LES COMBATTANTS en DVD

Aussi efficace qu’audacieux, le film initiatique réalisé par Thomas Cailley en 2014 a décroché trois César mérités le 20 février dernier – Meilleur premier film, Meilleure actrice (pour Adèle Haenel) et Meilleur espoir masculin (pour Kévin Azaïs). Il est paru en DVD et Blu-ray début 2015. Déjà culte !

Les combattants

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Thomas Cailley
20 août 2014 (en Blu-ray et DVD chez francetvdistribution depuis le 7 janvier 2015)
Récompensé à la Quinzaine des réalisateurs 2014 par les Prix Label Europa Cinémas, Art Cinema Award et SACD

Dans le sud-ouest de la France… Alors qu’Arnaud (Kévin Azaïs) s’apprête à passer un été tranquille, entre l’entreprise familiale et ses deux meilleurs copains, il rencontre Madeleine (Adèle Haenel), un garçon manqué. Elle projette d’entrer dans les commandos pour, dit-elle, « se préparer au pire ». Fasciné par cette fille étrange, brusque et déterminée, le doux Arnaud décide de la suivre dans le stage de formation gratuit proposé par l’armée de Terre…

Tout comme Delphine et Muriel Coulin en 2011 avec leur 17 filles, dans lequel dix-sept adolescentes décidaient d’être enceintes en même temps, pour tromper leur ennui, trouver leur place dans la société et se réinventer une vie ensemble, Thomas Cailley brosse dans Les combattants un portrait inattendu et attachant de la jeunesse d’aujourd’hui, loin des clichés et des caricatures. Arnaud est un jeune homme gentil, rêveur, un peu apathique, sans idéal et qui ne sait pas très bien ce qu’il veut (peut-on véritablement l’en blâmer ?). Madeleine, au contraire, est déterminée. Diplômée d’un master de macroéconomie, elle se prépare à une apocalypse, imminente selon elle. Obsédée par la survie et ses techniques, elle ne jure que par l’armée et ses méthodes « à la dure ». Totalement en décalage, les deux jeunes gens feraient un couple improbable. Mais Arnaud s’accroche, au point d’accompagner la jeune fille dans une démarche à laquelle il n’adhère même pas, et de bouleverser sa vie. Entre comédie romantique et film initiatique, Les combattants trouve son équilibre et un ton très personnel, tendre, mélancolique, poétique et souvent très drôle (toutes les scènes du stage d’entraînement militaire sont hilarantes). On est séduit par l’incongruité du personnage incarné par Adèle Haenel, son nihilisme, son air en permanence buté, autant que par la douceur de ce jeune homme emprunté que Madeleine malmène sans cesse et qui, pour elle, sera prêt à soulever des montagnes. Thomas Cailley, remarqué par ses courts-métrages, réussit ici un splendide coup d’essai. On pourra lui reprocher de rester un peu trop à la surface des choses en privilégiant les petits effets comiques, et les facilités qu’il s’accorde dans la dernière partie. Mais cette volonté de conserver coûte que coûte une certaine légèreté (la musique electro du groupe français Hit’n Run en témoigne) est salutaire. La jeunesse a ce privilège de pouvoir dire ou faire des choses insensées avant de les balayer d’un revers de main ou d’un éclat de rire. Certes, la fin du monde est pour demain, mais tout cela n’est pas si grave.

BANDE-ANNONCE

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Test DVD :

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Interactivité **
Curieusement, le DVD de ce film remarqué et remarquable brille par son absence de suppléments : pas de commentaire audio, d’interviews ou de making of donc. Est toutefois proposé le court-métrage de Thomas Cailley réalisé en 2011, l’irrésistible Paris-Shanghai (24 minutes) primé dans plusieurs festivals. Le programme comprend également la bande-annonce et un clip ultracourt sur la présentation des Combattants à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, où il a raflé tous les prix.

Image **
Format : 1.85
La magnifique photo du chef opérateur David Cailley, frère du cinéaste, n’a pas le piqué qu’elle devrait sur ce support, mais hormis quelques défaillances, l’ensemble est honorable.

Son ***
DD 5.1 en français
Sous-titres français pour sourds et malentendants
Sans être d’une ampleur phénoménale, le DD 5.1 assure le nécessaire, et sert aussi bien les dialogues que la musique, plutôt bien mise en avant.

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HIPPOCRATE

Sept nominations aux César, dont celle du Meilleur film, ont été récoltées par l’épatante comédie humaine de Thomas Lilti, qui a fait l’unanimité à sa sortie en septembre 2014 et remporté le Valois d’or au Festival du film francophone d’Angoulême. A la fois récit initiatique et chronique sociale, Hippocrate immerge dans le quotidien d’un hôpital parisien, avec ses dysfonctionnements, ses tensions et ses moments d’euphorie, et où des hommes et des femmes de bonne volonté sont souvent confrontés à des situations extrêmes. Séance de rattrapage avec le Blu-ray.

Hippocrate

Benjamin : « Tu sais je crois que je vais arrêter. Franchement, je ne suis pas fait pour ce métier, ce n’est pas possible…
Abdel : C’est pas un métier, médecin…
Benjamin : Ben c’est quoi ?
Abdel : Je ne sais pas… une espèce de malédiction… »

 

Hippocrate  

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Thomas Lilti
2014 (en DVD et Blu-ray chez Francetvdistribution depuis le 7 janvier 2015)

Benjamin (Vincent Lacoste), jeune interne en médecine, doit effectuer son premier stage professionnel à l’hôpital public dans le service de médecine générale dirigé par son père, le professeur Barois (Jacques Gamblin). Si l’ambiance est plutôt conviviale, le jeune homme constate très vite que faute de matériel et de personnel, les équipes sont contraintes de jongler pour faire face aux besoins des malades, et d’endosser des responsabilités énormes. Dépassé par la réalité du terrain, il va s’appuyer sur Abdel (Reda Kateb) un médecin algérien en stage dans le service, mais dont les initiatives ne font pas l’unanimité…

Oubliez les séries américaines Urgences, Grey’s Anatomy ou Dr House ! Moins glamour, Hippocrate dépeint les coulisses d’un hôpital public français, en proie au manque de ressources, humaines et financières. Mais si l’argent est en cause, le système, qualifié de féodal par l’écrivain-médecin Martin Winckler (La maladie de Sachs), l’est aussi. Le film démontre que seul l’avis du médecin hospitalier universitaire prévaut, et que celui du patient, principal intéressé, est parfois purement ignoré. D’où les innombrables tensions entre le personnel soignant qui œuvre sur le terrain et connaît les malades, et sa hiérarchie. Le réalisateur Thomas Lilti, qui signe ici son deuxième long-métrage (après le sombre Les yeux bandés en 2008), a imaginé le film alors qu’il était étudiant en médecine (il exerce encore aujourd’hui). Le personnage de Benjamin, jeune interne ambitieux, écœuré par les absurdités du système qu’il voulait intégrer, est inspiré de sa propre expérience. Ici le directeur de l’hôpital est un ancien d’Amazon : « Il vendait des DVD, maintenant, il veut nous apprendre à gérer un hôpital… ». Le cinéaste filme juste, et si cette chronique, d’un réalisme saisissant, flirte avec le documentaire, son ton, à la fois grinçant, drôle et mélancolique, en fait une œuvre d’art à part entière. Mention spéciale à Reda Kateb (le terroriste qui se faisait torturer au début de Zero Dark Thirty, c’était lui), attachant, qui dame allègrement le pion au pubère Vincent Lacoste. Sa prestation, chaleureuse et émouvante, lui a valu une nomination méritée pour le César du Meilleur second rôle masculin. On croise les doigts.
Et avec Marianne Denicourt, Félix Moati, Carole Franck, Philippe Rebbot…

BANDE-ANNONCE

Test Blu-ray :

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Interactivité **
Le réalisateur évoque ses ambitions au cours du making of de 16 minutes, qui emmène sur le vif du tournage. Pour renforcer le réalisme des manipulations médicales, certains membres du personnel soignant sont interprétés par de véritables infirmiers. On peut entendre ensuite des témoignages de personnages du film confrontés à des situations humaines déchirantes dans le cadre de leur fonction (4 minutes).

Image ****
Format : 2.40
Une image lumineuse et contrastée. Le piqué reste excellent même dans les séquences nocturnes, où les noirs sont profonds.

Son ****
DTS-HD Master Audio 5.1 en français
Sous-titres français pour sourds et malentendants
Audiodescription
Une piste idéale, qui met en valeur la partition electro pop du groupe français Low Entertainment.

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UN HOMME TRÈS RECHERCHÉ

Hanté par la présence magnifique de Philip Seymour Hoffman, disparu quelques mois après le tournage, ce film d’espionnage adapté d’un best-seller de John le Carré dénonce l’hypocrisie et les dérives de l’obsession sécuritaire dans la lutte antiterroriste post 11 septembre. Découvert en septembre 2014 au festival du film américain de Deauville, il paraît aujourd’hui en DVD et Blu-ray.

A Most Wanted Man

Günther Bachmann : Et tous ces ravages qu’on laisse derrière nous… Toutes ces vies, ces pièces vides… Ça aura servi à quoi ? Vous vous posez cette question ? A quoi ça sert ?
Martha Sullivan : Parfois. Mais la réponse est toujours la même.
Günther Bachmann : Et quelle est-elle ?
Martha Sullivan : A rendre le monde plus sûr. Ça suffit non ?

 

Un homme très recherché (A Most Wanted Man)  

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Anton Corbijn
2014 (en Blu-ray et DVD chez TF1 vidéo depuis le 21 janvier 2015)

Dix ans après le 11 septembre 2001, Hambourg reste traumatisée d’avoir hébergé trois des pirates de l’air ayant participé aux attentats, et est surveillée comme le lait sur le feu par les services secrets germaniques et américains. Lorsque le jeune Issa Karpov (Grigoriy Dobrygin), moitié russe, moitié tchétchène, débarque dans la ville allemande, il est aussitôt repéré par l’unité antiterroriste locale dirigée par Günther Bachmann (Philip Seymour Hoffman). Le jeune et mystérieux clandestin, qui porte la barbe islamique, cherche à contacter un banquier (Willem Dafoe), avec l’aide d’une jeune avocate spécialisée dans les droits de l’homme (Rachel McAdams). Est-il, comme il le prétend, un simple demandeur de droit d’asile, ou un djihadiste manipulé par un groupe terroriste ? C’est ce que va devoir déterminer Günther Bachmann, tout en esquivant la surveillance de la CIA, qui n’opère pas avec la même circonspection…

Philip Seymour Hoffman, décédé d’une overdose le 2 février 2014, aurait sans doute été heureux qu’on se souvienne de lui à travers ce personnage d’espion humaniste et désenchanté, son dernier grand rôle, qui s’ajoute à la liste de ses performances. L’acteur américain est en effet impressionnant dans cette adaptation du roman de John le Carré édité en 2008, qu’il porte véritablement sur les épaules. Günther Bachmann boit trop, fume trop, ne dort pas assez. Cet espion usé par le métier, hanté par des échecs, refuse cependant de sombrer dans des dérives sécuritaires, où la morale, la déontologie, la compassion n’ont plus cours. C’est cet humanisme, palpable dans le roman de l’écrivain anglais, ex-espion lui-même, qui a séduit Anton Corbijn, photographe réputé et réalisateur du remarquable Control. Comme dans le récent La taupe, adapté du même John le Carré, ce film d’espionnage international joue la carte du réalisme, de l’anti-spectaculaire. Ici, les espions sont planqués, observent constamment des écrans de surveillance, échafaudent en secret des plans tandis qu’ils jouent au chat et à la souris avec leurs homologues étrangers et leur propre gouvernement. Ce n’est pas moins palpitant. Chaque parole, chaque regard, chaque détail est porteur de sens. Malgré leur jeu tout en retenue, les acteurs étincellent. Willem Dafoe campe un banquier pas si véreux, Rachel McAdams une avocate idéaliste, pure et aguerrie, Robin Wright, une agent de la CIA ambiguë, tandis que le jeune Grigoriy Dobrygin (star en Russie) est parfait en réfugié mutique. La ville cosmopolite de Hambourg, à l’architecture riche et éclectique, magnifiquement photographiée par le Français Benoît Delhomme, fait un théâtre idéal pour ces jeux de dupes et cette rencontre de solitudes. Chacun trahit quelqu’un, est trahi par quelqu’un. Il émane de ce film d’espionnage crépusculaire une mélancolie aussi romanesque que ses personnages. Le rebondissement final, glaçant, fait l’effet d’une gifle.
Et avec Nina Hoss, Daniel Brühl, Mehdi Dehbi, Kostja Ullmann…

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BANDE-ANNONCE

Test DVD :

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Interactivité**
On se félicite de la présence d’une interview de John le Carré (9 minutes), qui évoque sa passion pour Hambourg dont il fut consul britannique, et se remémore l’écriture du roman pour lequel il s’est documenté auprès de Fluchtpunkt, l’organisation d’aide juridique aux réfugiés et immigrants de Hambourg qui a inspiré le personnage de l’avocate campée par Rachel McAdams. Il se montre aussi très critique envers l’obsession sécuritaire démesurée des pays occidentaux depuis le 11 septembre (« Comment se protéger sans s’autodétruire ? »). Un making of de 15 minutes permet d’entendre les impressions du réalisateur et des acteurs, dont le regretté Philip Seymour Hoffman, qui confie avoir reçu ce rôle d’espion comme un cadeau.

Image****
Format : 2.40
Comme on pouvait s’y attendre avec un tel cinéaste, l’image présentée ici est d’une pureté exceptionnelle, et rend hommage au travail du chef opérateur français.

Son****
DD 5.1 et 2.0 en anglais sous-titré français
DD 5.1 et 2.0 en français
Sous-titres français imposés
Sous-titres pour sourds et malentendants
Une piste DD 5.1 très équilibrée et enveloppante, faisant la part belle aux montées de tension. La version originale est à privilégier.

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