THE GRAND BUDAPEST HOTEL

Le génie se faisant plutôt rare ces temps-ci au cinéma, le nouveau film de Wes Anderson ne peut que susciter l’enthousiasme. La virtuosité du cinéaste n’a jamais été aussi éclatante que dans cette œuvre baroque, burlesque, généreuse, nostalgique et profondément humaniste.

 

The Grand Budapest Hotel
 The-Grand-Budapest-Hotel-Still

Wes Anderson
2014
Angleterre — Allemagne

En 1968, le Grand Budapest Hotel, juché au sommet d’une montagne en république de Zubrowka, n’est plus que l’ombre de lui-même. Pourtant, une poignée d’habitués prisent le charme suranné de cet établissement sans pareil. Un jour, pour avoir manifesté de la curiosité au sujet de l’étrange propriétaire des lieux (F. Murray Abraham), un client écrivain (Jude Law) est invité à dîner par ce dernier, qui entreprend de lui raconter la manière dont il a fait l’acquisition de l’établissement. Tout commence en 1930. Le Grand Budapest Hotel était alors un des palaces les plus prestigieux d’Europe, et son concierge, Mr Gustave H. (Ralph Fiennes), était presque plus célèbre que lui…

On peut être insensible au cinéma de Wes Anderson, le juger trop abracadabrant, trop décalé, trop enfantin, trop nostalgique, trop artificiel. J’avoue m’être fermement ennuyée devant A bord du Darjeeling Limited, malgré ses acteurs épatants et ses séduisantes références (alors que j’avais été invraisemblablement touchée par les tribulations du renard malicieux de Fantastic Mr. Fox). Mais l’inventivité, la générosité et l’originalité de l’imaginaire du cinéaste suscitent un respect indéniable. Il faut avoir foi en un tel artiste, qui, film après film, développe ses obsessions et son univers personnel au mépris des modes et des tendances, et a réussi à former autour de lui une famille d’acteurs ô combien judicieuse (Bill Murray, Owen et Luke Wilson, Jason Schwartzman, Adrien Brody, Willem Dafoe, Jeff Goldblum, Edward Norton…). La preuve : son huitième long-métrage, The Grand Budapest Hotel, récompensé au festival de Berlin 2014 du Prix du Jury, frise la perfection. Inspiré par les mémoires de Stefan Zweig autant que par des éléments de la vie réelle du réalisateur, le film narre une aventure rocambolesque de vol de tableau et d’héritage durant l’entre-deux-guerres dans une Mitteleuropa menacée par la montée du nazisme. A cela, se mêle une histoire d’amitié tout aussi improbable entre un concierge sophistiqué à l’extrême et un jeune groom immigré aussi peu loquace que le premier est volubile. Le film propulse dans une boule à neige, et en appelle à Lubitsch, Hergé, Agatha Christie, Hitchcock, et même, via le personnage de tueur incarné par Willem Dafoe, à l’expressionnisme allemand. En digne magicien, Wes Anderson maîtrise tout : les changements d’époque (et avec eux les formats d’image), les techniques d’animation et d’effets spéciaux, les décors kitschissimes (l’hôtel circa 1930 a tout d’un chou à la crème) et le rythme, véritablement trépidant du début à la fin. L’équilibre entre le comique et le drame est remarquable. Et si la mort est souvent présente, l’œuvre n’est en rien morbide, chaque tragédie étant désamorcée en un clin d’œil par un trait d’humour décapant. Trônant sur ce grand huit de l’absurde, Ralph Fiennes est époustouflant de drôlerie, mais son personnage fantasque, à la fois roublard et noble, représentant d’un monde qui se meurt, incarne également l’esprit de résistance, de solidarité et de tolérance face à la barbarie. Un bijou !
Avec Tony Revolori, Mathieu Amalric, Tom Wilkinson, Saoirse Ronan, Tilda Swinton, Jason Schwartzman, Adrien Brody, Jeff Goldblum, Harvey Keitel, Bill Murray, Léa Seydoux, Edward Norton…
1 h 40 min

BANDE-ANNONCE

Meet-the-Cast-of-Characters-of-Wes-Andersons-The-Grand-Budapest-Hotel-0

the-grand-budapest-hotel-international-trailer-0

The-Grand-Budapest-Hotel-la-critique_article_landscape_pm_v8

GHB_7195 20130213.CR2

388813.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxx

19539015_20131017161309326

FANTASTIC MR. FOX

Mr. Fox, le plus rusé des voleurs de poules, avait promis à son épouse Felicity de trouver un métier respectable et de se consacrer à sa famille. Mais l’ennui, le goût de l’aventure et sa nature profonde vont l’amener à manquer à sa promesse…

Fantastic Mr. Fox

hr_The_Fantastic_Mr_Fox_2

Wes Anderson
2009 (DVD/Blu-ray Fox Pathé Europa)
Etats-Unis

Mr. Fox est le plus intelligent et rusé des voleurs de poules. Pourtant, après avoir échappé de justesse à la mort, il promet à son épouse Felicity, enceinte, de mettre un terme à ses activités dangereuses. Devenu éditorialiste pour un journal, il assume son rôle de père de famille responsable, mais s’ennuie fermement. Le jour où les Fox emménagent dans un arbre surplombant les domaines des trois plus riches fermiers de la région, le renard sent ses vieux démons le titiller à nouveau…

Boudée par les spectateurs français lors de sa sortie en salles début 2010, cette adaptation de l’œuvre de Roald Dahl est pourtant une petite merveille d’intelligence et d’inventivité. Aux techniques de la 3D, le réalisateur fantasque Wes Anderson (La famille Tenenbaum, A bord du Darjeeling Limited, La vie aquatique…) a préféré l’animation image par image de marionnettes en trois dimensions. Le film, dont les visuels sont inspirés des dessins originaux de Donald Chaffin, l’illustrateur des éditions originales du livre de Roald Dahl, surprend et éblouit à chaque plan, tout en revêtant un aspect artisanal qui le rend très attachant. Le cinéaste et son coscénariste Noah Baumbach ont peaufiné des dialogues truculents, et le ton des personnages, un brin décalé, est absolument irrésistible. Fantastic Mr. Fox a été salué par deux nominations aux Oscars 2010 (Meilleur film d’animation et Meilleure musique, signée Alexandre Desplat). Un film pour toutes les générations, à voir absolument !
87 minutes

1369595469_ashfoxandkylie

fantastique-maitre-renard-the-fantastic-mr-fox-17-02-2010-13-11-2009-6-g

fantastique-maitre-renard-the-fantastic-mr-fox-17-02-2010-13-11-2009-2-g

tumblr_ksjz74Asfs1qa896lo1_1280

1369595486_Fantastic-Mr.-Fox

Chronique rédigée pour Fnac.com en 2010