HAPPY VALLEY

Après Broadchurch, Glue, The Fall, Southcliffe, Tunnel et autres, on pouvait se demander en quoi Happy Valley pouvait éclairer d’un nouveau jour le paysage de la série policière britannique. Comme quoi les petites anglaises ont vraiment du génie, car la série créée par Sally Wainwright ne ressemble qu’à elle, et est remarquable en tous points. Ces six épisodes intenses qui scotchent au fauteuil révèlent en outre une comédienne épatante, bouleversante et ultra-attachante. Reconduite pour une deuxième saison, Happy Valley vient de paraître en DVD. Que du bonheur !

 

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« I’m Catherine by the way. I’m forty-seven. I’m divorced. I live with my sister, who’s a recovering heroin addict. I’ve two grown-up children – one dead, one who don’t speak to me – and a grandson. So. »

 

Happy Valley

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Série britannique créée par Sally Wainwright
Diffusée pour la première fois en avril 2014 sur BBC One (en France sur Canal+ depuis le 31 août 2015) Saison 1 disponible chez Koba Films depuis le 7 octobre 2015

Catherine Cawood (Sarah Lancashire) est officier de police dans une petite ville du Yorkshire, au nord de l’Angleterre, une région gangrenée par la délinquance. Son couple et sa vie ont explosé après le suicide de sa fille, victime d’un viol, et qui lui a laissé un enfant sur les bras. Lorsqu’elle découvre que le violeur (James Norton), jamais condamné pour son crime, est sorti de la prison où il était incarcéré pour trafic de drogue, le sang de Catherine ne fait qu’un tour. Elle ignore encore qu’il est lié à l’affaire d’enlèvement qui mobilise la police locale depuis quelques jours…

Sally Wainwright, scénariste et créatrice du show (déjà responsable de Last Tango In Halifax) a révélé dans une récente interview que le titre de la série n’était pas seulement ironique, c’est véritablement ainsi qu’est surnommée, par la police, cette région du West Yorkshire (jolie au demeurant) où le crime et le trafic de drogue font des ravages. Dans la petite ville, proche d’Halifax, où se déroule l’intrigue, les effets de la crise sont palpables, et c’est bien le besoin d’argent et la frustration qui vont motiver un comptable tranquille à se venger de son patron, en planifiant l’enlèvement de la fille de ce dernier contre une rançon. Il était loin d’imaginer qu’en confiant cette idée à un escroc local, les choses allaient lui échapper et dégénérer de telle manière. D’entrée, on est frappé par le caractère authentique de la série, dont les protagonistes, qu’ils soient du bon ou du mauvais côté de la loi, sont des individus ordinaires, pas moins inintéressants pour autant, et tous interprétés par des comédiens d’une justesse sidérante. Si la performance de James Norton (à l’opposé du gentil et séduisant pasteur qu’il incarne dans Grantchester) glace le sang, celle de Sarah Lancashire, inconnue chez nous, force l’admiration. Elle est l’âme et le cœur de ce polar social intense, humain et passionnant, réelle réussite en termes de dramaturgie, de psychologie, de suspense et d’interprétation. La brutalité et la violence de certaines scènes ont suscité quelques critiques, mais Sally Wainwright assume totalement ses partis pris, essentiels pour le réalisme de la série. Encensée outre-Manche où elle a remporté en 2015, entre autres récompenses, le BAFTA de la meilleure série dramatique (damant le pion à la très branchée Peaky Blinders), Happy Valley a été reconduite pour une deuxième saison. Ne passez pas à côté !
Et avec George Costigan, Charlie Murphy, Siobhan Finneran, Joe Armstrong, Steve Pemberton, Adam Long…

BANDE-ANNONCE

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Test DVD :

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Interactivité
Les six épisodes de 60 minutes ne bénéficient hélas d’aucun supplément autre que des bandes-annonces de l’éditeur.

Image ***
Format : 1.78
Belle définition pour cette image qui met en valeur la lumière voilée, les couleurs automnales et le climat pluvieux de cette région du Yorkshire.

Son ***
DD 2.0 en anglais sous-titré et français
Sous titres français non imposés
Une piste 2.0 parfaite pour ce polar social, qui prend même de la vigueur lors du générique illustré par la chanson « Trouble Town » de Jake Bugg. Pour une meilleure immersion, la version originale est à privilégier.

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SICARIO

Jusqu’où peut aller un gouvernement pour combattre le mal ? C’est la question que pose le thriller d’action de Denis Villeneuve, événement cinéma de l’automne, même s’il a fait chou blanc à Cannes, en mai dernier. Le cinéaste canadien, dont la cote a monté en flèche après le très atmosphérique Prisoners entraîne dans l’enfer de la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, zone de non-droit régie par les cartels de la drogue. Mise en scène efficace, scènes de bravoure à couper le souffle… Côté formel, Denis Villeneuve chasse sur les terres de Kathryn Bigelow, mais cette démonstration de force lui permet surtout de parler de morale, d’éthique et de la frontière entre le bien et le mal, ici personnifiés par une agent du FBI idéaliste et un consultant au service du gouvernement, au passé et intentions troubles. Un rôle ambigu, incarné par un Benicio Del Toro impérial.

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« You’re asking me how the watch is made. For now, just keep your eye on the time. » 

 

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Denis Villeneuve
2015 (projeté en compétition au festival de Cannes 2015 et dans les salles françaises depuis le 7 octobre)

En Arizona, en recherchant des otages, une unité d’élite du FBI découvre de nombreux corps mutilés dans une maison appartenant à narcotrafiquant. Kate Macer (Emily Blunt), l’agent de terrain chargée de l’affaire, se voit aussitôt proposer d’intégrer une cellule d’intervention clandestine dirigée par la CIA et le ministère de la défense, afin d’arrêter le chef du cartel mexicain responsable des meurtres. Mais la jeune femme est vite désemparée par les méthodes de barbouzes du chef de l’opération, l’agent de la CIA Matt Graver (Josh Brolin) et par la personnalité trouble du consultant colombien qui l’accompagne (Benicio Del Toro), d’autant que les deux hommes prennent un malin plaisir à la laisser dans le brouillard…

« Sicario », comme expliqué en préambule de ce film, est l’équivalent de « sicaire » en français, un terme qui remonte à l’antiquité hébraïque et tombé en désuétude, qui signifie « tueur à gages ». Pour des raisons évidentes, il est revanche toujours en vigueur en Italie, au Mexique et en Colombie. Il est aussi au cœur du dilemme posé par le film de Denis Villeneuve. Peut-on, quand on est un représentant de la loi, s’allier avec des tueurs ? Doit-on combattre le mal par le mal, ou comme le souhaite Kate Macer, respecter la morale, coûte que coûte ? A l’idéalisme de la jeune femme, Matt Graver, incarné par un savoureux Josh Brolin, oppose un pragmatisme absolu : la fin justifie les moyens. Cet antagonisme crée une tension palpable entre ces personnages contraints pourtant de s’entendre pour survivre. C’est à travers les yeux de Kate, tenue constamment dans le flou, qu’on découvre l’enfer de Juarez, où la mort peut surgir à chaque coin de rue, ce qui vaut la plus belle des scènes de bravoure du film. La violence est sèche, radicale, mais la mise en scène impressionne autant que le thème anxiogène de la musique de l’Islandais Jóhann Jóhannsson qui accompagne chaque montée de tension (quelque peu inspiré du « Sense Of Doubt » de David Bowie…). Le chaos ambiant et le caractère hostile de cette région aride sont magnifiquement mis en valeur par la photographie solaire aux couleurs saturées de Roger Deakins, chef opérateur fétiche des frères Coen et déjà à l’œuvre sur Prisoners, qui confère au film, dont on doit le scénario à l’acteur Taylor Sheridan (vu dans Sons of Anarchy), des allures de western moderne. Visuellement, cette immersion dans les opérations de terrain rappelle beaucoup le travail de Kathryn Bigelow (dans Démineurs ou Zero Dark Thirty), laquelle s’embarrasse beaucoup moins de questions morales. C’est d’ailleurs peut-être le point faible du film, qui s’attarde un peu trop sur les questionnements de la naïve Kate, au risque de friser la caricature (la scène finale, elle-même, laisse un peu perplexe… ). Denis Villeneuve a du talent, des obsessions louables, mais parfois aussi des gros sabots. En matière de direction d’acteur en revanche, il excelle. Et plus que la prestation d’Emily Blunt, c’est celle de Benicio Del Toro qui fascine. Aux antipodes de son interprétation haute en couleurs de Pablo Escobar dans le récent Paradise Lost, l’acteur portoricain est ici extrêmement troublant en bête de guerre qui ne dévoile jamais son jeu. Rien que pour lui, le film vaut le détour.
Et avec Daniel Kaluuya, Victor Garber, Jon Berthal, Jeffrey Donovan..

BANDE-ANNONCE
PRISONERS : critique AFAP

 

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MÉMOIRES DE JEUNESSE (TESTAMENT OF YOUTH)

Adaptation poignante du célèbre roman autobiographique de la pacifiste Vera Brittain, Mémoires de jeunesse relate le destin brisé de quatre jeunes gens durant la Première Guerre mondiale. Un mélodrame passionné et humaniste, beau et tragique, qui met en exergue la fragilité de l’existence, la brutalité de la guerre et la force morale des femmes, témoins impuissants de la folie des hommes. En héroïne exaltée, et aussi têtue que Scarlett O’Hara, Alicia Vikander y est sensationnelle.

(Click on the planet above to switch language.) 

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« Notre génération ne sera plus jamais insouciante ou optimiste. » Vera Brittain

  

Mémoires de jeunesse (Testament Of Youth)

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James Kent
2014 (2h 10, dans les salles françaises depuis le 23 septembre 2015)

En 1914, dans la campagne anglaise, Vera Brittain (Alicia Vikander), jeune fille de bonne famille, rêve de devenir écrivain et essaie désespérément de convaincre ses parents conservateurs de la laisser tenter le concours d’admission à Oxford, où son frère Edward (Taron Egerton) est déjà étudiant. C’est ce dernier qui finira par convaincre son père lors d’un week-end où il a invité des amis de sa promotion. Vera tombe rapidement sous le charme de l’un d’entre eux, Roland Leighton (Kit Harington), un poète qui l’encourage vivement à écrire. Mais la guerre éclate…

Doté d’un titre plus pertinent en version originale (celui du roman) Mémoires de jeunesse n’a pas pour vocation de décrire les horreurs de la Première Guerre mondiale, mais plutôt de se pencher sur ses conséquences à travers l’expérience d’une jeune fille, mise à l’épreuve de manière particulièrement redoutable. Si le film s’attarde sur les scènes de bonheur d’avant-guerre, les promenades dans la campagne, les après-midi au bord du lac, les disputes, les colères, les premiers émois amoureux, c’est pour mieux renforcer l’effet de déchirement qui va suivre. Pour ces jeunes gens promis à un destin radieux, emportés comme des fétus de paille dans le tourbillon de l’histoire, c’est un monde qui va bientôt s’écrouler. L’image du film elle aussi s’assombrit tout en gagnant en nervosité, tandis qu’elle se resserre sur Vera. Les hommes partis au front, les femmes se rongent les sangs, alors que petit à petit, la réalité des horreurs leur explose au visage. Pour Vera, plus question de poésie. Il lui faut agir. Elle choisit d’endosser l’uniforme d’infirmière, d’abord pour soigner ceux qui reviennent, puis rejoint la France, afin d’être plus proche de ceux qu’elle aime. Là-bas, elle découvrira que du côté ennemi, la souffrance est la même, et que la jeunesse est tout aussi sacrifiée. Actrice douée et incontournable du moment, la Suédoise Alicia Vikander (Royal Affair, Ex Machina, Agents très spéciaux: Code U.N.C.L.E) offre ses traits gracieux et son regard buté à cette battante prête à soulever des montagnes et qui se fait un devoir de se relever de tout. Car c’est là le message de ce film moins académique que son titre, qui engage à faire face à l’impossible et s’adresse aux jeunes générations. Et si ce grand mélodrame humaniste bouleverse, il ne cède jamais au sentimentalisme et conserve la même dignité que son héroïne. Très fidèle à l’œuvre de Vera Brittain, s’inspirant non seulement de son roman Testament Of Youth mais également de ses journaux intimes et de sa correspondance, le film a suscité l’enthousiasme de Lady Shirley Williams, fille de l’écrivain et cofondatrice du parti social-démocrate britannique (membre actif de la Chambre des Lords jusqu’en 2004). Il bénéficie d’une mise en scène efficace de James Kent, réalisateur issu de la télévision anglaise, et qui signe ici son premier long-métrage, d’une photo sublime de Rob Hardy et d’une distribution de haute volée. Autour des chevronnés Dominic West, Emily Watson, Miranda Richardson ou Hayley Hatwell, on reconnaît l’exquis Colin Morgan (révélé par la série Merlin) et la coqueluche Kit Harington, délesté de ses fanfreluches de Jon Snow de Game Of Thrones, et dont la prestation se révèle bien plus qu’honorable. Ce film implacable hante longtemps après la projection.

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