ARMY OF THE DEAD

Dix-sept ans après L’armée des morts, le remake bien ficelé du Zombie de Romero, Zack Snyder revient taquiner les morts-vivants sur Netflix. Artillerie lourde et grosse déception. (Pas de spoiler dans cette critique)

 

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«You all keep talking about the city like it’s their prison. It’s not. It’s their kingdom.» Lilly — The Coyote (Nora Arnezeder)

 

ARMY OF THE DEAD

Zack Snyder
2021
Sur Netflix depuis le 21 mai

Alors qu’il transporte une mystérieuse créature, le camion d’un convoi militaire venant de la Zone 51 percute une voiture folle. Le prisonnier, un zombie super développé, s’échappe, semant la mort et contaminant tout le monde sur son passage. En quelques jours, Las Vegas est prise d’assaut. L’armée réussit à contenir l’épidémie en confinant la ville, qui devient une prison à ciel ouvert pour zombies. Un homme d’affaires (Hiroyuki Sanada) a alors la riche idée de proposer à un mercenaire (Dave Bautista) de monter une équipe de choc pour aller récupérer deux cents millions de dollars qui dorment dans le coffre-fort du plus grand casino de Las Vegas. La mission est d’autant plus suicidaire qu’une frappe nucléaire censée éradiquer les morts-vivants doit avoir lieu dans trente-deux heures…

Il était une fois Zack Snyder, jeune réalisateur talentueux, respecté par les amateurs de films de genre. Repéré en 2004 avec son premier long-métrage, L’armée des morts (en dépit du titre, il est sans rapport avec celui-ci), il s’est imposé ensuite grâce aux remarquables 300, Watchmen ou Sucker Punch, des films qui ne manquaient pas d’ambition. Et puis, ça s’est gâté. Il s’acoquine à nouveau avec DC Entertainment pour réaliser Man Of Steel, puis le catastrophique Batman V Superman et Justice League. On pouvait espérer qu’en revenant, pour Netflix, sur les terres de la série B horrifique, il retrouverait sa virtuosité d’antan. Que nenni. Army Of The Dead, production à gros budget dont il a également cosigné le scénario (écrit avec les pieds), se révèle un grand fourre-tout, un divertissement qui se veut fun et se fiche totalement de la vraisemblance. Sur une idée de départ piquée à New York 1997, de John Carpenter, le film, sans la poésie du maître, multiplie les poncifs du genre lorsqu’il est vulgairement traité, et les clins d’œil (The Walking Dead, Top Gun, Land Of The Dead, Alien, Ghosts Of Mars et toute la filmographie du réalisateur…). Dans ces ambiances visuelles clippesques façon Michael Bay (mais sans la direction photographique…), on trouvera néanmoins des tableaux bien composés, notamment durant ce générique halluciné sur l’air de « Viva Las Vegas », où le mauvais goût le dispute à l’ironie jubilatoire. Certes, la mise en scène de Snyder est efficace, les scènes horrifiques et d’action en jettent, mais il court trop de lièvres à la fois : gore, science-fiction, braquage, humour, mélodrame cucul… La bande-son elle-même, composée par Junkie XL et truffée de classiques pop-rock, semble jouer la surenchère (Elvis Presley, John Fogerty, Culture Club, The Cranberries, The Doors…). Dommage que les personnages soient si caricaturaux (et décérébrés pour la plupart, comme l’horripilante fille du héros campée par Ella Purnell) et leurs agissements si ineptes. Comme si ça ne suffisait pas, Snyder et ses complices ont disséminé des indices (easter eggs) façon Christopher Nolan dans Tenet pour nous faire croire que « tout ce qu’on vient de voir est bien plus que ça en a l’air ». LOL. Nous qui nous serions juste contenté d’un bon petit survival dans un Las Vegas infesté de zombies…
2 h 28 (oui, en plus c’est long…) Et avec Omari Hardwick, Ana de la Reguera, Theo Rossi, Matthias Schweighöfer, Nora Arnezeder, Garrett Dillahunt, Tig Notaro, Raúl Castillo…

À noter que Army Of The Dead, d’ores et déjà considéré comme un des plus gros succès de Netflix, est voué à devenir une franchise ; une suite et deux prequels sont déjà dans les tuyaux.

 

SUICIDE SQUAD

« Fiasco », « hara-kiri artistique », « massacre », « ratage monumental »… Ainsi donc, Suicide Squad se prendrait une « raclée bien méritée » de la part des critiques. Pour avoir osé se prendre pour le Joker, Jared Leto voit toute sa filmographie réduite à une série de contre-performances, et même l’épatante prestation de Margot Robbie se voit qualifiée de « pitoyable » par une journaliste (du Figaro.fr). Ce déchaînement de haine donne presque envie de rire. Que les fans de comics n’y aient pas trouvé leur compte, soit. Mais les autres, à quoi s’attendaient-ils exactement ? A un traité philosophique sur le combat du mal par le mal ? A une tragédie shakespearienne punk ? Au plus grand film de chaos de tous les temps ? Certes, on en est loin, mais Suicide Squad n’est pas aussi honteux qu’on voudrait nous le faire croire. Et lorsqu’on l’aborde avec l’esprit léger, exempt de toute idée préconçue, et surtout si on n’a pas visionné jusqu’à l’overdose les vidéos de l’infernale campagne promotionnelle qui a manifestement laissé les geeks sur leur faim, on peut prendre ce film pop et foutraque pour ce qu’il est : un blockbuster éminemment sympathique, et craquer pour Margot Robbie, l’interprète irrésistible de Harley Quinn.

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« This is the deal : you disobey me, you die. You try to escape, you die. You irritate or vex me… guess what ?
– I’m known for being quite vexing. I’m just forewarning you…
– You die. »
 

Suicide Squad

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David Ayer
2016 (Dans les salles françaises depuis le 3 août)

Après la mort de Superman, Amanda Waller (Viola Davis), à la tête d’une agence secrète gouvernementale, monte une équipe de choc pour assurer la sécurité du monde. Le hic, c’est qu’elle est composée des pires assassins et fous furieux qui croupissaient dans des geôles. Mais Amanda a une méthode efficace pour les obliger à obéir et à travailler ensemble…

Derrière cette adaptation de la bande dessinée de DC Comics créée par John Ostrander en 1987, il y a David Ayer, réalisateur de Fury et d’Au bout de la nuit, et scénariste de Training Day, qui avait valu un Oscar à Denzel Washington en 2002. Pas exactement le type de metteur en scène attendu dans ce genre de production. Mais DC Comics aime élargir ses horizons, comme en témoigne le choix d’un Christopher Nolan aux manettes de Batman. Il faut y voir aussi la patte de Zack Snyder. Entré dans l’écurie DC Comics en 2009 en dirigeant Watchmen : les gardiens, puis Man Of Steel et Batman VS Superman, le talentueux réalisateur de 300 et Sucker Punch est ici producteur exécutif. Et il y a beaucoup de Sucker Punch, sorte d’ « Alice aux pays des merveilles avec des flingues » dixit Snyder, dans l’aspect visuel de Suicide Squad, et notamment dans le traitement du personnage de Harley Quinn, qui, disons-le tout net, est le plus bel atout du film. Le cocktail séduit grâce à ses aspects de comédie parodique, ses vannes un peu nulles (le « Démerde toi toute seule, morue ! », d’Amanda Waller à la très méchante du film étant un sommet), ses teintes pop et son sentimentalisme un peu cucul (dans ce registre, Deadshot et sa fille décrochent le pompon). Alors qu’importe que cette bande de vilains obligés d’œuvrer ensemble pour sauver le monde soit trop sympathique, et pas assez terrifiante au goût de certains (qui donc, malgré le climat anxiogène du moment, seraient en manque…). Qu’importe que les héros fassent des blagues pourries, que l’intrigue et ses ficelles soient abracadabrantesques, qu’on croule sous l’avalanche de tubes pop rock (entre autres, « The House Of The Rising Sun », « You Don’t Own Me », « Sympathy For The Devil », « Bohemian Rhapsody », « Fortunate Son », « I Started A Joke »…), Suicide Squad, c’est fun. Le créateur de la bande dessinée lui-même assure ne pas avoir été déçu. En attendant, il y a fort à parier qu’on va être témoins d’une recrudescence de filles en couettes sur les plages cet été.
2 h 03 Et avec Will Smith, Cara Delevingne, Jay Hernandez, Joel Kinnaman, Adewale Akinnuoye-Agbaje, Jail Courtney, Adam Beach, Karen Fukuhara, Ben Affleck…

BANDE-ANNONCE

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SUICIDE SQUAD
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SUICIDE SQUAD
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SUICIDE SQUAD

SUCKER PUNCH

« Chacun de nous a un ange. Un gardien, qui veille sur nous. On ne sait pas quelle forme ils vont prendre. Un jour c’est un vieillard, un jour une petite fille…»

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SUCKER PUNCH

Zack Snyder
2011
Au début des années 60. A la mort de sa mère, Baby Doll (Emily Browning) est enfermée par son meurtrier de beau-père dans un asile psychiatrique où elle doit être lobotomisée. Afin de s’échapper de cet enfer, la jeune fille se crée une réalité parallèle aux allures de cabaret et maison close, dirigé par Vera Gorski et Blue Jones (Carla Gugino et Oscar Isaac). Elle convainc ses camarades d’infortune (Abbie Cornish, Jena Malone, Vanessa Hudgens, Jamie Chung) de s’enfuir avec elle. Mais pour cela, les demoiselles devront survivre à une série d’épreuves, et affronter des samouraïs, zombies, nazis, orques et autres dragons. La liberté est à ce prix…

Bienvenue dans l’univers imaginaire foisonnant de Zack Snyder, auteur (avec Steve Shibuya) et créateur en 2011 de ce qu’il a nommé un « Alice au pays des merveilles avec des flingues. » Le cinéaste de L’armée des morts, 300 et Watchmen signe ici un conte ultra esthétisant, à la croisée de la comédie musicale, du manga et du jeu vidéo. Les héroïnes se meuvent dans trois univers parallèles : l’hôpital psychiatrique gothique, le cabaret flamboyant façon Moulin Rouge! de Baz Luhrmann, et des paysages dévastés par les guerres passées ou futures. Ces projections du subconscient de Baby Doll sont symbolisées par les chansons, efficaces et glamour, travaillées par Marius De Vries et Tyler Bates, qui ont réarrangé pléthore de tubes « Sweet Dreams » (interprétée par Emily Browning), « Love Is The Drug », « White Rabbit », « We Will Rock You » etc. Illuminé par un bouquet de jeunes actrices sexy en guêpière et porte-jarretelles, armées jusqu’aux dents, Sucker Punch a tout du film fantasme pour geeks. Les détracteurs on reproché les visuels qui jouent constamment la surenchère, l’aspect clippesque et les combats épuisants empruntés aux jeux vidéo qui servent un scénario aux enjeux un peu minces. Mais s’il peu parfois paraître indigeste, Sucker Punch suscite aussi de véritables émotions qui font de lui bien plus qu’une curiosité.
1h 50 Et avec Jon Hamm, Scott Glenn, Richard Cetrone, Ron Selmour…

Rédigé pour fnac.com en 2011