CETTE SACRÉE VÉRITÉ en Blu-ray Collector

Attention, chef-d’œuvre ! Wild Side célèbre le film culte de Leo McCarey, sommet de la screwball comedy, via une édition collector de toute beauté.

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« Je sais que je me plairai à Oklahoma City !
– J’en suis sûr ! Et si tu t’ennuies, tu pourras toujours aller à Tulsa… »

  

CETTE SACRÉE VÉRITÉ (The Awful Truth)

Leo McCarey
1937
Paru le 12 juillet 2023 en édition Collector Blu-ray+DVD chez Wild Side

À force de jouer au plus fin, les fortunés New-yorkais Jerry et Lucy Warriner (Cary Grant et Irene Dunne) sont en instance de divorce. De petits mensonges sans importance en soupçons tenaces, la confiance mutuelle a disparu. Et pourtant, même s’ils s’en défendent, ils sont toujours amoureux. Du coup, ni l’un ni l’autre n’est prêt à lâcher l’affaire… ni la garde du chien. Leurs nouveaux prétendants respectifs vont être mis à rude épreuve…

Un monument ! Un peu plus tôt, cette même année 1937, Leo McCarey avait été échaudé par l’échec d’un film qui lui tenait à cœur, Place aux jeunes (Make Way For Tomorrow), qu’il jugeait bien supérieur à celui-ci. Mais si Cette sacrée vérité (on notera la différence du choix de l’adjectif dans le titre original) n’a pas la profondeur de son prédécesseur, il s’impose néanmoins comme un classique de la screwball comedy, un genre qui allie, mieux que tout autre, loufoquerie et intelligence. Le style de McCarey, qui a fait ses classes dans le burlesque — après des débuts comme gagman, il a signé nombre de courts métrages avec Laurel et Hardy ainsi que le fameux La soupe aux canards, avec les Marx Brothers — fait merveille. Le rythme infernal, les chamailleries absurdes, les gags irrésistibles et les acteurs étincelants contribuent à faire briller cette fable sur le couple qui a fait de Cary Grant une star. En effet, l’acteur remarqué dans Sylvia Scarlett deux ans plus tôt et plutôt connu pour un être faire-valoir de stars féminines (Mae West, Marlene Dietrich…) compose ici un personnage qui allait lui coller à la peau. Élégant mais espiègle, charmeur et imprévisible, Grant n’hésite pas à se rendre ridicule, à faire des grimaces, à se prendre littéralement les pieds dans le tapis. Il est en parfaite osmose avec Irene Dunne, actrice chic (elle porte la robe du soir à merveille) et chanteuse douée, qui campe une femme moderne, futée et drôle, capable, elle aussi, de se mettre dans des situations déjantées. Elle fait une impitoyable adversaire pour son époux, mais baisse parfois la garde pour se montrer sentimentale. Car c’est si c’est bien d’une guerre des sexes qu’il s’agit, l’amour en est la finalité. Le tournage de cette comédie de remariage fut aussi loufoque que le film lui-même. McCarey, selon sa bonne habitude, réécrivait le scénario, tant qu’à faire, la veille du tournage (quand il n’improvisait pas sur le plateau) et semblait prendre un plaisir fou à voir le producteur Harry Cohn s’arracher les cheveux. L’adorable fox-terrier Asta, alias Mr Smith, n’en faisait qu’à sa tête – il était déjà la star de la saga L’introuvable (The Thin Man) aux côtés de Myrna Loy et William Powell. Tout cela a engendré un petit bijou, truffé de scènes tordantes, de chansons désopilantes et de mots d’esprit. Et à la clé, l’Oscar du Meilleur réalisateur pour Leo McCarey.
1 h 30 Et avec Ralph Bellamy, Alexander D’Arcy, Molly Lamont, Joyce Compton, Cecil Cunningham, Esther Dale…

 

TEST EDITION COLLECTOR 

Ce combo Blu-ray-DVD mis en valeur par de très jolies illustrations propose des suppléments de haute volée. Dans le livret inédit de 60 pages, agrémenté de photos, le journaliste érudit Frédéric Albert Levy (cofondateur de Starfix) revient avec pertinence sur plusieurs aspects du film, de sa genèse au tournage. Le film lui-même est assorti de deux analyses intéressantes de Charlotte Garson, rédactrice adjointe des Cahiers du Cinéma :Leo McCarey ou le timing parfait (22 minutes) et Qui gardera le chien ? (32 minutes).

Côté technique, on se réjouit de cette image restaurée à partir d’un Master 4K. L’image n’est pas sans défaut, mais la définition reste tout à fait honorable pour un film de cet âge. Des deux pistes sonores, on préférera la version originale sous-titrée en DTS-HD Master 2.0, claire et équilibrée.

OPPENHEIMER

C’est l’autre événement de l’été ! Apparu sur les écrans français le même jour que Barbie, le nouveau film de Christopher Nolan est aux antipodes de celui de Greta Gerwig. Ce portrait très documenté du « père de la bombe atomique » est porté par un Cillian Murphy égal à lui-même (totalement habité) qui restitue la complexité de ce physicien torturé, exalté et plein de contradictions. Brillant, mais un tantinet touffu.

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« Now you’re fucked up forever. » (Anxiety : Clarity – Portugal. The Man)

                                                                

OPPENHEIMER

Christopher Nolan
2023
En salles depuis le 19 juillet

En 1942, le général américain Leslie Groves (Matt Damon) recrute Robert Oppenheimer (Cillian Murphy), chercheur en physique quantique et professeur à l’Université de Berkeley, pour diriger le projet Manhattan, destiné à mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Dans le laboratoire ultrasecret de Los Alamos – dans le désert du Nouveau-Mexique –, Oppenheimer réunit une équipe de scientifiques. Il leur faut réussir avant d’être devancés par l’Allemagne nazie, elle aussi dans la course pour développer l’arme nucléaire… 

On pourrait penser qu’à trop vouloir en dire, à trop vouloir en faire, Christopher Nolan en a presque oublié… de faire du cinéma. Son Oppenheimer est si bavard, si chargé d’informations, qu’il exige du spectateur un effort de concentration considérable. Les allers et retours dans le temps, le passage de la couleur au noir et blanc, les circonvolutions des mêmes séquences font parfois perdre le fil. Mais si on s’accroche, le jeu en vaut la chandelle. On entre dans la tête d’Oppenheimer, personnage complexe et extraordinairement brillant. Issu d’une famille aisée de juifs allemands immigrés, passionné d’art et de poésie, il voue une haine au nazisme, ce qui explique en partie son implication dans le projet Manhattan. Yeux bleus écarquillés et amaigri pour le rôle, Cillian Murphy, interprète de l’iconique Tommy Shelby de Peaky Blinders, exprime à merveille les contradictions de ce scientifique charismatique et hermétique, peut-être le plus controversé de l’histoire (la ressemblance physique est également étonnante). Se considérant lui-même comme « le destructeur des mondes », Oppenheimer sera ensuite et à jamais hanté par les victimes d’Hiroshima et Nagasaki. C’est toute la problématique du film, totalement d’actualité en ces temps d’interrogation sur l’intelligence artificielle : que vaut la morale face à la science, face au progrès ? La fascination de Nolan pour la figure du physicien curieusement humaniste provient de sa découverte de la biographie American Prometheus : The Triumph And Tragedy Of J. Robert Oppenheimer, écrite par Kai Bird et Martin J. Sherwin, récompensée par le Prix Pulitzer en 2006. Le livre est à la base du film. Autant dire que les informations distillées sont d’une justesse redoutable. Comme dans le cas de l’épopée Apollo, on est souvent sidéré par la tournure que prend ce récit édifiant. La séquence d’essai atomique, du nom de code Trinity, laisse bouche bée. Nolan a délaissé les effets spéciaux numériques créés par ordinateur au profit de trucages à l’ancienne et le résultat n’en est que plus impressionnant. Si la mise en scène éblouit, les dialogues font mouche, et les acteurs (un défilé de stars) excellent. Mentions spéciales à Matt Damon, en militaire sarcastique et humain, à Emily Blunt, très juste en épouse révoltée, et à Tom Conti, en Albert Einstein (on lui doit la plus belle scène du film). On regrette simplement la durée excessive de cette leçon d’histoire, que Nolan a souhaitée exhaustive, au risque de la rendre indigeste.
3 heures. Et avec Robert Downey Jr., Josh Hartnett, Florence Pugh, David Krumholtz, Alden Ehrenreich, Jason Clarke, Tony Goldwyn, Tom Conti, Kenneth Branagh, Matthew Modine, Casey Affleck, Rami Malek, Gary Oldman…

BARBIE

C’est le carton de l’été ! Ce véritable phénomène culturel a dépassé le cap du milliard de dollars de recettes au box-office mondial. Contre toute attente, le blockbuster développé par Mattel et Warner Bros est signé par deux ténors du cinéma indépendant, Greta Gerwig et Noah Baumbach (en couple dans la vie), qui se sont appliqués à amener Barbie dans l’air du temps. Si Margot Robbie, productrice impliquée (elle est à l’initiative du film), campe une Barbie idéale, elle se fait voler la vedette par Ryan Gosling, touchant et immensément drôle. En crise existentielle aiguë, les protagonistes ne cessent de s’interroger sur leur place dans la société. La réponse des scénaristes laisse, hélas, un peu perplexe.

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« You can be brainwashed or you can be ugly. There’s nothing in between. »

  

BARBIE

Greta Gerwig
2023
En salles depuis le 19 juillet

À Barbieland, Barbie (Margot Robbie) vit une existence de rêve, entourée de ses consœurs Barbies. Son bonheur va être bientôt altéré par des pensées morbides et des événements bizarres qui vont l’obliger à se poser des questions sur son existence. Avec Ken (Ryan Gosling) qui souffre de n’être qu’un faire-valoir et la suit comme son ombre, Barbie entreprend d’aller faire un tour dans le monde réel pour trouver des réponses…

Dommage que Greta Gerwig et son compagnon Noah Baumbach, avec qui elle a écrit le scénario, ne se soient pas contentés de faire une bonne comédie (entendons « drôle et intelligente »), plutôt que de tenter de nous asséner, en guise de satire, un traité sur le féminisme si complexe et à la fois si infantile qu’on peine à reconnaître la griffe des auteurs du formidable Frances Ha. Certes, les piques envers la gent masculine ou féminine sont parfois bien vues, certaines idées ou références sont amusantes, mais la caricature est trop grossière pour convaincre. Dans Barbie, le monde est rose ou bleu, et les deux ne se mélangent jamais. Ça partait pourtant bien. Margot Robbie crève l’écran. Visuellement, le film en jette : Greta Gerwig a demandé conseil à Peter Weir, le réalisateur de The Truman Show, pour ériger l’univers artificiel et coloré de Barbieland. La problématique des rapports entre l’héroïne et Ken semblait pertinente. Et puis le film, extravagant à souhait, s’enlise, tire dans toutes les directions au point qu’on ne comprend plus où il veut en venir. D’ailleurs, la presse semble incapable de le définir : Woke ? Anti-woke ? Féministe ? Anti-féministe ? Sexiste ? Anti-sexiste ? Ce qui est certain, c’est que tout ça ne fait pas dans la dentelle. Les rapports entre la mère et la fille (dans le monde réel) sont balourds ; le fantôme de Ruth Handler (la créatrice de la poupée Barbie) est niaiseux ; Will Ferrell, en PDG hystérique de Mattel, est pénible ; et même la complainte de Ken, si amusante au début, finit par agacer (voir la scène interminable dans laquelle il pleure sur son sort). Ironiquement, c’est tout de même ce dernier, simple faire-valoir de Barbie, qui émeut le plus. Le talent de Ryan Gosling, dont on sait le potentiel comique (il était hilarant dans Crazy, Stupid, Love), y est pour beaucoup. Toutes ses répliques sont drôles. Et c’est encore Ken, décérébré mais humain, et surtout incurable romantique, qui a droit à la plus belle scène de comédie musicale, sur la chanson hilarante « I’m Just Ken » écrite par Mark Ronson et Andrew Wyatt. Un comble !
1 h 54 Et avec Emma Mackey, Dua Lipa, Kate McKinnon, Simu Liu, Issa Rae, Michael Cera, John Cena, Helen Mirren…