THE HOST

Surprise venue de la Corée du Sud, cette formidable comédie d’horreur concoctée par Bong Joon-ho, le réalisateur de Memories Of Murder, Mother et Snowpiercer – Le transperceneige, avait fait l’unanimité en 2006.

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The Host
Bong Joon-ho
2006 (TF1 Vidéo)

A Séoul, au bord de la rivière Han, vit la famille de Hee-bong, propriétaire d’un snack. Un jour une créature non identifiée surgit des eaux et enlève la petite fille de Hee-bong. Toute la famille se mobilise pour affronter le monstre…

Révélé en 2004 grâce à l’étonnant Memories Of Murder, le cinéaste coréen Bong Joon-ho avait de nouveau suscité l’enthousiasme en 2006 avec cette comédie d’horreur extravagante, imaginée lorsqu’il était au lycée. Le cinéaste a confié avoir été influencé par l’histoire du scandale McFarland (l’entrepreneur de pompes funèbres travaillant pour les forces américaines basées en Corée aurait ordonné en 2000 le déversement de formaldéhyde dans la rivière Han) et Signes de M. Night Shyamalan (pour l’aspect familial). Mais si The Host possède les ingrédients et l’efficacité du « film de monstre », tendance Godzilla, il est également un film politique à part entière. Les situations loufoques et l’humour omniprésent ne masquent en rien le regard sans concession que Bong Joon-ho porte sur la société coréenne, qui oublie les démunis et tolère un peu trop la présence de l’armée américaine. Cette même armée cherche d’ailleurs ici moins à combattre le monstre qu’à mentir à la population, et n’hésite pas à avoir recours à un remède plus nocif que le mal lui-même. Ce film foisonnant exhale en outre une vraie poésie, lorsqu’il se penche sur la famille Park, petite équipe de bras cassés, soudés par l’amour qu’ils portent à la petite Hyun-seo (Ko Ha-sung, future héroïne de Snowpiercer – Le transperceneige, du même cinéaste), et destinés malgré eux à devenir des héros.

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Chronique rédigée pour fnac.com en 2007

LES BERKMAN SE SÉPARENT (The Squid And The Whale)

A l’occasion de la sortie de Frances Ha, retour sur l’autre film remarquable de Noah Baumbach, nominé à l’Oscar du Meilleur scénario en 2006…

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 Les Berkman se séparent

Noah Baumbach
2005 (DVD Sony Pictures Entertainment)

Dans les années 80, à Brooklyn, deux intellectuels, Bernard (Jeff Daniels), écrivain de talent en mal de succès, et Joan (Laura Linney), dont la prose est en passe de devenir célèbre, décident de divorcer après dix-sept ans de mariage. Pour leurs deux garçons, de douze et seize ans, cette nouvelle a l’effet d’un cataclysme, d’autant que leur père, terriblement amer, ne parvient pas à dissimuler le ressentiment que sa femme lui inspire…

Les Berkman se séparent est le premier des trois longs-métrages de Noah Baumbach (coscénariste de La vie aquatique de Wes Anderson, producteur ici) à paraître en France. L’intrigant titre original, The Squid And The Whale (le calmar et la baleine), prend tout son sens à la lecture du film, peinture à la fois sensible et impitoyable d’une famille d’intellectuels de Brooklyn déchirée par le divorce. Grâce à une multitude de détails criants de vérité, et aux interprètes d’une grande justesse, Noah Baumbach livre un film viscéral, troublant d’authenticité et d’intelligence. Lui-même fils d’intellectuels de Brooklyn (son père est l’écrivain et critique de cinéma Jonathan Baumbach), le réalisateur exorcise les démons de son passé tout en créant une œuvre d’art à part entière. Outre la difficulté d’être parent et l’impact du divorce sur les enfants, il montre comment un discours ultra intellectualisé et rationalisé peut nuire à la communication entre les êtres et devenir destructeur. Pour mieux restituer les ambiances et l’esthétique de l’époque, Noah Baumbach a tourné en Super 16, et l’image est ainsi dotée d’un grain très flatteur. Salué unanimement par la critique, acclamé au festival de Sundance 2005, Les Berkman se séparent a reçu une nomination à l’Oscar du Meilleur scénario en 2006.

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Chronique rédigée pour fnac.com en 2007

 

LE LABYRINTHE DE PAN

Parabole à peine déguisée du fascisme, le conte fantastique noir et envoûtant de Guillermo del Toro avait remporté trois Oscars techniques en 2007. Attention, on peut ne pas en sortir indemne !

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Le labyrinthe de Pan (El Laberinto Del Fauno)
Guillermo del Toro
2006

En 1944 en Espagne, la jeune Ofelia (Ivana Baquero) arrive avec sa mère enceinte dans la petite garnison commandée par son beau-père Vidal, capitaine franquiste autoritaire et brutal (Sergi Lopez, terrifiant…). Près de la maison, elle découvre un étrange labyrinthe, gardé par un faune. La créature magique lui révèle qu’elle est la princesse d’un royaume enchanté. Mais pour y pénétrer, Ofelia devra abandonner sa condition de mortelle en se soumettant à trois épreuves…

Imaginé en partie dès la réalisation, en 2001, de L’Echine du Diable, Le labyrinthe de Pan, parabole du fascisme, renoue avec le thème de la guerre civile espagnole. Comme ses compatriotes mexicains, Guillermo del Toro a été marqué par le franquisme (le Mexique a servi de refuge à bon nombre de réfractaires au régime). Le cinéaste va droit au but. Les tortures et les exécutions sommaires sont les jeux favoris du capitaine Vidal, sociopathe aussi sadique que brutal. Pour échapper à l’horreur qui l’entoure, Ofelia se réfugie dans l’imaginaire d’un conte de fées auquel elle croit de toutes ses forces, bien qu’il recèle, lui aussi, sa part de monstruosité. Guillermo del Toro juxtapose de manière ingénieuse les deux univers, où s’affrontent brutalité et innocence. Artisan surdoué du cinéma fantastique et d’horreur (on lui doit Cronos, Mimic, Blade II ou Hellboy et Pacific Rim), le cinéaste parvient à insuffler de la beauté et du merveilleux (les visuels sont époustouflants) dans une fable pour adultes, immensément sombre et cruelle. Trois Oscars (photo, maquillages, décors) ont rendu en 2007 hommage à cette magnifique œuvre noire, ambitieuse et dérangeante. Pour spectateurs avertis.

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Chronique rédigée pour fnac.com en 2007