TARZAN

Après Johnny Weissmuller, Miles O’Keeffe, Casper Van Dien et Christophe Lambert, c’est au tour d’Alexander Skarsgard d’incarner le légendaire homme-singe au cinéma. Le beau vampire viking de True blood prête ses presque deux mètres et sa stature athlétique à ce personnage casse-gueule, qu’il interprète avec son élégance et sa retenue coutumières, tout en regards mélancoliques et sourires en coin. Sauvage oui, ridicule, jamais. Le réalisateur anglais David Yates a soigné les aspects historiques pour mieux fustiger le colonialisme et mettre l’Afrique au cœur du récit. La simplicité du message fait parfois sourire, mais elle ne détone pas dans ce film spectaculaire, qui en dépit de ses effets spéciaux numériques, parvient à renouer avec le cinéma d’aventures d’antan. Si Christoph Waltz ne surprend pas en méchant retors et sadique, Margot Robbie fait une Jane au tempérament volcanique plutôt inattendue.

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“Le port altier de sa belle tête sur ses larges épaules, l’éclair de vie et d’intelligence qui animait ses yeux clairs le faisaient ressembler à un demi-dieu venu d’un ancien peuple guerrier de cette forêt.” Tarzan, seigneur de la jungle Edgar Rice Burroughs

  

Tarzan (The Legend Of Tarzan)

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David Yates
2016 (Dans les salles françaises depuis le 6 juillet)

A la fin du 19ème siècle… Dix ans après avoir quitté la jungle, Tarzan (Alexander Skarsgard) est devenu le respectable Jack Clayton, Lord Greystoke. Il mène une existence paisible dans le manoir de ces ancêtres, non loin de Londres, avec Jane (Margot Robbie), qu’il a épousée. Lorsque le roi belge Léopold II, colonisateur du Congo, l’invite à revenir sur ses terres natales pour une mission diplomatique, Tarzan s’apprête à refuser, mais George Washington Williams (Samuel L. Jackson), un émissaire américain qui suspecte des exactions commises par les Belges sur les autochtones, l’encourage à s’y rendre. Jane, qui se languit de l’Afrique où elle a grandi, supplie son époux de l’emmener. Ils ignorent qu’ils se précipitent droit dans un piège…

De la cinquantaine d’adaptations cinématographiques de l’œuvre d’Edgar Rice Burroughs, peu sont restées dans les mémoires. Si on conserve une tendresse particulière pour Johnny Weissmuller, créateur du personnage en 1932 (qu’il interprétera dans douze films !), c’est Greystoke, réalisé en 1984 par Hugh Hudson, qui s’impose toujours comme le plus beau portrait de cet homme déchiré entre deux identités et deux mondes (sublime scène dans laquelle Tarzan adolescent scrute son visage dans une glace en tenant un cube dont une face est illustrée par le dessin d’un singe, et l’autre celui d’un enfant). Trente-deux ans après ce drame romantique et existentiel poignant, qui reste aussi le plus beau rôle de Christophe Lambert, on peut se demander quelle mouche a piqué Hollywood, tant, comparée à celles des superhéros Marvel et DC Comics qui fleurissent sur les écrans, l’histoire de Tarzan apparaît désuète. Un côté démodé, anachronique, qui lui confère aussi beaucoup de charme. C’est visiblement ce qui a motivé David Yates, qui s’est vu confier la mise en scène après les défections de Guillermo Del Toro et Stephen Sommers. Le cinéaste anglais n’a pas dépoussiéré l’œuvre d’Edgar Burroughs de manière radicale, et a fait du scénario original d’Adam Cozad et Craig Brewer un film d’aventures à l’ancienne. Subtil et rompu à l’exercice de l’adaptation littéraire, Yates, réalisateur des quatre derniers épisodes de la saga Harry Potter et du récent Les animaux fantastiques (toujours d’après J. K. Rowling), s’est efforcé de replacer l’action dans son contexte historique. Ainsi, George Washington Williams et Léon Rom sont librement inspirés de personnages réels (le sinistre et sanguinaire Léon Rom, militaire et aventurier belge, serait l’une des sinistres figures à l’origine du colonel Kurtz imaginé par Joseph Conrad dans son roman Au cœur des ténèbres). Le film a le mérite de renouveler la mythologie tout en lui rendant hommage, à grand renfort de flash-backs. Le Tarzan que l’on découvre au début du film est un homme civilisé et sage, qui a choisi de prendre la relève de son aristocrate de son père disparu (la reconstitution du Londres de la fin de l’époque victorienne est magnifique). La beauté ténébreuse d’Alexander Skarsgard sied parfaitement au personnage. C’est de Jane, alias Margot Robbie (révélée par Le Loup de Wall Street), que vient la surprise. Bien plus qu’un faire-valoir du héros, la jeune Anglaise, qui a grandi en Afrique auprès d’un père missionnaire, est une femme moderne, humaniste et cultivée, qui sait en découdre avec ses adversaires. Visuellement, Tarzan décoiffe et transporte dès la première scène. Il a beau avoir été tourné en studio, en Angleterre, le dépaysement est total. Les mauvais coucheurs railleront les singes créés par ordinateurs (ceux du film de Hudson étaient joués par des comédiens déguisés, et, en tout état de cause, l’espèce des singes mangani évoquée dans l’œuvre de Burroughs est inconnue de la science). Le film ne restera probablement pas dans les annales, mais ce spectacle familial au charme rétro est éminemment sympathique. Nulle raison de le bouder donc.
1h 50 Et avec Djimon Hounsou, Osy Ikhile, Mens-Sana Tamakloe, Antony Acheampong, Casper Crump, Ben Chaplin…

BANDE-ANNONCE

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Singes
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Prisonnière
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THE EAST/HIJACKING

Les faits divers regorgent de bonnes histoires et les faits de société font parfois de bons films. Parce qu’ils parlent du monde actuel avec singularité et intelligence, The East et Hijacking, deux thrillers indépendants parus en vidéo fin 2013 en sont la parfaite illustration.

680x478« Lie to us, we’ll lie to you
Spy on us, we’ll spy on you
Poison us, we’ll poison you »

 

The East
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Zal Batmanglij
2013 (Blu-ray Fox Pathé Europa)
Etats-Unis

Ex agent du FBI, Sarah Moss (Brit Marling) travaille désormais pour une société de renseignement privée qui protège les secrets de puissants lobbys. La jeune femme est choisie pour mener une mission délicate : infiltrer The East, un groupuscule éco-terroriste qui s’attaque aux multinationales aux agissements criminels. Grâce à sa détermination et son endurance, Sarah parvient à déjouer la méfiance des membres du groupe d’activistes mené par le charismatique Benji (Alexander Skarsgard) et à l’intégrer. Au point de se sentir bientôt écartelée entre sa mission et la leur…

Depuis Another Earth, en 2011, on est systématiquement interpellé par la présence de Brit Marling dans un générique. Cette jeune américaine originaire de Chicago, au physique et prénom nordiques (qu’elle tient d’une arrière-grand-mère norvégienne) est une véritable surdouée et une actrice impliquée. Avec son ami Mike Cahill (metteur en scène de Another Earth dont elle a cosigné le scénario), elle a réalisé en 2004 le documentaire remarqué Boxers and Ballerinas. Et après avoir coécrit avec l’Américain Zal Batmanglij le scénario de Sound Of My Voice, elle signe avec lui celui de ce film à mi-chemin entre fable sociale et thriller d’espionnage, empreint d’un romantisme manifeste. The East, dont le titre fait référence au Magicien d’Oz (la sorcière de l’Est), confronte nature et urbanisme et pointe du doigt les dérives de la surconsommation. Coproduit, entre autres, par Ridley et Tony Scott, il est né de l’expérience des deux jeunes auteurs, frustrés face au consumérisme d’une société qui préfère fermer les yeux sur le gaspillage, la pollution et la destruction de la planète. Zal Batmanglij et Brit Marling sont en effet partis sac à dos durant des mois en 2009 à la rencontre d’anarchistes, de déchétariens et de groupes d’activistes. Les membres de The East font cependant davantage qu’explorer des modes de vie alternatifs et remettre en question les acquis : ils agissent pour tenter de changer les choses, à la manière de l’organisation écologiste Sea Shepherd (on imagine cependant mal Paul Watson adhérer aux rites hippies des membres de The East). Sans sensationnalisme, le film s’intéresse autant aux actions du groupe qu’à l’impact de cet engagement sur ses membres qui vivent à l’écart du monde civilisé, ainsi qu’à l’éveil de Sarah dont les certitudes vacillent peu à peu. L’étrangeté de Brit Marling, la musique envoûtante de Harry Gregson-Williams (à noter que Rostam Batmanglij, du groupe Vampire Weekend et frère du réalisateur, a signé l’un des thèmes) et la photo inspirée signée du Russe Roman Vasyanov concourent à la singularité de ce thriller poétique et très actuel, pas tout à fait abouti, mais séduisant.
Et avec Ellen Page, Patricia Clarkson, Shiloh Fernandez, Toby Kebbell, Julia Ormond

BANDE-ANNONCE

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Test Blu-ray :

Interactivité **
Un making of promotionnel divisé en plusieurs chapitres de moins de 5 minutes chacun, permet d’en savoir plus sur les ambitions des auteurs. On y découvre aussi comment le cinéaste et son frère musicien s’influencent mutuellement et un extrait d’une masterclass des auteurs. La bande-annonce et des scènes inédites dont une fin alternative un peu sommaire complètent le programme.

Image ***
Format : 1.85
La photo est joliment retranscrite. Hormis un manque de précision notable dans les scènes d’intérieur, l’image est généralement bien définie, lumineuse. Les noirs sont profonds à souhait.

Son ***
DTS-HD Master Audio 5.1 en anglais
DTS.5.1 en français
Sous-titres français non imposés
Sans faire d’esbroufe, la piste non-compressée de la version originale est plus dynamique et plus équilibrée, et sert davantage les passages musicaux.

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Hijacking (Kapringen)

 « La réalité est si bien conçue qu’elle nous surprend toujours… La vraie violence est crue, affreuse et maladroite. »Tobias Lindholm

 Hijacking

Tobias Lindholm
Danemark
2012 (DVD Ad Vitam)

Dans l’océan Indien, un cargo danois et ses sept hommes d’équipage sont pris en otage par des pirates somaliens. Tandis qu’à bord, Mikkel (Pilou Asbæk), le cuisinier, est désigné pour dialoguer avec leur interprète, à Copenhague, Peter Ludvigsen (Søren Malling), l’armateur du cargo et homme d’affaires redoutable, fait appel à un expert de ce genre de crise. Malgré les recommandations de ce dernier, qui préconise l’intervention d’une personne extérieure moins impliquée émotionnellement pour communiquer avec les pirates, le PDG décide de mener les négociations lui-même…

La première apparition de Ludvigsen n’est pas anodine. Il conclut un contrat mal engagé par un subalterne, en faisant preuve d’un sang froid impressionnant. Nul doute pour lui, dès l’annonce de la prise d’otages, qu’il sera l’homme de la situation, et il n’a que faire de la mise en garde de l’expert qui l’avertit que l’émotion est la pire ennemie du négociateur. Distingué en France par le Prix Spécial Police au Festival International du Film Policier de Beaune en 2013, Hijacking, deuxième long-métrage de Tobias Lindholm, scénariste remarqué de la série Borgen et du récent La chasse, de Thomas Vinterberg, met habilement en parallèle la gestion d’une prise d’otage et celle d’un contrat d’affaires. Moins spectaculaire que le récent Capitaine Phillips, de Paul Greengrass, le film, d’un réalisme proche du documentaire, n’en est pas moins palpitant. La caméra alterne les séquences sur le navire, où règnent incompréhension et chaos, et les scènes dans la cellule de crise à Copenhague, lors desquelles Ludvigsen tente de maîtriser une situation qui le dépasse. Au sensationnel, le cinéaste privilégie les réactions et la psychologie des protagonistes (la plupart des scènes d’action, dont l’arrivée des pirates sur le navire, se déroulent hors-champ). Le souci d’authenticité et d’honnêteté prévaut, et l’immersion est totale, jusqu’au final qui fait froid dans le dos.

BANDE-ANNONCE

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Test DVD :

Interactivité*
Seule la bande-annonce figure au programme.

Image ****
Format : 1.85
Belle surprise de ce côté ! La photo brute qui privilégie les éclairages naturels est soutenue par une image lumineuse et superbement définie.

Son : ***
DD 5.1 en danois
DD 2.0 en français
Sous-titres français non imposés
Aussi sobre que la mise en scène, la bande sonore est davantage mise en valeur par la version originale. Cette piste DD 5.1, plus harmonieuse, est aussi plus immersive.

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