WISHLIST NOËL 2025

Des cadeaux à s’offrir entre cinéphiles (l’ordre n’a pas d’importance).

 

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1 – Le grandiose

MY NAME IS ORSON WELLES
Ouvrage collectif publié sous la direction de Frédéric Bonnaud, directeur général de la Cinémathèque française
18 septembre 2025
La Table Ronde (44,50 €)

 C’est l’événement cinéphilique de la saison ! My Name Is Orson Welles, exposition consacrée à ce monument du 7e art né il y a cent dix ans, se tient depuis le 8 octobre à la Cinémathèque. On doit à Orson Welles, disparu en 1985, le film des films, Citizen Kane, mais aussi les merveilles que sont La Splendeur des Amberson, La Dame de Shanghai ou La Soif du mal. Tout aussi imposant que l’expo, son catalogue, au titre homonyme, supervisé par Frédéric Bonnaud, est magnifique. Dense (464 pages, 320 illustrations), il immerge dans l’univers du cinéaste à la fois génial et maudit, via des textes pertinents, entre autres, de Costa-Gavras, Sartre, Borges, Aragon, Frédéric Bonnaud, Philippe Garnier, et des entretiens de Welles lui-même. Comme John Cassavetes, le cinéaste américain a achevé douze longs-métrages et laissé pléthore d’œuvres en suspens. Il a également réalisé des téléfilms, des séries, a fait l’acteur… Ce créateur protéiforme et magicien sur les bords aimait dire qu’il était une multitude.

 « Welles est moderne parce qu’il a, dans un moment spectaculaire et mémorable qui n’a guère duré, arraché le cinéma aux griffes des studios. Et parce que, durant les décennies de galère qui ont suivi, il a héroïquement montré (avant Alain Cavalier ou Sean Baker) que tout le monde pouvait faire des films avec peu de moyens. Mais son cinéma peut aussi aujourd’hui faire songer à un fantastique cabinet de curiosités. » Philippe Garnier

L’exposition My Name Is Orson Welles, à découvrir à la Cinémathèque jusqu’au 11 janvier 2026.

 

2 – Le fétichiste

CAROL ÉDITION 4K ULTRA HD + 2 BLU-RAY
Et en édition limitée Fnac – 500 exemplaires
2 décembre 2025
Bubbel Pop’ Édition (49,99 €)

Pour son dixième anniversaire, le bijou de Todd Haynes, élu Meilleur film LGBT de tous les temps par le British Film Institute, et lauréat de la Queer Palm à Cannes 2015, s’est fait une beauté. En plus d’une remastérisation 4K Dolby Vision, l’éditeur Bubbel Pop’, en étroite collaboration à Studio TF1 et Elizabeth Karlsen, productrice du film, a magnifiquement mis en valeur cette histoire d’amour intemporelle – portée par Cate Blanchett et Rooney Mara – adaptée de l’œuvre de Patricia Highsmith. Le coffret propose trois heures de suppléments exclusifs, un livre de cent pages retraçant l’histoire du tournage, des cartes postales, l’affiche… Une édition limitée numérotée Fnac, dotée d’un fourreau magnifique, ajoute le vinyle de la BO de Carter Burwell, le lookbook de Todd Haynes, quatre tirages photo et une lettre inspirée du film. C’est vraiment Noël.

Carol, le film, ma critique ici.

 

 

3 – Le flamboyant

ROBERT EVANS — MÉMOIRES
Robert Evans
12 octobre 2025
Éditions Séguier (24,90 €)

Dans l’excellente mini-série The Offer, diffusée en 2022, il était incarné par Matthew Goode, outrageusement bronzé, tiré à quatre épingles, fabuleux dans la peau du playboy invétéré et génial producteur à la fois. Robert Evans était comme ça. À l’origine, cette autobiographie, éditée originellement en 1995, s’intitulait The Kid Stays In The Picture (c’était aussi le titre de l’excellent documentaire signé Brett Morgen et Nanette Burstein paru en 2002). Le légendaire producteur du Parrain, de Rosemary’s Baby ou Chinatown s’est éteint en 2019, à l’âge de quatre-vingt-neuf ans, mais sa personnalité hors-norme continue de briller dans le ciel d’Hollywood. Robert Evans a écrit ses mémoires comme il a mené sa vie, tambour battant. Acteur raté devenu producteur instinctif, capable de déplacer des montagnes, il a eu le monde (et les femmes) à ses pieds avant de se brûler les ailes. Dans cette réédition enrichie de chapitres inédits, son écriture est enlevée, les anecdotes, drôles ou édifiantes, pullulent. Il évoque son amitié avec Alain Delon, Roman Polanski, Warren Beatty… Sharon Stone et Mickey Rourke en prennent pour leur grade. Son histoire d’amour douloureuse avec Ali MacGraw, qui fut son épouse et la mère de son unique fils — elle l’a quitté pour Steve McQueen —, noircit pas mal de lignes. Mais surtout, Bob Evans, dernier des grands producteurs américains, parle de son métier avec la passion qui l’a toujours caractérisé, mue par un véritable amour du cinéma.

« Les vrais producteurs sont peu nombreux. C’est une espèce en voie de disparition. Il existe en revanche beaucoup de « producteurs de cocktail » (d’après un récent recensement, ils sont plus nombreux que la police). Dilettante, agent, photographe, avocat, esbroufeur, brasseur d’affaires, playboy, financier, mari de starlette, tous exploitent indûment le terme de « producteur ». Aucun de ces types n’a la moindre notion de budget, de distribution ou de casting, de préproduction, de production, de postproduction, de montage final, de sélection finale des salles, de publicité, de marketing, ni de collecte du pognon. Et ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses facettes des responsabilités d’un vrai producteur. »

 

4 – L’envoûtant

UNE BATAILLE APRÈS L’AUTRE SOUNDTRACK
Jonny Greenwood
26 septembre 2025
Nonesuch Records (40 € environ)

Sixième collaboration pour un film de fiction du musicien multi-instrumentiste Jonny Greenwood, éminent membre de Radiohead, avec le cinéaste Paul Thomas Anderson (depuis There Will Be Blood). La bande originale du sensationnel Une bataille après l’autrese fait l’écho de la palette des émotions du film, à la fois violent, sombre, drôle et tendre. Entre morceaux organiques et expérimentaux (guitares, cordes, percussions et piano discordants…), on trouve là des plages plus mélodiques (« Perfidia Beverly Hills », « Song For Willa », « Avanti Q », et ma préférée, « Trust Device »). Cette BO a été enregistrée aux mythiques studios Abbey Road, avec le concours du London Contemporary Orchestra. Autant dire que ça envoie. Quarante-neuf minutes de musique sont réparties sur les dix-huit plages de ce double vinyle qui fera le bonheur des aficionados de Greenwood. À noter que le morceau « Mean Alley » a été coécrit avec Thom Yorke.

 

 

5 – L’irrésistible

BILLY WILDER « ET TOUT LE RESTE EST FOLIE »
Mémoires
Billy Wilder et Hellmuth Karasek
Traduit de l’allemand par Jeanne Étoré et Bernard Lortholary
Septembre 2024
Nouveau Monde Éditions (25,90 €)

Ça avait commencé par une simple interview. C’est devenu un livre, édité pour la première fois en 1992. Le critique et écrivain allemand Hellmuth Karasek, disparu en 2015, s’est entretenu à moult reprises à partir de 1986 avec « le père de la comédie hollywoodienne », réalisateur d’Assurance sur la mort, Boulevard du crépuscule, Sept ans de réflexion, Certains l’aiment chaud ou de La Garçonnière. Karasek replace constamment les propos de Wilder dans leur contexte, ce qui confère à l’ouvrage un indéniable intérêt historique. La fameuse ironie du cinéaste autrichien exilé aux États-Unis dès 1934 resplendit à chaque page, et les évocations de ses collaborateurs et de la faune du cinéma de son époque ne manquent pas de sel.

À propos de Greta Garbo :

« Je compris vite qu’elle supportait solidement l’alcool, et elle avait aussi un rire solide, en buvant son premier, puis son deuxième martini… faisant des déclarations comme : ‘Je le dis toujours, une hirondelle ne fait pas le printemps’ ou encore ‘Il faut battre le fer tant qu’il est chaud’. Cette femme énonçait des proverbes comme si c’était sa propre inspiration spontanée. »

À propos de Marilyn Monroe, sur le tournage de Certains l’aiment chaud :

« Marilyn était un véritable génie en tant qu’actrice comique, elle avait un sens extraordinaire du dialogue comique. Je n’ai jamais trouvé après elle de femme comparable. Et pourtant, elle pouvait être prodigieusement déplaisante… On peut comprendre qu’à la fin du tournage, Curtis, un peu amer, ait dit : ‘Embrasser Marilyn Monroe, c’était comme embrasser Adolf Hitler. »

 

 6 – L’élégant

VIVE ALLURE !
Jean-Paul Rappeneau
Avec Kéthévane Davrichewy
29 octobre 2025<
Grasset (20,90 €)

Il a signé quelques-uns des longs-métrages les plus populaires du cinéma français. En 1991, son Cyrano de Bergerac a décroché pas moins de dix César, dont celui du Meilleur film (ainsi que l’Oscar des Costumes), et le Golden Globe du Meilleur film en langue étrangère. Et pourtant, il n’y a pas plus discret que Jean-Paul Rappeneau qui, en soixante ans de carrière, n’a réalisé que huit longs-métrages. « Une cadence qui contraste ironiquement avec celle de mes films » confie-t-il dans ce livre. Car le mouvement est la caractéristique de son cinéma. Cette particularité, il la partage avec son ami feu Philippe de Broca, avec lequel il a collaboré à de nombreuses reprises.

« Je tourne moins que lui mais chacun de mes films laisse une petite trace dans les siens. Il y a un peu de La Vie de château dans Le Diable par la queue et dans Le Roi de cœur, avec la prise du blockhaus ! Sans parler de L’Africain à venir, le duo Deneuve/Noiret de La Vie de château dans une décalcomanie du Sauvage. »

Amie de longue date du cinéaste et de son épouse Claudie, Kéthévane Davrichewy a encouragé ce dernier à écrire ses souvenirs de tournage qu’il avait pris l’habitude de consigner dans des journaux de bord. Elle a bien fait. L’ouvrage immerge dans le cinéma français des années 60 à aujourd’hui. Rappeneau évoque sa complicité avec Claude Sautet et Jean-Loup Dabadie, raconte sa rencontre avec Catherine Deneuve, la petite sœur discrète de Françoise Dorléac, qui, elle, se déchaînait sur les pistes de danse avec son ami Jean-Pierre Cassel. On y apprend aussi que Jean-Paul Belmondo ne s’entendait pas avec Marlène Jobert, sa partenaire des Mariés de l’an II, au point de la comparer au Mur de Berlin. Sur le tournage du Sauvage, Yves Montand s’agaçait de devoir courir derrière Catherine Deneuve, tandis que sur celui de Cyrano, Gérard Depardieu faisait… du Gérard Depardieu…

« ‘Je te regardais pendant ce dîner, tu manges comme un fou, tu bois comme un trou, si ça continue comme ça, tu vas redevenir gros. Hurlements ! Qu’ai-je dit ? J’ai prononcé le mot tabou… »

 On découvre que colonel Pardi du Hussard sur le toit a failli avoir le visage de Keanu Reeves, que Rappeneau a rencontré pour l’occasion avant de comprendre que la langue allait poser problème. Du coup, le rôle du séduisant soldat est allé au tout jeune Olivier Martinez, beau gosse lui aussi, un vrai choix de midinette assumé par le réalisateur.

 

7 – Le culotté

MON BBCÉDAIRE
Brigitte Bardot
Septembre 2025
Fayard (19 €)

Depuis quelque temps, les nouvelles de la santé de Brigitte Bardot sont alarmantes. Pour autant, ce petit abécédaire, conçu avec l’illustrateur Ayoub Bougria, démontre qu’à quatre-vingt-onze ans, elle n’a rien perdu de sa verve. Rédigées à l’encre bleue par l’icône française elle-même, qui use de son franc-parler habituel, ces définitions lapidaires (mais de taille inégale), font parfois sourire (ou hurler c’est selon), mais se révèlent quelquefois pertinentes. En somme, tout BB.

« A comme Aznavour (Charles) : Grand talent, petite envergure. Se faisait payer ses autographes. »

« R comme Rap : Épouvantable. Manière sauvage et primaire de faire des sons sans queues ni têtes. »

« S comme Sondages : On s’en fout ! »

 

 

8 – Le prodigieux

BONG JOON-HO DÉSORDRE SOCIAL
Erwan Desbois
23 septembre 2025
Playlist Society (17,00 €)

On se lève tous pour Bong Joon-ho ! Dès Memories Of Murder, on a su qu’il allait falloir compter avec ce cinéaste extrêmement doué. Les succès internationaux de The Host, Mother, Snowpiercer ou Parasite ont fait de lui le réalisateur coréen actuel le plus prisé. Chez Bong Joon-ho, la forme, souvent brillante, épouse le fond. Film après film, il ausculte de manière déguisée, et avec un humour noir dévastateur, les dysfonctionnements d’une société coréenne en apparence libérale, mais hantée par des années de dictature. Le réalisateur né en 1969 sait de quoi il parle : il a grandi alors que le pays était encore sous le joug d’un régime autoritaire où la censure était reine. Comme le démontre habilement le spécialiste Erwan Desbois dans cet essai paru dans la dynamique maison d’édition Playlist Society, la lutte des classes et la critique sociale sont toujours au cœur de son cinéma. Les fans du prodige coréen devraient apprécier cette analyse pertinente et érudite de la filmographie de Bong Joon-ho, Mickey 17 compris.

« Comme Bong Joon-ho l’a explicité lui-même, le sujet au cœur de Parasite est la propriété privée, « clé de voûte » du système capitaliste partout sur le globe, qui transforme en « fantômes » ceux qui n’ont rien, car la valeur humaine est devenue abusivement indexée sur la valeur financière des possessions. Cette dépréciation humiliante et sans appel remplit ceux qui en sont victimes d’une colère dont le contrôle leur échappe. Les films de Bong sont remplis d’affrontements entre les pauvres qui se retournent cruellement les uns contre les autres. »

  

9 – Le culte

CLAUDINE — L’INTÉGRALE DE LA SÉRIE
Réalisé par Édouard Molinaro en 1978
Coffret 4-DVD paru le 14 octobre 2025
Les joyaux de la télévision/Elephant Films (34,99 €)

Qui se souvient de l’actrice Marie-Hélène Breillat, passée comme une météorite dans le ciel du cinéma français ? La grande sœur de Catherine Breillat a pourtant été une it girl des années 70, avec son grand sourire, ses yeux magnifiques, sa silhouette gracile et son air mutin qui lui valait d’être comparée à Audrey Hepburn. Au début de la décennie 80, alors qu’elle vient de tourner avec Ingmar Bergman (dans Fanny et Alexandre), des problèmes de santé vont l’éloigner des plateaux. Elle n’y retournera pas, préférant se consacrer à l’écriture et la peinture. Elle a laissé son empreinte dans quelques films dont La Mandarine (1972) ou L’Ironie du sort (1974), signés par son époux de l’époque, Édouard Molinaro. Mais Marie-Hélène Breillat est surtout indissociable des Claudine, adaptation de Colette pour la télévision, quatre épisodes de quatre-vingt-dix minutes écrits par Danièle Thompson et réalisés par le même Molinaro. Diffusés en 1978 sur TF1, Claudine à l’école, Claudine à Paris, Claudine se marie, Claudine s’en va ont remporté un gigantesque succès, notamment auprès des adolescentes. Plus de quatre décennies après, on peut s’étonner (et s’en réjouir…) qu’un programme avec une telle liberté de ton (l’aspect sulfureux n’a pas été édulcoré par Danièle Thompson), ait pu être diffusé à une heure de grande écoute. La série, certes, accuse son âge, mais Marie-Hélène Breillat est pétillante à souhait et la distribution est de haute volée : l’épatant Patrice Alexsandre, Catherine Samie, Georges Marchal, Dani, Jean-Claude Dauphin, Muriel Catala, Béatrice Agenin, Évelyne Dress, Jean Desailly… Un bonheur ! On regrette juste l’absence de bonus.

« Je déteste l’arithmétique ! Je hais les ouvriers qui plantent des piquets à trois francs, les couturières qui usent plus d’aiguilles à zéro franc cinquante en vingt-cinq ans que d’aiguilles à un franc vingt-cinq en trente-six ans ! J’exècre les locomotives, qui compliquent diaboliquement leur vitesse, leurs horaires et l’état de santé du chef de gare ! »

 

10 – Le cauchemardesque

LA NUIT DU CHASSEUR Édition Collector 70e Anniversaire
Steelbook 4K UHD/BLU-ray
14 novembre 2025
Wild Side Video (29,99 €)

Le chef-d’œuvre de Charles Laughton réalisé en 1955, avec un Robert Mitchum particulièrement terrifiant, est de retour. Force est de constater que la restauration en collaboration avec la Film Fondation de Martin Scorsese a fait des merveilles. L’image est précise, les noirs et blancs sidérants de contraste. Le boitier métal aux visuels magnifiques propose le film sur deux formats, assorti de cinq heures de suppléments, dont des inédits (documentaire sur le travail de Laughton, entretien avec le comédien et auteur Simon Callow, spécialiste du cinéaste, analyse du film etc.). En un mot : indispensable.

 

Et en plus…

 

CAPPRICI STORIES
Lee Marvin/Joaquin Phoenix/ Patrick Dewaere/Nathalie Wood/ Gary Cooper/John Wayne… (11,50 €)

À petit prix, les livres de la collection Capprici Stories, des Éditions Capprici, constituent un cadeau de choix pour les cinéphiles. Ces essais sont signés par des journalistes passionnés de cinéma. Ils abordent les figures marquantes du 7e art avec un ton très personnel et selon un angle souvent très intéressant.

 

SCHNOCK N° 56 : LA BOUM
10 septembre 2025
Éditions La Tengo (17,50 €)

Le magazine dirigé par le bouillonnant Alister a consacré un numéro à La Boum de Claude Pinoteau. L’exquise comédie générationnelle parue en 1980, coécrite par Danièle Thompson, a révélé Sophie Marceau. Via des points de vue d’auteurs choisis, cette immersion dans la période est plus que réjouissante. On apprécie grandement cette exploration amusante de l’univers du film qui, nostalgie aidant, enchante toujours un peu plus à chaque visionnage.

 

SI VERSAILLES M’ÉTAIT CONTÉ
Sacha Guitry
Édition Collector Limitée Blu-Ray 4K Ultra HD
5 décembre 2025
Rimini éditions (34,99)

La fresque signée Sacha Guitry en 1954 vient d’arriver dans les bacs en 4K Ultra HD/Blu-ray, avec bonus à la clé. Retraçant trois siècles d’histoire par le prisme du château de Versailles, de sa construction jusqu’à la chute de la monarchie, ce film sans pareil de près de trois heures reflète l’esprit français dans toute sa splendeur. Il réunit en outre le fleuron des comédiens de l’époque (de Brigitte Bardot à Jean Marais, en passant par Micheline Presle et Gérard Philippe, Tino Rossi et Édith Piaf), chacun dans la peau d’une figure plus ou moins célèbre : Molière, d’Artagnan, Madame de Pompadour… Certes, un peu surannée comparée au Marie-Antoinette de Sofia Coppola, cette superproduction en hommage à l’un des emblèmes de la France, est, à sa façon (celle de Guitry), très raffinée.

 

ET JOYEUX NOËL À MES LECTEURS ! 

WHISHLIST NOËL 2024

Quatorze cadeaux à s’offrir entre cinéphiles (l’ordre n’a pas d’importance).

 

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1 – L’éblouissant

LA MORT AUX TROUSSES d’Alfred Hitchcock
Édition Collector Ultime Steelbook Blu-ray 4K Ultra-HD
20 novembre 2024
Warner Bros Entertainment France (49,99 €)

Les années passent et le talent de Hitch émerveille comme au premier jour. À l’occasion de son soixante-cinquième anniversaire, le chef-d’œuvre du cinéaste anglais, se voit offrir, par Warner Bros, une restauration intégrale supervisée par The Film Foundation, l’organisation créée par Martin Scorsese. La qualité sonore et visuelle de cette nouvelle édition 4K Ultra-HD surpasse toutes les précédentes. Le coffret inclut la plupart des suppléments déjà au menu du Blu-ray Collector du 50e anniversaire, à l’époque non sous-titrés (commentaire audio, making of, reportages etc.). Il abrite également un livret de 40 pages richement illustré, un poster de l’affiche recto verso format A3, six cartes postales (behind the scenes). Un must !

 

  

2 – La bellissima

MONICA VITTI – Mémoires
Traduit de l’italien par Florence Rigollet
17 octobre 2024
Éditions Séguier (22 €)

En 1960, L’Avventura, de Michelangelo Antonioni, lui avait valu d’être qualifiée de « plus belle femme du monde ». Et pourtant, Monica Vitti ne correspondait en rien aux canons de l’Italienne de l’époque, immortalisée par ses consœurs Gina Lollobrigida, Sophia Loren ou Claudia Cardinale. Avec sa crinière blonde (brune quelquefois), sa silhouette longiligne, sa désinvolture, sa voix rauque et son regard mystérieux (dû à sa myopie selon elle), elle campait cette femme moderne, authentique et insondable qui allait sublimer une flopée de films de La Notte à Modesty Blaise, en passant par L’Éclipse ou Le Désert Rouge. Celle qui fut pendant dix ans l’épouse de Antonioni avait écrit ses mémoires dans les années 90, une « autobiographie involontaire », sous la forme de deux tomes restés inédits en France, et aujourd’hui publiée par Séguier. L’actrice-réalisatrice y parle de son enfance, de ses rencontres, de ses doutes et angoisses, et se livre sans forfanterie, sans se soucier d’une quelconque chronologie (les journalistes qui l’interviewent en perdent leur latin). Au fil des pages, on tombe sous le charme de cette personnalité fantasque et attachante, qui évoque souvent sa mémoire qui s’enfuit, comme si elle pressentait sa destinée. Monica Vitti est décédée en 2022, à l’âge de quatre-vingt-dix ans, après des années de lutte contre la maladie d’Alzheimer. Elle raconte dans ce livre qu’un jour, lors d’une sortie en Méditerranée avec des amis, de laquelle était aussi Antonioni qu’elle connaissait à peine, elle s’était perdue sur une île déserte où le bateau avait accosté. Après s’être fait un peu peur, elle a retrouvé le yacht, confuse d’avoir fait attendre ses compagnons :

« ‘Je me suis perdue, excusez-moi’.
Le yacht est reparti. Un peu plus tard, Michelangelo m’a dit en souriant : ‘J’ai pensé à l’histoire d’une fille qui disparaît sur une île. On en reparlera.’ »

 

3 et 4 – Les performers

SONNY BOY : Mémoires
Al Pacino
Traduit de l’anglais par Nicolas Richard
8 octobre 2024
Seuil (27 €)

L’acteur surdoué du Nouvel Hollywood (avec Robert De Niro) se raconte, pour, dit-il, que son fils, qu’il a eu à quatre-vingt-trois ans, connaisse son histoire. Elle commence dans un milieu pauvre du sud du Bronx, où il grandit, élevé par sa mère. C’est elle qui le surnomme « Sonny Boy », d’après la chanson popularisée par Al Jolson qu’elle adore. C’est aussi elle qui l’emmène au cinéma. Dès son plus jeune âge, Al a déjà la vocation. Pour concrétiser son rêve, il mangera de la vache enragée, en bavera souvent, mais les étoiles s’aligneront parfois. Un certain Francis Ford Coppola va changer son destin. Le réalisateur se battra bec et ongles pour l’imposer dans Le Parrain, et sa performance en Michael Corleone restera dans les annales. L’adepte de la Méthode revient sur tout avec une sincérité réjouissante : sa rencontre avec Brando (son idole), sa passion pour Shakespeare, ses amours (Marthe Keller, Jill Clayburgh…), ses échecs (son alcoolisme, ses bides…) et ses moments de gloire. Même les légendes des photos ne manquent pas de sel. Penguin Press, l’éditeur de la version originale, avait prévenu : « c’est l’autobiographie d’un homme qui n’a plus rien à craindre et plus rien à cacher. » C.Q.F.D.

 

DE NIRO : L’affranchi
Guillaume Evin
30 octobre 2024
Hugo Image (34,95 €)

Malgré son allure imposante de beau livre, ce n’est pas un ouvrage exhaustif sur l’interprète du mythique Taxi Driver que propose le journaliste Guillaume Evin, mais plutôt un best-of de sa filmographie. Il s’attarde en effet sur vingt titres majeurs dont Le Parrain 2e partie, Taxi Driver, Voyage au bout de l’enfer, Il était une fois en Amérique ou encore Killers Of The Flower Moon. L’enfance de l’acteur et sa famille sont également largement évoquées. L’atout de ce livre grand format : ses nombreuses photos, mêlant vie privée, tournages et films.

 

5 – L’universitaire

LES K-DRAMAS, CES SÉRIES QUI FONT DU BIEN
Vincenzo Cicchelli et Sylvie Octobre
6 novembre 2024
Éditions PUF (19 €)

L’engouement du public occidental pour les K-dramas n’est plus un scoop. Deux universitaires, Vincenzo Cicchelli, maître de conférences en sociologie à Paris Cité, et Sylvie Octobre, chercheuse au ministère de la Culture et professeur à Science Po, se sont penchés sur le phénomène. À travers l’étude de séries parmi les plus populaires (Boys Over Flowers, Crash Landing On You, Love Alarm, Business Proposal, Hotel Del Luna, Itaewon Class…), ils mettent en évidence l’importance des aspects humains et sociétaux souvent absents dans les productions occidentales, plus cyniques. Qu’il s’agisse de fantastique, de thriller ou de romance, les récits font la part belle à l’amitié, à la famille, au respect d’autrui, à l’épanouissement personnel et réconcilient l’inconciliable. D’où le titre de cette thèse fort pertinente, qui pourra inciter les réfractaires à s’intéresser au genre.

« À travers les K-dramas, c’est donc un attachement désirable, une véritable philosophie du vivre ensemble (…), qui s’offrent au regard des sociétés occidentales postmodernes. »

 

 

6 et 7 – Les historiques

ANNALES DU CINÉMA FRANÇAIS
Les voies du parlant 1930-1946
Pierre Lherminier et René Prédal
Octobre 2024
Nouveau Monde Éditions (59 €)

Sur la balance, il fait plus de trois kilos. Et le contenu est à l’avenant. Du lourd. La note de l’éditeur stipule qu’il s’agit d’une œuvre colossale. On confirme. Elle est celle d’un homme, Pierre Lherminier, historien du cinéma français, décédé en 2021, juste après avoir achevé le manuscrit. Ce passionné avait déjà publié en 2012 Les voies du silence, un premier tome consacré au cinéma muet. Pour celui-ci, il a collaboré avec l’essayiste et critique René Prédal, ainsi qu’avec le journaliste Bernard Bastide. Toute l’histoire de l’industrie cinématographique française est retracée ici chronologiquement et dans ses moindres détails, de l’arrivée du parlant jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les tendances, l’accueil fait aux films par la critique et le public, les personnalités phare (Abel Gance, René Clair, Sacha Guitry, Marcel Lherbier, Marcel Pagnol…), les studios, sans oublier la conduite douteuse de certains pendant l’Occupation, sont largement évoqués. Cet ouvrage monumental est aussi richement illustré : affiches de films, couvertures de magazines (Ciné-Miroir et Cinémonde en tête) ou de photos de stars (Danielle Darrieux, Madeleine Sologne, Jean Gabin, Josette Day, Micheline Presle…). Bref, pour tout cinéphile qui se respecte, c’est une encyclopédie aussi passionnante qu’indispensable.

 

L’AFFAIRE BERNARD NATAN
Les années sombres du cinéma français
Dominique Missika
13 septembre 2023
Denoël (20 €)

Il est évoqué dans l’ouvrage précédent, mais son nom est tombé dans l’oubli. Pourtant, Bernard Natan, pionnier du septième art, a régné sur le cinéma français des années 30. À cette époque, Pathé se nomme d’ailleurs Pathé-Natan, et la firme est en tête de la production cinématographique hexagonale. Ce passionné de cinéma et homme d’affaires avisé venu de Roumanie avait pour nom de naissance Nahum Tanenzaph. L’extrême droite ne le lui pardonnera pas. Même si on est un capitaine d’industrie, il ne fait pas bon être juif sous le régime de Vichy. Bernard Natan sera accusé à tort de détournement frauduleux et, après un simulacre de procès, il sera emprisonné puis déporté. Il mourra à Auschwitz en 1942. L’historienne et éditrice Dominique Missika a mené une enquête minutieuse afin de réhabiliter le nom du producteur au destin brisé, devenu en son temps « le juif le plus haï de France ». Elle a bénéficié de l’aide des petites-filles de Bernard Natan désireuses, elles aussi, de connaître et de rétablir la vérité à propos leur infortuné aïeul.

« Sur l’air de la calomnie, le destin de Bernard Natan se chanterait facilement. C’est d’abord une rumeur légère. N’est-il pas un escroc ? Un aventurier sans foi ni loi ? Venu d’un pays étranger ? Le mal est fait, il s’avance, il est porté, rien ne l’arrête et le malheureux est terrassé. Son histoire commence par une success story et s’achève par une tragédie. »

 

8 et 9 – À l’Ouest, du nouveau

TOTAL WESTERN
François Cérésa
23 mai 2024
Éditions Séguier (19 €)

Ce n’est pas parce que le néowestern est à la mode qu’il faut négliger le western, le vrai, celui de Raoul Walsh, de Delmer Daves ou de Bud Boetticher. Amoureux du genre depuis des lustres, le journaliste et écrivain François Cérésa lui rend hommage en évoquant ses films fétiches, Rio Bravo en tête. Il ne boude pas non plus le western spaghetti. Plus Howard Hawks que John Ford davantage Gary Cooper que John Wayne, Cérésa remet les pendules à son heure, « châtie les navets et venge les chefs-d’œuvre oubliés. » Un régal donc.

« Dans Liberty Valance, un gars nous plaisait : Valance. L’affreux et fantastique Lee Marvin. Sa dégaine. Son chapeau en arrière. Sa manière de vous toiser. Son gilet bariolé. Son fouet au poignet. Ses colts portés à l’envers. À la limite du déficient mental. Ce gars s’appelait Lee parce que ses parents admiraient le général Lee. Le chef des armées sudistes pendant la guerre de Sécession. Vous voyez le genre. »

 

JOHN WAYNE : La Classe américaine
Boris Szames
13 septembre 2024
Capricci Stories (11,50 €)

Il n’a pas uniquement joué dans des westerns, mais le Duke en a été l’un des piliers. Boris Szames, journaliste et critique (pour So Film, Métal Hurlant…) et créateur de la version originale du site Gone Hollywood, revient sur la personnalité controversée de l’icône américaine, née Marion Morrison, sur ses convictions (et ses propos qui font aujourd’hui fulminer les wokistes), et sur ses rapports conflictuels avec John Ford. L’auteur s’attarde aussi sur la mélancolie d’un homme qui assiste, impuissant, au déclin de son cher Far-West. Davantage un essai qu’une biographie donc, mais riche d’un point de vue qui n’est pas le moindre de ses attraits.

« En 1930, ces héros s’appellent Gary Cooper, Douglas Fairbanks. Sûrement pas Marion Morrison. ‘Et pourquoi pas Anthony Wayne ou Mad Wayne ?’ Raoul Walsh se souvient avoir dévoré un bouquin sur cette figure éminente de la guerre d’indépendance… Sheehan sourcille encore. ‘Tony’ sent le Rital fraîchement débarqué de son rafiot à Ellis Island. ‘John’ fleure davantage l’américanité. ‘Appelez-le comme vous voulez, mais gardez ce nom’, insiste Walsh, comme sous le coup d’une intuition érudite. »

 

10 – Le mélancomique

APATOW PRODUCTIONS
Trois comédies culte :
Sans Sarah rien ne va ! – Mes meilleures amies – 5 ans de réflexion.
Coffret Collector 3-Blu-ray
19 novembre 2024
Elephant Films (49,99 €))

Parce que les temps ne sont pas à la rigolade, voici de quoi se remonter le moral : trois films produits par Judd Apatow, le roi de la comédie américaine moderne, réalisateur inspiré de Quarante ans, toujours puceau, En Cloque mode d’emploi ou Funny People. Restaurés en haute définition, Sans Sarah, rien ne va ! (Forgetting Sarah Marshall), de Nicholas Stoller (2008), Mes meilleures amies (Bridesmaids) de Paul Feig (2011) et 5 ans de réflexion (The Five Year Engagement) de Nicholas Stoller encore (2012), sont proposés chacun en version longue inédite (unrated pour Mes meilleures amies), assortis de nombreux suppléments. Inclus dans le coffret, un livret de 52 pages, signé du critique Nicolas Tellop, fournit une analyse pertinente du style Apatow. Les films présentés ici « sont les représentants d’un temps désormais révolu où le rire le plus gras se conjuguait à une gravité étrangement poétique. » Jason Segel, Emily Blunt ou Kristen Wiig amusent à leurs dépens et, derrière la légèreté, pointe toujours un sentiment de désillusion, d’où le titre du livret : Mélancomiques.
Également disponible en DVD.

 

11 – Le musclé

LES STARS DE L’ACTION
Rois et reines de la castagne à l’écran
Philippe Lombard
6 novembre 2024
Hugo Image (24,95 €)

Au cinéma, l’action fait toujours recette et chaque décennie a été marquée par ses stars du genre, voire ses icônes. Cet ouvrage ludique répertorie ces acteurs virevoltants et populaires, de Douglas Fairbanks à Tom Cruise. À chacun sa catégorie : « les vétérans » (Errol Flynn, John Wayne, Charlton Heston…) ; « les coqs sportifs » (Jean-Paul Belmondo, Lino Ventura…) ; « les durs à cuire » (Lee Marvin, Charles Bronson…) etc. Les filles ne sont pas nombreuses, mais sont bien présentes sous la bannière des « bagarreuses » (Pam Grier, Michelle Yeoh, Angelina Jolie…). L’Asie n’a pas été oubliée, pas plus que le phénomène de la Bruceploitation. Si les propos du journaliste Philippe Lombard sont plutôt pertinents, on regrette cependant la toute petite place accordée à Keanu Reeves. L’interprète de Neo et de John Wick est à peine mentionné au sein des « poids moyens ». Un scandale.

 

12 – L’engagé

ERNEST COLE, PHOTOGRAPHE
Ernest Cole et Raoul Peck
16 octobre 2024
Denoël (35 €)

Ce livre majestueux de photos accompagne la parution en décembre du documentaire homonyme, réalisé par le cinéaste haïtien Raoul Peck, auquel on doit déjà le fameux I’m Not Your Negro, basé sur les écrits de l’auteur noir-américain James Baldwin et récompensé en 2018 par le César du Meilleur documentaire. Ici, le réalisateur se penche sur le travail extraordinaire du Sud-Africain Ernest Cole, qui fut le premier à exposer les horreurs de l’Apartheid au monde entier, après avoir fui son pays, en 1966, à vingt-sept ans, pour se réfugier à New York. Mais en Amérique, la ségrégation raciale va le révolter tout autant et il en montrera des images édifiantes. Oublié de tous, le photographe décède en 1990. Mais vingt-sept ans plus tard, au moins soixante mille de ses négatifs et photos sont mystérieusement retrouvés dans les coffres d’une banque suédoise. Grâce au livre et au documentaire, le public pourra enfin découvrir ces clichés sensationnels au capital historique majeur.

  

13 et 14 – Les musicaux

ROMY SCHNEIDER, UN PORTRAIT MUSICAL
Philippe Sarde – Claude Sautet
Novembre 2024
Decca/Universal (35,99 €)

Les Choses de la vie, César et Rosalie, Max et les ferrailleurs, Une histoire simple : quatre films de Claude Sautet illuminés par la présence de Romy Schneider et la musique de Philippe Sarde. Ce double vinyle rassemble les bandes originales de ces chefs-d’œuvre du cinéma français indissociables de l’actrice iconique, ainsi que des titres inédits comme « La Maison sur la plage », une chanson enregistrée par la charmante comédienne Alice Taglioni, sur des paroles de feu Jean-Loup Dabadie.

 

IL ÉTAIT UNE FOIS MICHEL LEGRAND


Bande originale du film de David Hertzog Dessites
6 décembre 2024
Decca/Universal (26,99 €)

Pour accompagner la sortie en salles du film musical que David Hertzog Dessites a consacré au formidable compositeur français disparu en 2019, Decca publie cette bande originale peu banale. Aux classiques des chansons (Les Demoiselles de Rochefort, La Valse des Lilas, Les Moulins de mon cœur, Le Messager…) se mêlent des extraits d’entretiens du musicien issus du documentaire, mais aussi des morceaux interprétés par d’autres, tels Stan Getz, Claude Nougaro ou le saxophoniste américain Phil Woods.
Disponible en vinyle, en CD et digital.

 

ET JOYEUX NOËL À MES LECTEURS ! 

 

WISHLIST NOËL 2023

Douze cadeaux (et plus) à s’offrir entre cinéphiles (l’ordre n’a pas d’importance).

(Click on the planet above to switch language.) 

 

1 – Le plus attendu

PAUL NEWMAN – LA VIE EXTRAORDINAIRE D’UN HOMME ORDINAIRE
Autobiographie fondée sur des entretiens et témoignages recueillis par Stewart Stern
Traduit par Serge Chauvin
Éditions La Table Ronde (24,50 €)
Novembre 2023

« Il était intègre. Il chérissait obstinément son intimité, et se sentait toujours emprunté quand il donnait une interview. Le simple fait que notre père ait pu envisager d’écrire le livre que vous avez entre les mains nous paraît profondément étrange, et pourtant, il poursuivit ce projet pendant cinq ans. Il l’avait conçu comme une offrande à sa descendance, et peut-être aussi comme un moyen de rétablir publiquement la vérité… »

Ces mots sont ceux de Melissa Newman, la fille cadette de Paul Newman et Joanne Woodward, qui a signé la préface de cette autobiographie passionnante. À partir de 1986, la star des mythiques Butch Cassidy et le Kid, Luke la main froide, La chatte sur un toit brûlant ou de L’Arnaque s’était livré, façon confession intime, à son ami Stewart Stern, fameux scénariste de la Fureur de vivre. Un temps, le projet de ce livre fut abandonné. La mort de l’icône puis celle de Stern auraient pu avoir raison de son existence. Mais la famille, aidée par la productrice et amie Emily Wachtel, a sorti des tiroirs tous ces précieux entretiens, ainsi que témoignages des proches réalisés à l’époque. À la limite de l’autoflagellation, hanté par le syndrome de l’imposteur à cause de sa beauté qui a amplement contribué à sa renommée et qu’il ressentait comme une malédiction, Paul Newman, l’un des acteurs les plus mystérieux au monde, et un peu oublié aussi, se révèle enfin. Un événement.

 

2 – Le plus aquaboniste

ET MOI, ET MOI, ET MOI
Jacques Dutronc
Éditions le cherche midi (18,90 €)
Novembre 2023

Insubmersible Dutronc, qui planqué sur sa planète corse, se rappelle de temps en temps au bon souvenir du public. Après la tournée avec son fils Thomas, achevée en décembre 2022, voici les mémoires tant attendues du plus désinvolte des chanteurs français, et acteur (plutôt bon) à l’occasion. D’ailleurs ici, les passages concernant le cinéma ne manquent pas de sel :

« Zulawski, il fallait presque se mettre en porte-jarretelles pour le séduire ; Maurice Pialat, pour le séduire, il fallait presque lui casser la gueule. » 

Sur Romy Schneider : « Elle ne jouait pas, jamais… Elle avait une telle force qu’il fallait être un colosse pour lui résister. Je me faisais l’effet d’être une Mini Cooper en face d’un 38 tonnes. » 

Derrière ces bons mots constants, reflets de l’intelligence et de la lucidité du trublion, pointent souvent de la tendresse, des regrets, et même un brin de nostalgie. Un régal !

 

3 – Le plus absurde

ZÉRO GRAVITÉ
Woody Allen
Editions Stock (22 €)
Août 2023

Woody Allen n’est plus en odeur de sainteté, mais il a toujours du talent et des bons mots en réserve. Trois ans après sa truculente autobiographie (voir critique) , il est revenu l’été dernier dans le paysage littéraire avec un recueil de nouvelles jubilatoires, dont certaines étaient parues dans le New Yorker entre 2008 et 2013. Un concentré d’absurde et d’humour, qui fera le bonheur de ses fans.

« Faisant montre d’un sang-froid impérial malgré la pression, je me fendis d’un rire décontracté qui ne fut pas sans évoquer le crissement du chat lorsque vous le passez à la déchiqueteuse. »

 

4 – Le plus engagé

DELPHINE SEYRIG
Coffret Blu-ray 6 films
Arte Éditions (45 € sur la boutique Arte, 59,99 prix Fnac)
Novembre 2023

Non Delphine Seyrig, disparue en 1990, n’a pas été que l’extravagante Fée des Lilas de Peau d’âne, même si ce personnage reste iconique, et pas que pour les cinéphiles (Ah ! sa fameuse façon de chanter « La situation mérite attention » …). Cette engagée dans la lutte féministe s’est souvent attachée, en tant qu’actrice, à camper des femmes peu représentées à l’écran.

2023 a vu la ressortie sur les écrans de ses films majeurs en versions restaurées 4K, aujourd’hui disponibles en Blu-ray. Le coffret rassemble ainsi La Musica (1967) de Marguerite Duras et Paul Seban ; Les lèvres rouges (1971) de Harry Kümel ; Le jardin qui bascule (1975) de Guy Gilles ; Aloïse (1975) de Liliane de Kermadec, Jeanne Dielman 23, Quai du Commerce, 1080 Bruxelles (1976) de Chantal Akerman, ainsi que Sois belle et tais-toi ! suivi du moyen et du court-métrage Maso et Miso vont en bateau, et S.C.U.M. Manifesto, tous trois réalisés par Seyrig et le collectif Les Insoumises en 1976. Cinq heures de suppléments enrichissent cette magistrale édition, élaborée en partenariat avec la Cinémathèque française.

DELPHINE SEYRIG – UNE VIE
Mireille Brangé
Éditions Nouveau Monde (10,90 €)
Octobre 2023 (Première édition 2018)

Pour compléter le coffret, on peut se procurer cette réédition du livre de Mireille Brangé en format poche (on le trouve aussi broché). Professeur de littérature générale et comparée à Paris XIII, l’auteur, spécialiste du rapport entre écrivains et cinéma, brosse un portrait très complet de celle qui fut l’égérie de Resnais, admirée par Truffaut et Duras, et qui a tant cherché à échapper à son image.

« On la croit sophistiquée, et ses goûts élitistes : on découvre en s’approchant qu’elle aime le rock, la musique pop, est intarissable sur les protest-singers et les chansons populaires des années 30 qu’elle connaît par cœur. »

 

5 – Le plus dévergondé

WHAT’S NEW PUSSYCAT? (Quoi de neuf, Pussycat ?)
Combo Blu-ray + DVD
Rimini Éditions (24,99 €)
Novembre 2023

Si elle tient davantage de la curiosité que du chef-d’œuvre, cette comédie totalement loufoque, foutraque et débridée réalisée en 1965 par Clive Donner se doit être dans toute bonne vidéothèque. Il s’agit en effet du premier film écrit par Woody Allen (et sa première apparition à l’écran) et de la première musique composée en solo pour le cinéma par le génial Burt Bacharach (La chanson-titre, interprétée par Tom Jones, fera un tube). Cette œuvre pop, totalement dans l’air de son temps — en pleine révolution culturelle et sexuelle –, est également entrée dans les annales grâce à sa distribution : Peter O’Toole, Peter Sellers, Romy Schneider, Ursula Andress, Capucine, Paula Prentiss… À l’origine, ce film sur les déboires d’un séducteur était un projet de Warren Beatty, qui devait même incarner le personnage de Peter O’Toole, avant d’être évincé par son partenaire de production ! L’édition est enrichie d’une interview du génial Peter Sellers et d’une présentation pertinente de Philippe Guedj qui parle de What’s New Pussycat? comme d’une « capsule temporelle pleine de joie de vivre, et qui illustre le chaos dans lequel il a été créé. »

 

6 – Le plus insoumis

BETTE DAVIS : FATIGUÉE D’ÊTRE MOI
Anne-Capucine Blot
Capricci Stories (11,50)
Juin 2023

À cause de ses choix de rôles complexes et souvent ingrats, Bette Davis reste la plus étonnante des icônes américaines. En juillet 2023, le festival de La Rochelle lui a rendu hommage via une rétrospective de ses rôles les plus marquants. Parallèlement, Anne-Capucine Blot, habilleuse de cinéma et collaboratrice de la revue Brefcinéma, a signé ce joli essai, mettant en exergue les épisodes les plus significatifs de sa vie tumultueuse. Forcément, on aime.

 

7– Le plus culte

AMERICAN GRAFFITI 4K ULTRA HD
Édition limitée Steelbook 50ème anniversaire
Universal Pictures France (24,99 €)
Novembre 2023

On ne se lasse pas de redécouvrir le petit bijou réalisé en 1973 par George Lucas, film emblématique de la jeunesse américaine du début des 60’s, doté d’une bande originale décoiffante. On y trouve un nouvel étalonnage des couleurs (on déplore cependant l’absence du grain d’origine), un DTS-HD Master Audio 5.1 percutant en version originale, et des suppléments pour la plupart déjà au menu des éditions précédentes : commentaire audio du réalisateur, essais des acteurs, making of de Laurent Bouzereau ainsi qu’une featurette inédite.

 

8 – Le plus girly

GRACE KELLY – L’UNIVERS ILLUSTRÉ D’UNE ICÔNE DE LA MODE
Megan Hess
Editions L’imprévu (22 €)
Octobre 2023

Après Audrey Hepburn et Marilyn Monroe, la célèbre dessinatrice américaine Megan Hess se penche sur l’itinéraire de celle qui fut l’égérie d’Alfred Hitchcock avant de devenir princesse. Comme toujours, c’est glamour, chic et sublime. L’ouvrage existe également dans sa version originale américaine, encore plus raffinée.

 

9 – Le plus nostalgique

DES MOMENTS DE CINÉMA
François Guérif
Éditions La Grange Batelière (22€)
Avril 2023

Le spécialiste du polar, créateur de la collection Rivages/Noir et cinéphile averti (on lui doit des ouvrages de référence sur Clint Eastwood ou Steve McQueen) a réuni ici des interviews effectuées dans les années 1980 et 1990, à l’âge d’or de la VHS. On peut y savourer cinquante entretiens, de longueur inégale, réalisés à la faveur de sorties cinéma, en salles ou en vidéo. D’Isabelle Adjani à Francis Ford Coppola en passant par François Truffaut, Michel Audiard ou Ennio Morricone, ce sont des témoignages sur le 7ème art pertinents et parfois inattendus.

À Brigitte Lahaie : 

« Que pensez-vous de la phrase de Godard : “Avant on avait appris à filmer au-dessus de la ceinture. Nous aurions dû apprendre à filmer au-dessous ?”
– C’est une phrase que je vais apprendre et garder pour mes futures interviews. Je la trouve très juste. »

À Lino Ventura :

« Y a-t-il un film que vous regrettez ne pas avoir tourné ?
– Ça m’est arrivé d’y penser, mais je ne m’en souviens plus. Ah si, le dernier, c’était
Les choses de la vie. »

 

10 – Le plus monumental

LE CINÉMA D’AGNÈS VARDA – Longs et courts
Coffret 14 DVD
Arte Éditions (60 €)
Octobre 2023

2023, c’était l’année Delphine Seyrig, mais aussi Agnès Varda, célébrée par la Cinémathèque française dans une exposition toujours en cours (elle s’achèvera le 28 janvier 2024), accompagnée de rediffusions des films sur Arte, de DVD et d’un vinyle.

Record battu pour ce coffret imposant et exhaustif, qui revient sur l’œuvre de la réalisatrice pionnière disparue en 2019, qui a inspiré des générations de cinéastes. Onze longs-métrages — incluant les fameux Cléo de 5 à 7 ou Sans toit ni loi — et seize courts, sont ici réunis, enrichis de suppléments tout aussi imposants (8h), dont une éblouissante leçon de cinéma par Agnès Varda elle-même (2h).

VIVA VARDA !
Collection Ecoutez le cinéma ! (21,99 €)
Septembre 2023

Pour enrichir l’expérience, découvrez cet album vinyle consacrée à la musique et chansons des films d’Agnès Varda. On y retrouve des compositions de Michel Legrand, la voix envoutante de Corinne Marchand, mais aussi l’hommage de Vincent Delerm, « La vie Varda ».

 

11 – Le plus fondamental

RÉTROSPECTIVE DOUGLAS SIRK, LES MÉLODRAMES ALLEMANDS
Coffret Blu-ray édité par Capricci (61,20 €)
Octobre 2023

On connaît mieux la période américaine du réalisateur de Ce que le ciel permet, Le secret magnifique ou Le mirage de la vie. Moins sa période allemande, la première. Ce coffret Blu-ray propose de redécouvrir sept mélodrames de Douglas Sirk qui se nommait encore Hans Detlef Sierck, tournés dans son pays d’origine entre 1935 et 1937. Restaurés en 2K ou 4K par la Fondation Murnau, ces premiers chefs-d’œuvre du génial cinéaste sont assortis de trois courts-métrages inédits de Sirk et d’un livret de 48 pages.

 

12 – Le plus enthousiaste

CINÉMA SPÉCULATIONS
Quentin Tarantino
Editions Flammarion (25 €)
Mars 2023

Quentin Tarantino rend hommage au cinéma qu’il aime à la manière d’un Peter Biskind. Avec sa verve et sa propension à déplacer les montagnes, cet admirateur de la critique Pauline Kael s’attarde sur le Nouvel Hollywood, les Movie Brats que sont Scorsese, Coppola, Spielberg etc. et évoque ses films culte, dont Bullitt, de Peter Yates, Guet-Apens de Sam Peckinpah, Delivrance de John Boorman, Sœurs de sang de Brian De Palma ou L’évadé d’Alcatraz de Don Siegel. Tout comme ses anecdotes, ses portraits d’acteurs et réalisateurs sont truculents :

« Et puis il y a Steve McQueen dans le rôle de Frank Bullitt… Rarement, dans toute l’histoire de Hollywood, les stars de cinéma étant ce qu’elles sont, une star de ciné en a fait si peu pour un résultat si grandiose, comme McQueen avec ce rôle dans ce film. Il ne fait pratiquement rien, mais personne dans l’histoire du cinéma n’a fait rien à la manière de Steve McQueen. »

 

On peut également faire un petit tour sur le site de la Boutique des Cahiers du Cinéma, où les livres et hors-séries sont proposés à des prix attractifs.

 

 

 

 

 

 

 

 

Et joyeux Noël !