ANGEL de François Ozon *

Au début du siècle dernier en Angleterre, l’ascension et la chute d’une jeune écrivain de romans à l’eau de rose, à l’imagination un peu trop fertile… François Ozon adaptait en 2007 le roman de l’auteur anglaise Elizabeth Taylor, et signait un flamboyant mélodrame, cruel et ironique, avec une Romola Garai époustouflante…

 

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ANGEL

François Ozon
2007

En 1905, dans un petit village d’Angleterre, Angel Deverell (Romola Garai) est élevée par sa mère, modeste épicière. Adolescente difficile, à l’imagination débordante, elle échappe à son environnement, qu’elle juge indigne d’elle, en écrivant fiévreusement des romans à l’eau de rose. Grâce à un éditeur londonien (Sam Neill), ses rêves de grandeur et de gloire vont devenir réalité…

Angel, impitoyable portrait de femme et réflexion sur l’art, est le plus célèbre des romans de l’Anglaise Elizabeth Taylor (1912-1975), sans aucun lien de parenté avec la fameuse actrice aux yeux violets, et dont l’héroïne s’inspire de Marie Corelli, auteur controversée, prisée par la reine Victoria. Séduit par le livre découvert par hasard, François Ozon l’a porté à l’écran en 2007 d’une manière absolument divine. Si le mélodrame, véritablement flamboyant, rappelle les grandes fresques hollywoodiennes de Vincente Minnelli ou Douglas Sirk, il parvient également à restituer toute l’ironie et le cynisme du roman original et à imposer le style résolument moderne, d’audace et de cruauté mêlées, du jeune cinéaste français. Aussi tête à claques que la Scarlett O’Hara des mauvais jours, Angel apparaît devant la caméra d’Ozon bien plus séduisante et ambiguë que dans le roman, mais demeure le monstre d’égoïsme et d’arrogance imaginée par Elizabeth Taylor. Coup de chapeau à la jeune comédienne anglaise Romola Garai (future héroïne de la série The Hour), tout bonnement extraordinaire !
2h 14 Et avec Michael Fassbender, Lucy Russell, CharlotteRampling, Jacqueline Tong, Christopher Benjamin…

 

 

A noter que dans l’édition DVD Collector parue en 2007 chez Wild Side Video (toujours disponible), le film bénéficiait de très bons suppléments dont un reportage d’une heure vingt qui propulsait sur le vif du tournage, dirigé en franglais par le cinéaste, ainsi que seize minutes de scènes coupées, pas inintéressantes, qui auraient pu être intégrées dans une version longue.

 

Chronique rédigée pour fnac.com en 2007

* Régulièrement, en fonction de l’actualité des ressorties et des rediffusions TV, je mettrai un coup de projecteur sur un film déjà chroniqué à l’époque où je rédigeais sur fnac.com. Je le signalerai par un *

ANNIE GIRARDOT : Vivre pour Vivre

Au début des années 70, elle était la Meryl Streep du cinéma français. Et puis, ça c’est gâté. Comme sa consœur américaine, la popularité d’Annie Girardot s’est retournée contre elle. Trop présente sur les écrans, accumulant les mauvais choix et les films indignes de son talent, elle est passée de star à has-been, avant que la maladie d’Alzheimer, diagnostiquée à la fin des années 90, achève, sur une note encore plus tragique, la carrière et la vie tumultueuse de cette comédienne pourtant magnifique, qui restera comme la plus attachante du cinéma hexagonal.

Pour célébrer les dix ans de sa disparition (le 28 février 2011), différentes chaînes (Paris Première, France 5, Ciné+…) vont diffuser les plus remarquables des films dans lesquels elle a tourné ; parmi ceux-ci, Rocco et ses frères, de Luchino Visconti, le chef-d’œuvre qui a lancé sa carrière.

 

Après Visconti, c’est probablement Claude Lelouch qui a su le mieux mettre en valeur Annie Girardot, et notamment dans deux films extraordinaires : Vivre pour vivre (1967) et Un homme qui me plaît (1969). Il y avait quelque chose de Cassavetes filmant Gena Rowlands chez Lelouch filmant Annie Girardot ; lorsqu’il était question de montrer les émotions, l’actrice française était de cette trempe-là. La preuve :

 

Comme d’autres comédiennes de son temps, Annie Girardot a poussé la chansonnette. Polydor publie pour la première fois en France et à l’occasion des dix ans de la disparition de l’actrice, le vinyle Vivre pour Vivre, paru en 1967 uniquement au Canada. Il regroupe des chansons écrites par la romancière Françoise Dorin et mises en musique par Jean-Loup Chauby, ou par le tandem Charles Level-Roland Vincent (dont la très belle Ça m’empêche de dormir), et bien sûr Vivre pour Vivre, de Pierre Barouh et Francis Lai. Rien, peut-être, d’aussi mémorable que La chanson d’Hélène de Romy ou La Madrague de BB, mais on retrouve ici tout le tempérament de cette actrice intense et inoubliable.

https://www.youtube.com/watch?v=4Onld5UsF0o

PEGGY SUE S’EST MARIÉE

Si vous aviez la possibilité de retourner en arrière, sachant ce que vous savez aujourd’hui, que changeriez-vous ? Le plus tendre et enchanteur des films de Francis Ford Coppola revient dans une édition Blu-ray inédite, assorti d’une analyse pertinente de Jean-Baptiste Thoret intitulée Réparer le présent.

 

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« I am a grown woman with a life time of experience that you can’t understand.
– Yeah, girls mature faster than guys ! »

 

PEGGY SUE S’EST MARIÉE (Peggy Sue Got Married)

Francis Ford Coppola
1986
En édition Prestige limitée combo Blu-ray/DVD+Memorabilia et éditions Blu-ray et DVD séparées chez Carlotta depuis le 17 février 2021

Peggy Sue (Kathleen Turner) a passé la quarantaine et n’est pas heureuse. Mère de deux grands adolescents, elle se morfond dans sa ville natale où elle est restée vivre après avoir épousé son amour de jeunesse, Charlie (Nicolas Cage). Plus rien ne va entre eux et le divorce est inéluctable. Pour lui redonner le sourire, sa fille (Helen Hunt) la pousse à assister à la soirée des anciens élèves du lycée. Peggy retrouve ses amies et y est élue reine du bal, comme autrefois. Mais une fois sur scène, submergée par l’émotion, elle s’évanouit. Lorsqu’elle revient à elle, elle se retrouve plus de vingt ans en arrière, en 1960. Va-t-elle changer son destin ?

Il fut un temps où Francis Ford Coppola était le réalisateur le plus puissant de l’histoire du cinéma. Visionnaire, mégalomane, il était l’auteur de chefs-d’œuvre incontestés (Le parrain, Conversation secrète, Le parrain 2, Apocalypse Now…). Il aura suffi d’un film pour que tout s’écroule. En 1981, sa comédie musicale Coup de cœur (One From The Heart), trop audacieuse, trop expérimentale (formidable au demeurant), pour laquelle il avait hypothéqué sa maison et ses biens, est un échec financier si cuisant que le cinéaste se retrouve en faillite. Contraint de vendre ses studios Zoetrope et d’éponger ses dettes, il va dès lors revoir ses ambitions à la baisse et accepter de tourner des œuvres de commande. Certaines porteront néanmoins fièrement la marque Coppola, notamment Outsiders, Rusty James, et ce Peggy Sue Got Married de 1986. Empruntant son titre à une chanson de Buddy Holly, cette très jolie comédie mélancolique qui flirte avec le fantastique se situe entre Retour vers le futur, la pièce Our Town, de Thornton Wilder, et La vie est belle de Frank Capra, auquel Francis Ford Coppola a avoué avoir délibérément souhaité rendre hommage. Peggy Sue Got Married est une fable, sur le temps qui passe trop vite, sur les choix, les regrets et les incertitudes de l’existence. Peggy Sue retourne à l’année de ses dix-sept ans. Bien qu’elle ne comprenne pas le pourquoi du comment de ce qui lui arrive, elle prend tout de suite la mesure de la seconde chance qui lui est offerte. Elle porte sur ce et ceux qui l’entourent, à commencer par ses parents, sa petite sœur, un regard émerveillé, et elle savoure toutes ces choses qui lui semblaient insignifiantes alors. Le cinéaste cultive la nostalgie avec un souci du détail inouï. Comme dans American Graffiti (qu’il avait produit en 1973), il idéalise cette Amérique prospère, en plein âge d’or. Les voitures sont rutilantes, la jeunesse insouciante, les chansons fabuleuses (Dion & The Belmonts, The Diamonds, The Duprees…). Autour d’une épatante Kathleen Turner qui avait remplacé au pied levé Debra Winger, victime d’un accident avant le tournage, on reconnaît une brochette de jeunes acteurs à l’aube de leur carrière. Nicolas Cage, le neveu de Coppola, cabotine déjà, mais émeut en crooner de pacotille voué à une carrière de vendeur de hi-fi. On y trouve aussi Jim Carrey, Joan Allen, Helen Hunt et la toute jeune Sofia Coppola. Il est temps de réhabiliter ce film injustement oublié, plus profond qu’il n’y paraît, et dont John Barry a signé la musique, délicate et romantique.
1 h 43 Et avec Barry Miller, Kevin J. O’Connor, Lisa Jane Persky, Don Murray, Barbara Harris, Maureen O’Sullivan, Catherine Hicks…

 

TEST ÉDITION BLU-RAY

 

Interactivité ****
On ne peut qu’adhérer à l’analyse de Jean-Baptiste Thoret, qui revient avec justesse sur tous les thèmes abordés dans le film. On y apprend aussi, et entre autres, que la cinéaste pressentie à l’origine était Penny Marshall, la future réalisatrice de Big (24 minutes). La bande-annonce originale figure également au menu.

Image ***
Format : 1.85
L’image, restaurée depuis 2013, est douce et vaporeuse, mais suffisamment contrastée pour rendre hommage à la photo de Jordan Cronenweth, chef opérateur, entre autres, de
Blade Runner.

Son ***
DTS-HD Master Audio 5.0 et 1.0 en VOST
DTS-HD Master Audio 1.0 en français
La piste 5.0 offre davantage de spatialisation, même si l’essentiel provient surtout des enceintes frontales. Mais la piste mono, propre et parfois plus claire, est une option non négligeable.

 

Le coffret de l’édition Prestige limitée Combo Blu-ray+DVD comprend le fac-similé du dossier de presse de l’époque, un jeu de cinq photos et l’affiche du film.

 

 

 

À noter que Jardins de pierre (Gardens Of Stone), réalisé par Francis Ford Coppola en 1987, chronique subtile qui montre la face cachée de la guerre du Vietnam, profite lui aussi d’une édition similaire parue à la même date chez les mêmes éditeurs.

 

 

 

ARTICLE CONNEXE : CAMILLE REDOUBLE