FAMILIES LIKE OURS

Et si la situation s’inversait ? Si, à cause du changement climatique, les populations des pays les plus favorisés subissaient à leur tour le sort des migrants. Devenaient persona non grata dans les pays avoisinants, soumises aux quotas, aux visas et aux permis de travail ? C’est ce qu’a imaginé le Danois Thomas Vinterberg, cofondateur du Dogme 95 et cinéaste des remarquables Festen, La Chasse ou Drunk. C’est réaliste, émouvant et terriblement humain.

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When the day is done
Down to Earth then sinks the sun
Along with everything that was lost and won
When the day is done

(Nick Drake 1969) 

 

FAMILIES LIKE OURS (Familier Som Vores)

2025
Mini-série créée et réalisée par Thomas Vinterberg
Disponible depuis le 6 janvier sur Canal+

Au cours de l’été, face à la montée inexorable du niveau de la mer, le gouvernement danois annonce la prochaine évacuation du pays. La population est abasourdie. À Copenhague, Jacob (Nikolaj Lie Kaas), architecte aisé et père de deux enfants, découvre que sa belle maison ne vaut plus rien. Quant à sa fille aînée Laura (Amaryllis April Maltha August), qui s’apprête à passer le bac et vient de tomber amoureuse, elle voit son avenir tout à coup s’obscurcir…

« Day Is Done », la déchirante ballade de Nick Drake, hante la série, lui conférant à la fois un caractère tragique et une magnifique mélancolie. Ne pas s’attendre à des images spectaculaires, ni à des effets spéciaux façon Roland Emmerich. Pour filmer les aventures de ses personnages (tous gravitant autour de la même famille) confrontés à des événements déstabilisants, Thomas Vinterberg reste toujours à hauteur d’homme. Curieusement, alors que la crise climatique est de plus en plus préoccupante, elle n’est que le point de départ de la série. L’ambition du cinéaste était d’évoquer la perte de repères, le sentiment de déracinement, celui-là même qu’il avait ressenti un matin alors qu’il séjournait à Paris. Avec l’intensification des phénomènes climatiques, le scénario dont il avait commencé l’écriture il y a sept ans s’est révélé de plus en plus pertinent et en phase avec les enjeux contemporains. Moins politique que Years And Years, la remarquable dystopie de Russell T. Davies, Families Like Ours s’attarde davantage sur les drames intimes qui agitent cette petite communauté alors que le pays se vide à vitesse grand V. Plus de lycées, de banques, d’entreprises, de transports… Les Danois doivent prendre leur destin en mains et recommencer de zéro. La solidarité est mise à l’épreuve et il leur faut impérativement décrocher le Graal : un pays d’accueil. L’histoire de tous les réfugiés en somme, mais rien n’avait préparé ces privilégiés à devenir si vite les parias de l’Europe. Certains choix sont cruels. Ceux de Laura, la jeune et courageuse héroïne de la série — difficile de ne pas y voir, de la part de Thomas Vinterberg, un hommage à sa fille de dix-neuf printemps, disparue cinq années plus tôt dans un accident de la route —, s’avèrent imprudents voire déraisonnables. Ils vont avoir des conséquences terribles. Si le réalisme prévaut, avec une touche de cruauté parfois, le réalisateur ne s’interdit pas de flirter avec le mélo, ni même avec le fantastique. Très investis, les comédiens font vibrer cette mini-série oppressante, et surtout, jusqu’au bout, formidablement émouvante.
7 épisodes de 52 minutes. Et avec Albert Rudbeck Lindhardt, Magnus Millang, Paprika Steen, Esben Smed, Helene Reingaard Neumann (Madame Vinterberg à la ville), Asta Kamma August, Thomas Bo Larsen…

 

 

OCTOBRE la mini-série


« Bonhomme en marrons, viens, entre donc… »

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OCTOBRE (The Chestnut Man)

Mini-série danoise en six épisodes créée en 2021 par Dorte Warnøe Høgh, David Sandreuter, Mikkel Serup et Søren Sveistrup
Diffusée sur Netflix depuis le 29 septembre

Dans un jardin public de Copenhague, on découvre le cadavre d’une mère de famille atrocement assassinée et mutilée. Sur la scène de crime, a été disposé un petit bonhomme en marrons sur lequel la police scientifique découvre l’empreinte de la fille de la ministre des affaires sociales, enlevée un an auparavant et présumée morte. Quelques jours après, une autre femme subit le même sort. À ses côtés, une figurine identique…

Le Danemark, ses forêts, ses couleurs automnales, ses traditions folkloriques et sa comptine populaire donnent le ton, particulièrement macabre et angoissant, à ce thriller fort bien ficelé. Parmi ses créateurs, on trouve Søren Sveistrup, auteur de la fameuse série The Killing, qui a ici adapté son propre roman (paru chez Albin Michel en 2019). Truffé de chausse-trappes et d’énigmes, Octobre est servie par d’excellents comédiens, dont Mikkel Boe Føksgaard, remarquable dans Royal Affair aux côtés de Mads Mikkelsen, et qui campe ici un agent d’Interpol ténébreux et attachant. À ses côtés, Danica Curcic fait une inspectrice très convaincante, rongée par son boulot de flic qui l’empêche d’être une mère pour sa fille. La complexité des personnages, tous parfaitement exploités, confère une vraie densité à ces épisodes tendus, réalistes, au suspense haletant. Octobre se distingue également par sa mise en scène astucieuse et sa photographie, très léchée. Sur fond de tragédie sociale, cette plongée dans la noirceur et l’horreur laisse malgré tout filtrer une belle humanité, celle que véhiculent ses deux héros fracassés, justiciers quoi qu’il en coûte.
Et avec David Dencik, Iben Dorner, Esben Dalgaard Andersen, Lars Ranthe, Anders Hove…