TUNNEL

Top Of The Lake, Generation War, Tunnel, In The Flesh : les mini-séries qui ont tout des grandes ! (3/4)

Bataille d’ego

Tunnel (The Tunnel)
 The Tunnel

Série franco-britannique créée par Ben Richards et Dominik Moll

2013 (1ère diffusion novembre 2013 sur Canal+) 
(DVD Studiocanal)

Le cadavre d’une femme politique est découvert dans un tunnel de service de l’Eurotunnel, positionné à cheval sur la frontière franco-britannique. A son grand dam, Elise Wassermann (Clémence Poésy), jeune inspecteur de la police de Calais, doit faire équipe avec son homologue anglais de Folkestone, Karl Roebuck (Stephen Dillane). L’enquête s’annonce ardue, et la personnalité introvertie et individualiste d’Elise ne facilite pas les choses. Les deux policiers vont pourtant devoir ravaler leur orgueil, car il apparaît vite que le meurtrier n’a pas l’intention d’en rester là…

Son nom est quasiment inconnu du grand public. Et pourtant, Stephen Dillane est partout : sur les planches, au cinéma et à la télévision. Il campe le sombre Stannis Baratheon de Game Of Thrones, figure presque aussi taciturne que celle du directeur de l’agence d’espions qu’il incarne dans la récente série Hunted. Mais cet acteur anglais formé à la classique Bristol Old Vic Theatre School (comme Daniel Day-Lewis et Jeremy Irons) peut se fondre dans n’importe quel personnage. Il a été un agent sportif épatant dans Goal, Merlin dans Le Roi Arthur d’Antoine Fuqua, le reporter britannique Michael Henderson dans Welcome To Sarajevo, Thomas Jefferson dans la mini-série John Adams, un playboy voleur de tableaux dans Pour l’amour de l’art, comédie romantique dispensable avec Sandra Bullock et Denis Leary. Stephen Dillane n’a cependant jamais été aussi impressionnant que dans cette adaptation de l’excellente série suédo-danoise Bron (diffusée actuellement sur Canal+ Séries), en inspecteur expérimenté et humaniste, père et époux présent (mais pétri de contradictions), qui dissimule ses tourments sous un flegme et un humour très british. Il en est la clé de voûte. A son contact, Clémence Poésy, dont le caractère asocial du personnage apparaissait au début un tantinet forcé, finit par se révéler excellente. Grâce à ce tandem attachant, ce palpitant thriller en dix épisodes est davantage qu’un vulgaire copié-collé de l’œuvre originale qui conjugue traque d’un psychopathe aux ambitions mystérieuses, confrontation de personnalités atypiques et choc des cultures. Le scénario ancre habilement l’histoire dans un contexte européen moderne, au demeurant plutôt pessimiste. La mise en scène épurée (Dominik Moll, réalisateur de l’intrigant Harry, un ami qui vous veut du bien, a signé les deux premiers épisodes) épouse à ravir la mélancolie qui émane des terminaux du tunnel et des ciels plombés des régions de Calais et de Douvres. Aux côtés du tandem-vedette, les seconds rôles font un sans-faute, et on note la belle présence de Jeanne Balibar, Thibault de Montalembert, Joseph Mawle, Thierry Frémont et Angel Coulby (la Guenièvre de la série Merlin). Le dixième épisode s’avérant particulièrement concluant, cette coproduction franco-britannique (Canal+ a collaboré avec la chaîne Sky) pourrait légitimement en rester là. Il se murmure cependant qu’elle pourrait être reconduite pour une deuxième saison, à l’instar de Bron et de sa déclinaison américaine, The Bridge (avec Diane Kruger et le Mexicain Demián Bichir), qui a vu le jour aux Etats-Unis en juillet 2013 sur la chaîne FX.

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Test DVD :

Interactivité*
On reste un peu sur sa faim avec l’interview intéressante, mais trop courte, de Clémence Poésy et Dominik Moll (14 minutes), unique supplément de l’édition. Tous deux reviennent sur la genèse de l’adaptation franco-anglaise et la création des personnages.

Image **
Format : 1.78
La définition et les contrastes laissent parfois un peu à désirer, mais la grisaille mélancolique des images est correctement restituée.

Son : ***
DD 5.1 et 2.0 en en français et anglais
Sous-titres français non imposés
Sous-titres français pour sourds et malentendants
Une piste DD 5.1 solide, qui exploite magnifiquement le caisson de graves. Pour profiter pleinement de ce choc des cultures, il est conseillé de visionner les épisodes en version originale, qui bascule d’une langue à l’autre selon la nationalité des personnages.

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The Tunnel Ep02
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GENERATION WAR

 

Top Of The Lake Generation War, Tunnel, In The Flesh : les mini-séries qui ont tout des grandes ! (2/4)

LA GUERRE VUE D’EN FACE

Generation War (Unsere Mütter, Unsere Väter)

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Mini-série allemande créée par Stefan Kolditz
2013 (Blu-ray Pyramide Vidéo)

A Berlin au début de l’été 1941, cinq jeunes gens, amis d’enfance, se sont donné rendez-vous dans leur bar préféré avant le départ de trois d’entre eux pour le front de l’Est. Si Charlotte (Miriam Stein), élève infirmière, et Wilhelm (Volker Bruch) qu’elle aime en secret, sont impatients de servir leur patrie, Friedhelm (Tom Schilling), le jeune frère poète de Wilhelm, ne cache pas ses appréhensions. Ils laissent derrière eux la belle Greta (Katharina Schüttler) – qui rêve d’être la nouvelle Marlene Dietrich – et Viktor (Ludwig Trepte), l’amant juif de cette dernière. Loin d’imaginer la tournure tragique que vont prendre les événements, ils se promettent de se retrouver au même endroit à Noël, convaincus qu’alors, la guerre sera finie…

Quel que soit le côté du Rhin où l’on se trouve, il ne faisait pas bon avoir vingt ans en 1940. Pour écrire l’histoire de ces cinq destins pris dans la tourmente et la barbarie de la Seconde Guerre mondiale, Stefan Kolditz, à l’origine du projet initié en 2005, a recueilli des heures de témoignages (interviews, confidences de son cercle familial, lecture de journaux intimes de soldats…). Davantage que l’histoire avec un grand H, ce sont les individus et leur évolution psychologique qui l’intéressent, et il évoque les événements en demeurant constamment à hauteur de ses personnages, dont la modernité fera immanquablement mouche chez le jeune public. De Charlotte, qui croit au renouveau de la femme allemande et à la grandeur du Troisième Reich, à l’ambitieuse Greta, qui ne pense qu’à sa carrière et ne prend pas véritablement conscience de la gravité des heures qui s’annoncent, tous devront faire face à l’effondrement de leurs certitudes, illusions, et parfois, idéologie. A travers eux, Stefan Kolditz porte un regard sans concession sur le passé de son pays, auquel il impute toute la responsabilité de la guerre. Comment s’acquitter de son devoir de soldat et ne pas perdre son âme lorsqu’on découvre qu’on est dans le camp des salauds, qu’on obéit à des ordres absurdes, et qu’on tue pour ne pas être tué ? « La guerre va révéler nos plus mauvais côtés » avait prévenu Friedhelm. Les acteurs ont du charisme à revendre (Tom Schilling, remarqué dans Oh Boy, de Jan Ole Gerster, y est particulièrement impressionnant), même s’ils semblent parfois à l’étroit dans ces stéréotypes de héros d’infortune, et on peut d’ailleurs regretter que le scénariste ait privilégié à ce point les silences et les non-dits. Cette absence de sentimentalisme confère en revanche à la saga un réalisme, une froideur et une dureté qui font froid dans le dos. Une cruauté accentuée par la mise en scène épique de Philipp Kadelbach, pas avare d’effets choc (la série a bénéficié d’un budget plutôt conséquent pour une œuvre télévisuelle). En dépit de maladresses et même si certains partis pris ont été controversés (la représentation de la résistance polonaise a notamment soulevé un tollé en Pologne), Generation War participe au devoir de mémoire (l’expression ici n’est pas galvaudée) en portant un regard inédit sur un passé coupable qui continue à hanter l’Allemagne. On peut se réjouir que les jeunes cinéastes d’outre-Rhin soient déterminés à aborder sans complexe les sujets qui fâchent et à chasser les fantômes, d’autant que le public semble prêt à les suivre. Après le succès au cinéma remporté par La chute, Sophie Scholl, les derniers jours ou Les faussaires, la diffusion en mars 2013 de ces trois épisodes d’une heure trente sur la chaîne généraliste publique ZDF (équivalent de France 2 chez nous), a fait l’effet d’une bombe, au point que le journal Spiegel a été jusqu’à parler de « tournant majeur dans l’histoire de la télévision allemande ».

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Test Blu-ray :

 Interactivité***
Les trois épisodes de 90 minutes, répartis sur deux Blu-ray, sont enrichis d’une master class de 19 minutes du scénariste Stefan Kolditz et du producteur Benjamin Benedict, enregistrée le 13 septembre 2013 au festival Fiction TV de La Rochelle. L’un et l’autre reviennent sur les difficultés de ce tournage et expliquent comment ils ont dû vaincre les appréhensions de la chaîne ZDF, productrice de la saga. Ils insistent également sur le fait que la diffusion de la mini-série a suscité une vague de discussions et d’examens de conscience en Allemagne. Le making of de 19 minutes dévoile ensuite les coulisses d’un tournage perturbé par les conditions météorologiques extrêmes. Il est ponctué des impressions du scénariste, des comédiens et de l’équipe technique. Enfin, les interprètes des cinq amis évoquent leur personnage le temps de courtes interviews (17 minutes).

Image ****
Format : 1.77
La photo aux reflets métallisés est idéalement retranscrite ici. La définition est précise et les contrastes saisissants.
 
Son : ****
DTS-HD Master Audio 5.1 en français et allemand sous-titré
Sous-titres français imposés
Sous-titres français pour sourds et malentendants
Une piste non-compressée dynamique et enveloppante. Elle est plus équilibrée en version originale, celle qu’il faut bien évidemment privilégier.

Egalement disponible en DVD

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TOP OF THE LAKE, Generation War, Tunnel, In The Flesh : les mini-séries qui ont tout des grandes ! (1/4)

THRILLER NEW AGE
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Mini-série américano-australo-britannique créée par Jane Campion et Gerard Lee
2013 (Blu-ray Arte Vidéo)

Dans une petite ville du Sud de la Nouvelle-Zélande, Tui Mitcham, douze ans, est retrouvée par son institutrice à moitié immergée dans le lac. On découvre qu’elle est enceinte de cinq mois. Robin Griffin (Elisabeth Moss), jeune inspectrice de Sydney spécialisée dans les affaires d’agressions sexuelles, et originaire de la région, est sollicitée pour assister l’inspecteur Al Parker (David Wenham) dans son enquête. Mais à son grand dam, l’adolescente est ramenée chez son père, Matt Mitcham (Peter Mullan), un homme violent qui vit de petits trafics. Quelques jours plus tard, Tui disparaît…

Première série à avoir eu les honneurs du festival de Sundance, Top Of The Lake est une réussite à tous points de vue. Influencée par la récente série The Killing, mais aussi par la sulfureuse Deadwood, Jane Campion, lauréate d’un Oscar en 1994 pour La leçon de piano (Palme d’Or à Cannes l’année précédente) et réalisatrice douée de Portrait de femme, In The Cut ou Bright Star, l’a imaginée avec l’écrivain australien Gerard Lee, avec lequel elle avait coécrit son Sweetie en 1989. Dès l’ouverture, on est séduit par l’atmosphère un brin fantastique qui émane des paysages grandioses de la Nouvelle-Zélande et de la musique entêtante de Mark Bradshaw. Si la disparition de Tui devient l’obsession de la jeune inspectrice, elle n’est qu’un prétexte pour les auteurs à exposer leur vision de l’humanité, du bien et du mal. Dans ce maelstrom de mensonges et de crimes, l’enquête de Robin tourne à la quête de vérité, à laquelle son propre passé n’est pas étranger. Rarement la beauté n’aura abrité autant de mystère et de noirceur. Du patriarche fou furieux et imprévisible incarné avec brio par Peter Mullan, à ce gourou énigmatique d’une communauté New Age à qui Holly Hunter donne toute sa causticité (ses cheveux longs argentés font d’elle une sorte de clone de la cinéaste), les personnages composent une véritable galerie de freaks. Truffée de mystères et de rebondissements, la mini-série de six épisodes d’une heure se révèle un récit initiatique palpitant, emmené par une Elisabeth Moss, célèbre pour son rôle de Peggy Olson dans Mad Men, émouvante et lumineuse. Déterminée, au péril de sa vie et de sa santé mentale, à élucider l’énigme, Robin avance dans les ténèbres tel un héros antique, un chevalier sans armure, qui jamais ne défaille même si le sort semble constamment s’acharner contre lui. Saluée avec enthousiasme dès sa première diffusion outre-Atlantique en mars 2013 (les téléspectateurs français ont pu la découvrir en novembre sur la chaîne Arte), Top Of The Lake croule sous les nominations et les récompenses. Elle a notamment reçu deux nominations aux prochains Golden Globes. Verdict le 12 janvier 2014.

TOP OF THE LAKE
Test Blu-ray :

Interactivité****
Les six épisodes d’une heure sont enrichis d’un excellent documentaire de 51 minutes, From The Bottom Of The Lake, de Clare Young, qui revient intimement sur la genèse de la série. De l’écriture à la réalisation en passant par les répétitions des acteurs, le reportage recèle des séquences étonnantes et de belles réflexions sur la création artistique. Le programme comprend également un aperçu du tournage (5 minutes) et des mini-interviews d’Elisabeth Moss et Holly Hunter.

Image ****
Format : 1.78
Détaillée, nuancée et lumineuse, l’image rend justice à la remarquable photo du film. Les noirs sont profonds à souhait.
 
Son : ***
DTS-HD Master audio 2.0 en français et anglais
Sous-titres français non-imposés
Sous-titres pour sourds et malentendants
Le DD 2.0 joue la subtilité et se révèle suffisamment dynamique pour mettre en valeur la musique obsédante et les montées de tension.

Top Of The Lake
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Top Of The Lake