Blu-ray d’Halloween : DARKMAN/GRAVE

En mode Halloween, deux belles éditions Blu-ray ont retenu mon attention : deux œuvres, qui n’ont rien en commun hormis d’être des films de genre et horrifiques, chacune à leur façon. A ma gauche, le romantique et attachant Darkman, film culte réalisé par Sam Raimi en 1990, exhumé en France par l’Atelier d’Images via une édition de rêve financée par une opération de crowfunding sur le site Kiss Kiss Bang Bang. A ma droite, Grave, de la française Julia Ducournau. Ce film choc et phénomène du printemps 2017 a été plébiscité par l’ensemble de la critique, décidément prompte à foncer dans le premier panneau venu. Explications… 

 

 


« I’m everyone… and no one. Everywhere… nowhere. Call me… Darkman. »

Darkman


Sam Raimi
1990
En Edition Ultime (2 Blu-Ray+1 DVD+1 comics) chez L’Atelier d’Images le 7 novembre 2017

Jeune et brillant scientifique, Peyton Westlake (Liam Neeson) est sur le point de se marier avec Julie Hastings (Frances McDormand), une avocate qui défend les intérêts d’un constructeur immobilier. Parce qu’elle a oublié chez Peyton un document compromettant, l’atelier de celui-ci est mis à sac et incendié. Son assistant est froidement assassiné et lui-même est laissé pour mort. Gravement brûlé et odieusement défiguré, Peyton n’aspire qu’à la vengeance. Pour cela, il doit parvenir à achever ses travaux de création d’une peau synthétique qui pourra lui redonner un visage humain. Un seul hic : cet assemblage cellulaire ne supporte pas la lumière plus de quatre-vingt-dix-neuf minutes…

C’est parce qu’il n’avait pas pu réaliser Batman (Warner lui ayant préféré Tim Burton), ni convaincre un studio de lui confier l’adaptation du comics The Shadow, que Sam Raimi a créé en 1989 son propre super-héros. A cette période, il a trente ans et déjà deux Evil Dead au compteur. Il est le voisin et ami des frères Coen avec lesquels il a confectionné le foutraque Mort sur le grill, une comédie d’horreur inspirée des Three Stooges. Le jeune réalisateur va peaufiner le scénario de Darkman et parvenir enfin à obtenir la collaboration d’un grand studio, Universal. Comme par hasard, Sam Raimi est un fondu des films de monstres produits par Universal dans les années 30. Il va se faire un plaisir de leur rendre hommage avec Darkman, figure tragique qui tient à la fois du Fantôme de l’opéra, du Bossu de Notre-Dame et de The Shadow. Passé par le théâtre classique, le jeune Liam Neeson n’hésite pas à en faire des tonnes dans l’expression de la souffrance physique et psychologique endurée par le personnage. Car son calvaire a non seulement changé son apparence, mais l’a transformé en bête enragée (l’insensibilité à la douleur physique a décuplé ses émotions). Mêlant la quête de vengeance et de justice à l’amour impossible, le film déploie un lyrisme poignant, accentué par la partition de Danny Elfman, compositeur fétiche de Tim Burton, qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de Batman. L’univers visuel proche de la bande dessinée (le sens du cadrage de Sam Raimi fait merveille), du cinéma muet et de l’expressionnisme (les effets spéciaux, ingénieux pour l’époque, datent de l’ère prénumérique), avait fait sensation à la sortie du film. Aujourd’hui, ce Darkman fantastique et romanesque accuse son âge, mais son aspect vintage ne manque pas de charme. Deux suites, signées en 1995 et 1996 par Bradford May, réalisateur issu de la télévision, et coproduites par Sam Raimi, ont vu le jour en vidéo, avec beaucoup moins de grâce. Liam Neeson avait cédé la place au bien moins charismatique Arnold Vooslo, qui, dans Darkman II, se faisait carrément voler la vedette par Larry Drake, toujours aussi impeccable dans le rôle de l’infâme Durant.
1 h 36 Et avec Larry Drake, Colin Friels, Jessie Lawrence Ferguson, Ted Raimi…

BANDE-ANNONCE


 

Test Edition Ultime :

Interactivité ****
Pour savoir comment Frances McDormand s’est retrouvée à jouer les demoiselles en détresse (un vrai contre-emploi), ou comment Bruce Campbell a été écarté au profit de Liam Neeson, il faut se rendre du côté des suppléments, qui reviennent abondamment sur la genèse du film et son tournage. Pour la plupart inédits (l’interview des experts Julien Dupuy et Stéphane Moïssakis est même une exclusivité française), ils sont judicieusement découpés en deux grands chapitres, « Darkman vu d’hier » et vu d’aujourd’hui, et permettent de savourer les impressions de Sam Raimi, des acteurs et de l’équipe, parfois à plus de deux décennies d’écart. Moult storyboards, des galeries de photos et d’affiches figurent également au menu. Un Blu-ray présente les deux suites, joliment restaurées, et accompagnées de leur bande-annonce d’époque. Enfin, l’édition propose le comics de cent pages Darkman contre l’Armée des ténèbres, inédit en France, dans lequel le vengeur solitaire s’associe avec Ash, le héros de Evil Dead, pour combattre le mal.

Image ***
Format : 1.85
La restauration HD se révèle convaincante, même si les tons chair sont un peu trop rosés. Le nettoyage est probant (probablement effectué par le DNR ou réducteur de bruit), mais il a un peu trop lissé l’image et enlevé beaucoup de grain. En revanche, beau travail sur les noirs, joliment profonds. Un peu moins affinée, la copie proposée par le DVD est toutefois très honorable.

Son ***
DTS HD Master Audio 5.1 en anglais sous-titré
DTS HD Master Audio 2.0 en français
Une piste 5.1 resserrée sur l’avant et qui, en termes d’effets, n’offre pas de réelle différence avec la piste 2.0. Les dialogues sont clairs, et la musique efficacement mise en valeur.

 

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« Vous vous situez où vous ?
– Moyenne…
– Alors trouvez-vous un coin tranquille et attendez que ça passe, parce que ça remue toujours un peu en début d’année. »

Grave


Julia Ducournau
2017
En combo Blu-ray+DVD chez Wild Side Video depuis juillet 2017

Justine (Garance Marillier) s’apprête à intégrer l’école vétérinaire dans laquelle sa sœur aînée Alexia (Ella Rumpf) est déjà élève. Très vite, débute le bizutage… Justine, végétarienne comme toute sa famille, se voit obligée pour la première fois de manger de la viande crue. Un acte qui va avoir des conséquences insoupçonnées…

Que la réalisatrice soit issue d’une famille de médecins — ses parents sont respectivement gynécologue et dermatologue — n’est pas anodin. Que ces derniers soient de grands cinéphiles non plus. Manifestement, Julia Ducournau connaît son petit Cronenberg par cœur, et le cinéma d’horreur sur le bout des doigts. Elle parvient à frapper fort dès la première image, et à installer le malaise en deux coups de cuillère à pot. La manière dont elle filme les scènes de bizutage, les animaux en présence, est impressionnante et fait froid dans le dos. Les écoles vétérinaires ne sont vraiment pas fréquentables. La descente aux enfers de Justine, entre deux fêtes tribales et deux séquences malséantes ou gore, donne la nausée. La jeune fille ne sait plus où donner de la tête : elle se découvre des pulsions cannibales en même temps qu’elle s’éveille à la sexualité… Mais si la cinéaste ménage parfaitement ses effets et maîtrise les éléments de sa mise en scène, dont les insertions musicales très réussies, il n’émane de son film aucune émotion. On n’éprouve pas la moindre empathie ni pour Justine, ni pour sa sœur, tantôt complices tantôt ennemies, et dont on peine à comprendre les motivations (le jeu des actrices ne fait rien à l’affaire). Comme la transformation de Justine, les scènes donnent l’impression de s’enchaîner de façon artificielle jusqu’à ce twist final qui tombe à plat. Dommage, car aborder le cannibalisme en ces temps où se multiplient les adeptes du végétarisme, végétalisme et autre véganisme était plutôt pertinent ; certains aspects du film (dont le bizutage), auraient mérité d’être mieux exploités. Grave est une œuvre dont le visionnage est finalement plus pénible que dérangeant, qui réclame d’avoir l’estomac bien accroché et l’intelligence en berne.
1 h 39 Et avec Laurent Lucas, Rabah Nait Oufella, Joana Preiss, Marion Vernoux, Bouli Lanners…

BANDE-ANNONCE



Test Blu-ray :

 

Interactivité ***
Ce beau combo Blu-ray/DVD ne multiplie pas les suppléments mais propose deux longs entretiens (45 minutes chacun) conduit par Fausto Fasulo de Mad Movies, avec la réalisatrice et son actrice principale, qui reviennent généreusement sur leur expérience. Julia Ducournau ne considère pas son film comme un film d’horreur, elle préfère parler de « film de genre ». Une scène coupée complète le programme.

Image ****
Format : 2.35
Une image impeccable, précise comme un scalpel, contrastée et vibrante lorsque le rouge s’invite.

Son ****
DTS HD Master Audio 5.1 en français
Sous-titres pour sourds et malentendants
Audiodescription
Une piste 5.1 immersive très impressionnante, qui déploie judicieusement ses effets pour faire monter la tension. Le caisson de basses fait trembler les murs.

 

BLADE RUNNER 2049

Un peu étouffée par les critiques dithyrambiques qui ont accompagné l’arrivée sur les écrans de la suite du chef-d’œuvre de Ridley Scott, la voix des circonspects voire des franchement déçus s’est malgré tout fait entendre. Blade Runner 2049 a même divisé au sein des rédactions. Quand certains le jugent encore meilleur que le film de 1982, d’autres fustigent la coquille vide. Le public quant à lui regrette surtout sa durée excessive (2 h 44) et aux Etats-Unis, le long-métrage a fait un flop dès le premier week-end de sa sortie (en son temps, Blade Runner avait également été boudé par le public américain). Si l’idée de faire une suite ne s’imposait évidemment pas (toujours cette fâcheuse manie de recycler les classiques plutôt que d’en créer…), il est malgré tout difficile d’échapper au charme hypnotique du film de Denis Villeneuve, très grand concepteur d’atmosphères, comme il l’a brillamment démontré dans Prisoners, Enemy, Sicario ou le récent Premier contact. Il ne surpasse pas peut-être pas son prédécesseur, monument de la culture cyberpunk, mais 2049 lui fait fichtrement honneur. Pas de spoilers dans cette chronique.


« I did your job once. I was good at it »

  

Blade Runner 2049

Denis Villeneuve
2017
Dans les salles françaises depuis le 4 octobre

Il ne fait pas bon vivre à Los Angeles en 2049, entre la pollution et la solitude urbaine. A cause des incidents survenus trente ans auparavant, la conception des réplicants, androïdes sophistiqués à l’apparence humaine, a été revue et corrigée par un magnat de la bio-ingénierie (Jared Leto, forcément… ), qui les a rendus plus « obéissants  ». Les anciens modèles encore en circulation, considérés comme obsolètes et potentiellement dangereux, doivent être traqués puis éliminés. C’est le rôle de K (Ryan Gosling), agent de la LAPD, androïde organique et redoutable blade runner. Mais lors d’une mission, il va faire une découverte qui pourrait précipiter ce qu’il reste de la société dans le chaos…

S’il n’a pas fait preuve de génie, il faut reconnaître au réalisateur canadien prisé Denis Villeneuve d’avoir fait montre d’élégance pour mettre en scène cette suite du cultissime Blade Runner, auquel il rend un hommage quasi constant. Dès le premier plan, on est propulsé dans l’univers visuel merveilleusement imaginé par Ridley Scott en 1982 (le cinéaste est producteur ici), et les clins d’œil vont pulluler tout au long de cette épopée follement mélancolique, dans des paysages apocalyptiques et tarkovskiens à la beauté hallucinante. Faute de pouvoir se libérer d’un cahier des charges écrasant (Blade Runner est considéré comme le long-métrage le plus fondamental du cinéma de science-fiction après 2001, l’odyssée de l’espace), Denis Villeneuve a généreusement exploité l’univers du film et sa symbolique. Dans ce monde qui se meurt des égarements des hommes, un androïde est bouleversé par l’idée qu’il a peut-être une part d’humanité. Le thème de l’androïde en quête de sa conscience et de son âme était déjà au cœur de Blade Runner, comme il l’était dans A. I., le génial Ghost In The Shell ou dans la récente série Westworld. Cette réflexion existentielle et philosophique a toujours stimulé l’imagination des créateurs, et autorisé des élans poétiques et lyriques. Il émane de toutes ces œuvres une tristesse et une profonde mélancolie, et dans 2049, elles sont clairement revendiquées. Cette plongée hypnotique empreinte de nostalgie revêt un aspect crépusculaire saisissant. On peut se féliciter que l’intrigue, cosignée par Hampton Fancher — déjà à l’œuvre sur Blade Runner — soit un prolongement plausible du film de Ridley Scott librement adapté du roman de Philip K. Dick (Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?), et quelques idées sont carrément bluffantes. On se réjouit aussi que Denis Villeneuve n’ait pas fait un usage outrancier des images de synthèse. 2049 n’a certes pas l’aspect un peu crade de son illustre prédécesseur, mais il n’apparaît pas aseptisé non plus (à la photo, Roger Deakins a encore fait des prouesses). On pourra reprocher le manque d’audace de la bande originale signée par l’incontournable Hans Zimmer (épaulé ici par Benjamin Wallfisch), parsemée de clins d’œil à celle de Vangelis sans parvenir à égaler sa puissance, mais il faudrait être sacrément mauvais coucheur pour bouder ce joyau visuel, fabuleusement et désespérément romantique.
2h 44 Et avec Harrison Ford, Ana de Armas, Sylvia Hoeks, Mackenzie Davis, Robin Wright, Dave Bautista, Hiam Habbass, Lennie James…

BANDE-ANNONCE

 

DEAUVILLE 2017 – Barry Seal/Le château de verre

Bien que chahuté par les conditions météo franchement automnales, le 43ème festival de Deauville n’a pas failli à sa mission première : faire découvrir le meilleur du cinéma américain du moment. Depuis quelques années, la programmation fait la part (très) belle au cinéma indépendant et force est de constater que le festival est désormais devenu un haut lieu de la cinéphilie, une sorte de réplique sympathique du festival de Sundance. Les invités eux-mêmes sont moins des stars que des acteurs chevronnés, des sortes de « petites mains » du cinéma américain qu’on aime, même si le grand public a parfois du mal à mettre un nom sur leur visage. Ainsi pouvait-on entendre le jour de l’ouverture, où un hommage était rendu à l’inoubliable Lula de David Lynch : « Laura Dern… ? C’est qui ? »  « Elle a joué dans quoi ? » ; « C’est pas la fille de Jurassic Park ? » Woody Harrelson lui-même était ébahi d’être applaudi à tout rompre le soir du palmarès, après l’hommage pertinent et hilarant rendu par Michel Hazanavicius. Le héros de Tueurs nés, fils d’un vrai tueur à gages et acteur épatant, a confirmé dans son discours qu’il était conscient de ne pas véhiculer le même glamour que George Clooney ou même de son complice de True Detective, Matthew McConaughey. Les curieux auront quand même pu débattre de la nouvelle coupe de cheveux de Robert Pattinson, venu fouler les planches après sa défection d’il y a deux ans, et admirer la plastique de la torride Michelle Rodriguez, qui a confirmé vouloir désormais s’attaquer à des rôles plus « complexes »…

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PALMARES

Si le jury présidé par Michel Hazanavicius a choisi de couronner The Rider, de Chloé Zhao (Les chansons que les frères m’ont apprises), sur la quête d’identité d’un cow-boy dont la vie bascule après un accident de rodéo, c’est bien A Ghost Story qui a créé la sensation.

Le film de David Lowery a en effet remporté le Prix du Jury, le Prix de la Critique et le Prix Kiehl’s de la Révélation 2017. A sa grande surprise, le réalisateur du magnifique Les amants du Texas , déjà interprété par Rooney Mara et Casey Affleck (héros de A Ghost Story), est donc monté sur scène à trois reprises pour recevoir ses trophées qu’il a dit humblement vouloir partager avec ses concurrents. Chose rare pour être signalée : il a clamé son amour pour les critiques, qu’il considère comme des artistes à part entière. A noter qu’il faudra attendre le 20 décembre pour découvrir A Ghost Story en France.

Bande-annonce A Ghost Story

Bande-annonce The Rider

Brooklyn Yiddish, de Joshua Z. Weinstein, a reçu le Prix ex-aequo de la Critique
Bande-annonce

Mary, de Marc Webb, le Prix du Public de la ville de Deauville
Bande-annonce

Jeune femme, de Léonor Serraille, le Prix d’Ornano-Valenti (ex-Prix Michel d’Ornano), qui récompense les premiers films français.
Bande-annonce

Les membres du Jury Emmanuelle Devos, Charlotte Le Bon, Clotilde Hesme et Alice Winocour entourant leur président Michel Hazanavicius, et les lauréats David Lowery et Joshua Z. Weinstein (Photo Charly Triballeau/AFP)

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Présentés hors compétition et en premières françaises, les films d’ouverture et de clôture, Barry Seal, American Traffic et Le château de verre, ou deux facettes du cinéma américain

 

Barry Seal : American Traffic (American Made)


« All this is legal ?
– If you’re doing it for the good guys. »

Doug Liman

2017
Dans les salles françaises depuis le 13 septembre

A la fin des années 70 aux Etats-Unis, Barry Seal (Tom Cruise), pilote de ligne pour la WTA, s’adonne à un petit trafic de cigares pour arrondir ses fins de mois, mais aussi pour mettre du piment dans un job qu’il trouve trop routinier. Pris la main dans le sac par Monty Schafer (Domhnall Gleeson), de la CIA, qui l’a surtout repéré pour son côté casse-cou, il est recruté pour survoler l’Amérique latine et prendre des photos stratégiques des bases des rebelles communistes. Mais les allers et venues de Seal ne tardent pas à alerter un certain Pablo Escobar, qui lui propose une association très lucrative. Et ce n’est que le début…

La réalité dépasse souvent la fiction, comme en témoigne l’histoire vraie de Barry Seal — qui éclaboussa l’administration Reagan dans les années 80 — ici mise en scène façon comédie rocambolesque par Doug Liman. Tom Cruise se donne à cœur joie (et à corps perdu) dans le rôle de cet aventurier tête brûlée sans scrupule, opportuniste, tantôt malin, tantôt benêt, et père de famille aussi aimant qu’irresponsable. En osmose évidente avec Doug Liman, qui l’a déjà dirigé dans The Edge Of Tomorrow, l’acteur roule constamment des mécaniques, à la manière du Maverick de Top Gun dont il prépare la suite pour 2019, et effectue un véritable numéro comique. Privilégiant le rythme (constamment trépidant), le cinéaste insiste sur le caractère absurde de cette histoire, dénonçant avec virtuosité les agissements douteux de la CIA et du gouvernement américain. Le traitement visuel vintage, l’insertion d’images d’archives de la télévision américaine de l’époque, et la bande-son ad hoc permettent une immersion totale dans cette période qui fait décidément fantasmer les cinéastes comme les musiciens (ce passage des 70’s aux 80’s). L’excellent Domhnall Gleeson campe un agent de la CIA ambigu et cynique à souhait, chacune de ses apparitions semblant siffler la fin de la récréation pour notre héros survolté. On peut juger le divertissement clippesque, léger et trop superficiel, mais s’il ne restera pas dans les annales, ce numéro de voltige souvent hilarant a quelque chose d’éminemment jubilatoire.
1 h 55 Et avec Sarah Wright, Jesse Plemons, Caleb Landry Jones, Benito Martinez, Jed Rees, Alejandro Edda…

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Le château de verre (The Glass Castle)


« This place doesn’t have any running water or electricity.
– Ignore her, she’s was born without vision. »

Destin Daniel Cretton
2017
Dans les salles françaises le 27 septembre 2017

Chroniqueuse mondaine au New York Magazine, Jeannette Walls (Brie Larson) est sur le point de se fiancer. En voyant cette jeune femme sophistiquée, nul ne peut imaginer ce que fut son enfance. Jeannette a en effet été élevée avec son frère et ses sœurs par une mère artiste irresponsable (Naomi Watts) et un père inventeur, rêveur et alcoolique (Woody Harrelson). Déménageant constamment de ville en ville dans des maisons miteuses pour fuir les créanciers, les Walls se sont refusés à scolariser leur progéniture. En grandissant, les enfants vont avoir autant de difficultés à supporter ce mode d’existence marginal, certes baigné de rêve et de poésie, mais bien précaire, que les promesses jamais tenues de leur père…

Une des premières scènes du film est glaçante : dans le taxi new-yorkais qui la ramène chez elle après un dîner mondain, Jeannette Walls aperçoit par la vitre un couple de clochards fouillant une benne à ordure : il s’agit de ses parents. Elle s’enfonce alors dans le siège arrière, tandis que le taxi file à toute allure. Jeannette se remémore alors l’admiration qu’elle portait, enfant, à ce père génial et fantasque. Par un jeu constant de flash-backs, Destin Daniel Cretton va reconstituer l’histoire vraie de cette famille dysfonctionnelle, telle que racontée par Walls dans The Glass Castle, son best-seller paru en 2005. Des années 60 jusqu’à aujourd’hui, on suit à travers le regard de Jeannette les tribulations de cette tribu excentrique, dont le père n’a de cesse d’exalter l’imagination de ses enfants et de les engager à ne jamais céder à la peur, aux préjugés et au conformisme. Ces parents hippies aimants, mais irresponsables, ont exposé leur progéniture à des dangers, et les ont contraints à grandir dans la misère. Avec l’âge, Jeannette va changer de regard sur ses parents, et notamment sur son père. Les promesses non tenues, les dérives alcooliques auront raison de l’admiration et céderont la place à la honte et la colère. Brie Larson, Oscar de la Meilleure actrice en 2016 (pour Room), retrouve quatre ans après son metteur en scène de States Of Grace (Short Term 12). Elle restitue parfaitement la rage rentrée, la dureté et la détermination de son personnage. Mais si les acteurs dans leur ensemble ne déméritent pas, il est dommage que le cinéaste ait un peu trop versé dans le mélodrame (c’était déjà un peu le cas dans States Of Grace). Passionnant sur le papier, ce sujet aurait mérité un traitement plus radical qui aurait conféré au film un caractère plus universel. Et le générique de fin, dans lequel apparaissent des séquences des vrais protagonistes de l’histoire, n’ajoute rien à l’affaire.
2 h 07 Et avec Max Greenfield, Ella Anderson, Chandler Head, Sadie Sink, Sarah Snook…

BANDE-ANNONCE



Site officiel Festival de Deauville 2017

Photos Denis Guignebourg/Bestimages, Le pays d’Auge, Charly Triballeau/AFP, Getty Images, Robin Uzan…