PANIQUE À NEEDLE PARK/LA FALAISE MYSTÉRIEUSE

Deux sublimes éditions Blu-ray sont parues au début de l’été pour rendre hommage à deux films remarquables, méconnus ou quasi-invisibles : Panique à Needle Park, de Jerry Schatzberg, et La falaise mystérieuse, de Lewis Allen. Et non seulement ils ont bénéficié d’une restauration magnifique, mais ils sont enrichis de suppléments passionnants.

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« Le talent ne s’explique pas. C’est de la magie à l’état pur. » Jerry Schatzberg à propos d’Al Pacino

 

 Panique à Needle Park (The Panic In Needle Park)

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Jerry Schatzberg
1971
En coffret Ultra Collector Blu-ray (+2  DVD + Livre de 200 pages) chez Carlotta depuis le 22 juin 2016

Lorsque Bobby (Al Pacino) rencontre Helen (Kitty Winn), jeune fille du Midwest un peu paumée dans New York, elle vient d’avorter. A la sortie de l’hôpital, il l’attend et lui fait son numéro de charme. Entre eux, c’est le coup de foudre. Bobby propose à Helen de s’installer avec lui dans un hôtel minable du nord-est de Manhattan, à proximité du Sherman Square, surnommé Needle Park à cause des héroïnomanes qui y pullulent. Car Bobby est toxicomane et dealer. Pour se rapprocher de lui, Helen va se laisser tenter, et basculer bientôt dans l’enfer de la dépendance…

Plus d’une décennie après le Shadows de Cassavetes, qui avait fait souffler un vent de liberté sur le cinéma américain, Panique à Needle Park retrouvait cette même autonomie formelle en privilégiant un naturalisme proche du documentaire, accentué par l’absence totale de musique. Il s’agit du deuxième long-métrage du brillant photographe Jerry Schatzberg, réputé pour ses photos de mode (dans Vogue notamment) et ses clichés de célébrités, dont il avait d’ailleurs un an auparavant fait le sujet de son premier film, Portrait d’une enfant déchue (Puzzle Of A Dawnfall Child). Ecrit par Joan Didion et son époux John Gregory Dunn, le scénario était inspiré d’un livre de James Mills, d’après ses propres articles publiés dans Life. Le film catapulte dans le quotidien des toxicomanes, sans voyeurisme, avec honnêteté, humanité et compassion. Pour la première fois dans une fiction, les séquences de shoot sont frontales, et la caméra se rapproche des aiguilles qui percent les veines. Il y a une réelle volonté pédagogique dans la manière avec laquelle le cinéaste aborde cette histoire d’amour où la drogue dicte la conduite des personnages et les amène à se trahir (comme dans le futur Requiem For A dream). Mais Panique… est aussi un portrait vibrant du New York des seventies, et comme Cassavetes avant lui, Schatzberg parvient admirablement à saisir l’air du temps, la respiration de la ville et de ses habitants (un aspect cinéma vérité obtenu en suivant les acteurs au téléobjectif dans la rue pour leur laisser une plus grande part de liberté et d’improvisation). L’œuvre, très emblématique du cinéma américain des années 70, est aussi mémorable pour être le premier film marquant d’Al Pacino, que Schatzberg a imposé au studio après l’avoir vu jouer sur les planches. Son génie du jeu est déjà manifeste ici, dans les attitudes espiègles de ce personnage qu’il rend immensément attachant. C’est pourtant sa partenaire, Kitty Winn, qui remportera le Prix d’interprétation à Cannes (selon le cinéaste, sa présence au festival lui aurait valu la préférence à un Al Pacino resté au pays). Une récompense méritée tant la performance de l’actrice est éblouissante (Kitty Winn fera par la suite de rares apparitions au cinéma, privilégiant le théâtre). La prestation d’Al Pacino lui vaudra l’année suivante d’être le Michael Correone du Parrain, qui lancera définitivement sa carrière. L’acteur retrouvera Jerry Schatzberg pour L’épouvantail, Palme d’or de Cannes 1973.
1h 50 Et avec Raul Julia, Richard Bright, Alan Vint, Kiel Martin, Michael McClanahan…

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Test Ultra Collector Blu-ray  (des éditions Blu-ray et DVD simples sont également disponibles)

3D COFFRET ULTRA COLLECTOR PANIQUE ∑ NEEDLE PARK OUVERT DEF

Interactivité ****
Cinq scènes clés sont commentées par le réalisateur, qui revient aussi sur ses débuts, ses souvenirs de tournage et sa rencontre avec Al Pacino, dans un entretien passionnant découpé en quatre chapitres. On y apprend notamment que pour convaincre la Paramount d’engager Al Pacino pour Le Parrain, Coppola et Schatzberg avaient concocté un petit clip de toutes ses meilleures scènes dans Panique à Needle Park. La bande-annonce d’époque (en HD) complète le programme. Le coffret très joliment illustré par un visuel créé par le studio londonien Telegramme comprend également un livre de 200 pages, avec 50 photos inédites. Intitulé La vie sur grand écran, il propose des entretiens (avec Pierre Rissient, la scénariste Joan Didion, le chef opérateur Adam Holender et Jerry Schatzberg), ainsi que des articles de Positif, des extraits du scénario original etc.

Image ****
Format : 1.85
Supervisée par le cinéaste, la restauration 2K a fait des miracles. Le film, invisible depuis longtemps dans des conditions décentes, retrouve ses couleurs et sa luminosité, et reste très fidèle à la photographie d’origine. Le grain présent rend plus palpable encore l’ambiance de ce New York des seventies.

Son ***
DTS-HD Master Audio 1.0 en anglais sous-titré et français
Très bien nettoyée, la piste sonore est claire, sans parasite. Les dialogues comme les bruits de la rue sont parfaitement restitués.

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Carlotta a édité à la même date en Blu-ray et DVD, Mad Love In New York, réalisé en 2014 par les frères Josh et Benny Sadfie. Inspiré de l’histoire vraie d’Arielle Holmes, actrice principale du film, cette œuvre choc issue de la scène indépendante new-yorkaise, fait écho à Panique à Needle Park.

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« You made that up ?
– Yes.
– But you must be brillant.
– Oh, dazzling. People have to wear sunglasses. »
 

 La falaise mystérieuse (The Uninvited)

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Lewis Allen
1944
En Combo Blu-ray (+ DVD + Livre) chez Wild Side Video depuis le 1er juin 2016

En vacances dans les Cornouailles, le musicien Roderick Fitzgerald (Ray Milland) et sa sœur Pamela (Ruth Hussey) ont un coup de foudre pour une belle demeure inhabitée, qui surplombe la mer depuis une falaise abrupte. Au village, le propriétaire (Donald Crisp), un vieil homme qui vit avec sa ravissante petite-fille de vingt ans, Stella (Gail Russell), leur vend la maison pour une somme dérisoire. Mais à peine ont-ils emménagé que leur sommeil est troublé par d’étranges sanglots de femme. Ils découvrent que la demeure a la réputation d’être hantée par la précédente propriétaire, morte tragiquement en se jetant de la falaise…

Wild Side Video a joliment exhumé ce film méconnu de l’âge d’or d’Hollywood, premier long-métrage du cinéaste d’origine britannique Lewis Allen, qui a la singularité d’aborder l’épouvante gothique et romantique avec une légèreté détonnante. Très proche du Rebecca d’Hitchcock et de L’aventure de Madame Muir de Mankiewicz, La falaise mystérieuse, adapté d’un roman de Dorothy Macardle, se distingue en ne versant jamais réellement dans l’horreur. On y parle de fantômes, mais surtout de psychanalyse, et le film s’attache à une certaine rigueur scientifique, celle de son personnage principal, joué par Ray Milland, qui n’a de cesse de désamorcer la tension dans les moments effrayants. Les échanges espiègles entre Ray Milland et Ruth Hussey rappellent ceux de William Powell et Myrna Loy, et la romance entre Roderick et la jeune Stella (adorable Gail Russell) est tout à fait charmante. Il y a un vrai contraste entre le drame complexe à l’origine du mystère, et la désinvolture avec laquelle Roderick joue les détectives. Visuellement en revanche, le film respecte les codes du genre, et les aspects fantastiques sont admirablement mis en valeur. La réalisation de Lewis Allen se révèle aussi remarquable que la photo du célèbre chef-opérateur Charles Lang (auquel on doit également celles de L’aventure de Madame Muir et Peter Ibbetson). Le mélange des genres a dérouté les amateurs de cinéma fantastique de l’époque, ce qui explique que le film soit tombé dans l’oubli. Redécouvert depuis peu par les cinéphiles, ce petit bijou mérite indéniablement le détour. Et si la musique de Victor Young est envoûtante, on notera que c’est pour cette histoire de maison hantée qu’il a composé « Stella By Starlight » (joué au piano par le personnage incarné par Ray Milland), devenu par la suite un standard de jazz qui figurera, entre autres, aux répertoires de Miles Davis, Chet Baker, Frank Sinatra ou Ella Fitzgerald.
1h 39 Et avec Cornelia Otis Skinner, Dorothy Stickney, Barbara Everest, Alan Napier, Lynda Gray…

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Test Combo Blu-ray :  

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Interactivité ****
Le Blu-ray est enrichi d’une interview passionnée et très pertinente de 50 minutes du réalisateur Christophe Gans, spécialiste du cinéma de genre, et manifestement amoureux du film. Dans le livre truffé de photos, illustrations et affiches, qui sert d’écrin aux deux galettes (Blu-ray et DVD), Patrick Brion revient lui aussi, mais plus brièvement, sur le film.

Image ***
Format : 1.37
Le master émanant probablement de la restauration 2K qu’on a pu découvrir dans l’édition Criterion parue en octobre 2013 se révèle d’une définition le plus souvent remarquable. La lumière est éclatante, les noirs sont superbes.

Son ***
DTS-HD Master Audio 2.0 en anglais sous-titré et français
Une piste 2.0 claire et dynamique, plus équilibrée en version originale.

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