôles — Saint Laurent, Les confins du monde, Juste la fin du monde… En 2021, il tournait aux côtés d’Oscar Isaac et Ethan Hawke dans la production Marvel, Moon Knight, une mini-série à paraître en mars 2022 sur Disney +. Ce jeune papa se préparait également à tourner avec Bertrand Bonello, et avec Xavier Giannoli, dans une série produite par Canal+. Sa mort absurde prive le cinéma français d’une de ses plus belles étoiles.

 

GASPARD ULLIEL EN DIX FILMS

 

SIBYL de Justine Triet (2019)

 

LES CONFINS DU MONDE de Guillaume Nicloux (2018)

 

JUSTE LA FIN DU MONDE de Xavier Dolan (2016)
*César du Meilleur acteur *

Critique

 

LA DANSEUSE de Stéphanie Di Giusto (2016)

 

SAINT LAURENT de Bertrand Bonello (2014)

 

LA PRINCESSE DE MONTPENSIER de Bertrand Tavernier (2010)
Critique

 

HANNIBAL LECTER – LES ORIGINES DU MAL (Hannibal Rising) (2007)
Critique

 

JACQUOU LE CROQUANT de Laurent Boutonnat (2007)
Critique

 

UN LONG DIMANCHE DE FIANÇAILLES de Jean-Pierre Jeunet (2004)
* César du Meilleur espoir masculin *

Critique

 

LES ÉGARÉS de André Téchiné (2003)
Critique

*

 

LA PRINCESSE DE MONTPENSIER

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Bertrand Tavernier
2010

En 1567, dans une France divisée par les conflits entre Catholiques et Protestants, la jeune et fortunée Marie de Mézières (Mélanie Thierry) est contrainte d’épouser le jeune et austère Philippe de Montpensier (Grégoire Leprince-Ringuet), alors qu’elle aime son cousin, Henri de Guise (Gaspard Ulliel), qui l’aime en retour. La princesse tente de faire contre mauvaise fortune bon cœur et de rester vertueuse, mais sa beauté attise les passions. D’Henri de Guise, au puissant Duc D’Anjou (Raphaël Personnaz), en passant par le Comte de Chavannes (Lambert Wilson), son précepteur, tous la tourmentent sans relâche, au grand désespoir de son mari, fou amoureux d’elle, mais incapable d’exprimer ses sentiments…

Séduit par l’adaptation de la nouvelle de Madame de Lafayette (parue en 1662, seize ans avant le fameux roman La Princesse de Clèves) écrite par François-Olivier Rousseau, Bertrand Tavernier s’est attelé avec enthousiasme à la reconstitution de ce XVIe siècle pétri de violence, de préciosité et de passions. Manquant un peu de souffle épique, mais ne versant jamais dans l’académisme, sa Princesse de Montpensier est un bal de destins contrariés. Les jeunes gens bien nés, en proie à des maelströms d’émotions, passent des champs de bataille aux salons avec la même fougue. Interprété par la jeune garde du cinéma français, le film, très documenté, dépeint méticuleusement les mœurs de l’époque, mais reste moderne et lumineux, grâce au jeu enlevé des acteurs. Si Mélanie Thierry, un peu anachronique, n’est pas toujours convaincante, ses partenaires masculins sont épatants, en particulier Raphaël Personnaz, une révélation ! A l’instar de Grégoire Leprince-Ringuet (chargé du rôle le plus ingrat), le jeune comédien a été salué par une nomination au César 2011 du Meilleur espoir masculin pour sa performance (très glam rock). Le film a remporté le César des Meilleurs costumes (signés Caroline de Vivaise).
2h 19 Et avec Michel Vuillermoz, Florence Thomassin, Judith Chemla, Philippe Magnan.

Chronique rédigée pour Fnac.com en 2011

HANNIBAL LECTER – LES ORIGINES DU MAL (Hannibal Rising)

 

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Peter Webber
2007

Dans son château familial en Lituanie, le jeune Hannibal Lecter coule des jours heureux après de parents aimants et de sa petite sœur adorée. Mais la guerre est proche. Un jour de 1944, les soldats nazis envahissent le village. Le destin d’Hannibal va basculer…

On pensait la saga de Thomas Harris achevée, après Dragon rouge, Le silence des agneauxet Hannibal (tous portés à l’écran), mais en 2006, répondant à la curiosité de ses fans et à une sollicitation du producteur Dino De Laurentiis, l’écrivain américain est finalement revenu sur les origines de son monstrueux personnage, désormais mythique. Parallèlement au roman, Thomas Harris écrit le scénario, qu’il remaniera à plusieurs reprises pour satisfaire les exigences de la superproduction internationale chapeautée par De Laurentiis et dirigée par l’Anglais Peter Webber, réalisateur en 2003 du remarquable La jeune fille à la perle. Si la délicatesse et les qualités artistiques du cinéaste font souvent merveille dans le film, elles atténuent aussi le caractère insoutenable des épreuves traversées par le jeune Hannibal. Ce conte de fées pour adultes tourne à l’histoire de vengeance classique, au thriller horrifique sensuel et élégant, et livre une résolution un peu trop caricaturale du cas Hannibal Lecter, le plus célèbre des psychopathes cannibales. Convaincant en jeune prédateur assoiffé de vengeance (moins pour le maniement de la langue anglaise), le frenchy Gaspard Ulliel fait un serial killer séduisant en diable et rappelle par fulgurances son illustre prédécesseur Anthony Hopkins, forcément irremplaçable.
2 h 01 Et avec Rhys Ifans, Gong Li, Kevin McKidd, Richard Brake…

Chronique rédigée pour Fnac.com en 2008